2. 3. ADORATION ET PROCESSION AU SAINT SACREMENT

Les Jésuites ont traduit les expressions adoration et Salut au Saint Sacrement par un même terme kikongo, « lukembilu » 1 . Le salut au Saint Sacrement, souvent précédé par une procession, se déroule le soir des grandes fêtes liturgiques et particulièrement lors des célébrations mariales et de la Fête-Dieu.

La procession des rogations du mois marial, en mai, offre une occasion de défiler avec le Saint Sacrement et de l’exposer pour le salut et l’adoration. Pendant trente jours, les Pères organisent chaque soir, à l’église, des exercices de piété pour vénérer Marie : chant d’un cantique à la Ste Vierge, lecture des apparitions de Lourdes (en Kikongo), exposition du Saint Sacrement, Salut avec récitation de 2 dizaines de chapelet et les litanies de la Sainte Vierge. Ce mois marial se clôture, le 31 mai, par une Procession du Saint Sacrement : 

« Pour la première fois, on contourne tout notre domaine par les belles allées tracées au cours de l’année. On récite le chapelet. Comme l’an dernier, les enfants ont été recueillis et ils ont marché dans un ordre parfait. Représentez-vous un défilé de près de 1.700 personnes : filles et garçons priant à haute voix. Spectacle qui a dû toucher le Cœur de Jésus et attirer sa bénédiction sur toute cette population ». « Le temps est magnifique. Après la messe de 6h ¼, la procession se met en marche. Un reposoir où domine la statue de ND de Lourdes a été dressé sur le perron de notre maison. Tout se déroule dans le recueillement et l’ordre le plus parfait » 2 .

En la fête Dieu, la procession du Saint Sacrement est plus solennelle encore. Celle, organisée le 15 juin 1931, est une première. D’après le rapport des Sœurs, « elle fut un vrai triomphe pour Jésus - Hostie. Tout se déroula dans le recueillement et l’ordre le plus parfait. La journée était splendide. Rien de plus impressionnant pour nos cœurs que la pensée que Jésus était porté pour la première fois dans ce coin de terre voué il y a quelques années au paganisme » 1 . Toutes ces processions et toutes ces cérémonies liturgique ne se passaient pas toujours comme les missionnaires auraient souhaité. Les conditions climatiques et des impondérables d’un autre ordre pouvaient venir troubler la fête. Ainsi, par exemple, le 3 juin 1932, une tornade tropicale vient ternir la fête du Sacré-Cœur : « À 6 h ¼ , grand- messe à l’église. Répondant à l’invitation du R. P. Struyf , la plupart des catéchistes sont revenus pour la fête, accompagnés de leurs femmes. Aussi, Satan montra visiblement sa rage. Au moment de la Messe, la foudre gronde, les éclairs sillonnent les nues, la pluie tombe en torrent. Malgré cela, l’église regorge de monde et bien des catéchumènes sont obligés de rester sous la véranda. Malgré le bruit, malgré la peur, l’office se poursuit dans le recueillement. Journée de victoire pour Jésus et de défaite pour Satan » 2 .

Toutes ces processions et tous ces temps de prière rythmaient la vie à la mission et rendaient moins monotone le séjour dans ce milieu où les danses et toutes les réjouissances indigènes étaient interdites. Ipamu, comme d’ailleurs, toutes les missions créées par les Jésuites, est un univers clos, où tout se déroule suivant un horaire précis imposé par les missionnaires : prière du matin, catéchisme ou école, travail manuel, l’angélus à midi, prière du soir, etc.

Dans ce milieu, au style presque monacal, il n’y a pas de place pour les réjouissances mondaines ; et souvent les prêtres n’hésitent pas, d’un ton ferme, à le rappeler.

Notes
1.

« Lukembilu » vient du verbe « kukembila » qui signifie dire les louanges pour quelqu’un, adorer.

2.

RSSMN, mai, 1934.

1.

Idem, juin, 1933

2.

Idem, juin, 1932.