3. 2. LA COMMUNION

Le mot « communion » a été traduit en kikongo par le vocable « Mbundana » 2 . Nous n’avons pas trouvé d’indices qui montrent que les Jésuites auraient organisé des cérémonies de première communion pour les enfants nés de parents chrétiens. Les enfants de chrétiens de Pangu étaient-ils encore trop jeunes ou simplement les Jésuites n’accordaient-ils pas une importance particulière à ce genre de cérémonie ? Peut-être que ces premières communions se faisaient au même moment que celles de néophytes. En tout cas, à plusieurs reprises, les manuscrits nous décrivent les cérémonies où les premières communions sont administrées aux nouveaux baptisés. Ces séances se déroulent, chaque fois, le lendemain du baptême.

C’est en 1934, à l’époque des Oblats, en la fête de la Sainte Trinité, que pour la première fois, d’une façon très solennelle, la première communion de 21 enfants de chrétiens, parmi lesquels 9 filles et 3 garçonnets de classes de Sœurs, est organisée à Ipamu. Les Sœurs de Sainte Marie de Namur commentent cet événement :

‘Tous furent préparés à ce grand acte de leur vie, par un catéchisme spécial et plusieurs instructions. Nos petites filles étaient vêtues de blanc, nos trois garçonnets en pantalon bleu et blouse blanche garnie de bleu. Tous avaient un cierge en main. À 6 h ¼ un des Pères revêtu de la charpe et accompagné des enfants de chœur vint les chercher chez nous. Les autres enfants, garçons et filles, et les gens mariés faisaient la haie. On se rendit en procession à l’église au chant de « Laudate Dominum » alternant avec la récitation du chapelet. La plupart des parents étaient dans le cortège. 8 des enfants étaient d’Ipamu même. L’église avait été ornée comme aux grandes fêtes. Tous nos premiers communiants occupaient la place d’honneur. À l’Évangile, allocution de circonstance par le R.P. Adam. À la communion, tous vinrent communier à l’autel. À la fin de la messe, exposition du St Sacrement puis devant la statue du Sacré-Cœur qui se trouvait au milieu du chœur, le cierge à la main gauche, et la main droite sur les évangiles, nos heureux du jour, vinrent faire la rénovation des vœux du baptême. Ensuite l’aînée de nos fillettes, lu une consécration à la Ste Vierge. Première cérémonie de ce genre à Ipamu et combien consolante pour le Cœur du Divin Maître. Puisse son appel « Laissez venir à moi les petits enfants » être compris de tous nos parents chrétiens.Combien le bon Dieu doit être content chaque matin, de voir ces chers petits, faire plus d’un Km pour venir communier à la messe de 5 h ½ 1 .’

Les missionnaires reconnaissent que la communion fréquente est très en honneur parmi leurs chrétiens d’Ipamu. Ils se confessent régulièment et affluent à la messe dominicale pour s’approcher de l’Eucharistie. Le Père Dom témoigne :

‘La communion fréquente est très en honneur parmi nos chrétiens. Il leur est libre de se confesser tous les jours s’ils le veulent, après la prière du soir, un Père se tient à leur disposition. Je ne puis pas encore les entendre, ne connaissant pas suffisamment leur langue ; j’espère pouvoir le faire à Pâques. Tous les samedis, les chrétiens nous arrivent des environs pour se confesser et communier le lendemain ; ceux qui habitent à une heure de la Mission sont tenus à l’assistance à la messe de dimanche. Beaucoup de travailleurs de Mangay nous arrivent aussi avant le jour, s’ils n’ont pu se confesser la veille. Ils sont à la porte de l’église pour attendre leur tour. Ce jour là, la messe est à six heures un quart, les autres jours à cinq heures vingt 2 .’

La communion, comme le baptême, a aussi engendré ses légendes et ses mythes parmi les indigènes. La Sœur Marie Joseph rapporte une de ces pratiques rencontrées parmi les filles en Mwilambongo : « La communion ! Elles y tiennent encore plus qu’à leur chapelet ! Avant la communion : elles se lavent très soigneusement la bouche et puisqu’elles doivent être à jeun, elles ne peuvent donc pas avaler leur salive ; aussi profitent-elle d’un instant d’inattention pour lancer prestement et vigoureusement le trop plein du liquide par les ouvertures qui servent de fenêtres ! Si vous passez de l’autre côté pour une surveillance… pensez à Jésus au prétoire ! » 3

Beaucoup d’autres choses dites à propos de l’hostie subsistaient encore jusqu’à une époque récente. Par exemple, il nous était rappelé lorsque nous étions enfant, que l’hostie ne devait pas toucher les dents au risque de les abîmer. Un jeune homme ayant imprudemment mâché une hostie, il aurait vu subitement sa bouche se remplir de sang. Il a dû se dénoncer auprès du Père Supérieur pour arrêter cette sorte « d’hémorragie »! Il nous a été également rapporté l’histoire d'un voleur ayant forcé un tabernacle qui serait resté figé devant celui-ci avec le ciboire qu’il voulait dérober entre les mains! Il n’a pu se tirer d’affaires que grâce à la présence du Père qui lui a administré une forte punition. Ces d’anecdotes ont été nombreuses parmi les chrétiens d’Ipamu. Les plus anciens les transmettaient aux nouveaux et ainsi, « de bouche à oreille », ces « légendes » se sont répandues dans les nouvelles Missions qui se sont créées et parmi les nouvelles générations de chrétiens.

Notes
2.

La « communion des Saints » se dit « Lubundanu lu Basantu ». D’où vient le mot « mbundana » ?

1.

RSSMN, mai, 1934, Ipamu.

2.

DOM, « Lettre aux élèves de Saint Michel… », op.cit., p.218.

3.

DSSFS, novembre 1929, Mwilambongo