5. 1. LES ÉCOLES RURALES

Dans un article publié en avril 1922, le Père Van Hee explique la nouvelle méthode des écoles rurales. Il écrit :

‘Dans toute l’étendue de notre Mission, nous suivons un plan identique d’évangélisation ; il nous donne les meilleurs résultats. Permettez-moi de vous l’exposez en quelques mots.’ ‘Dès qu’une Mission nouvelle a formé ses premières recrues, c’est-à-dire en fait des jeunes gens capables d’enseigner à leurs congénères la doctrine reçue au poste, on les place comme catéchistes-instituteurs dans les villages les plus importants. Cela se fait avec l’assentiment du chef du village, et, le plus souvent, à la demande même de la jeunesse du village. […] C’est ce que nous appelons l’œuvre des écoles rurales. Elle forme la base de tout notre système actuel d’évangélisation 1 .’

Mais comment les Jésuites établissent-ils concrètement ces écoles-rurales ? C’est encore Van Hee qui répond : « L’installation de pareille école est simple. À coté d’une maison convenable en torchis pour le catéchiste, on construit un local également en argile, avec couverture en paille ; ce local sert à la fois d’école et de chapelle. Un tambour indigène ou une tringle de fer font l’office de cloche » 2 .

Ces écoles placées au cœur même du village, forment pourtant un monde à part. Elles ont leur programme édicté par le missionnaire, leur calendrier et leur emploi du temps journalier sans aucune conformité avec les usages du village. Van Hee détaille cet emploi du temps :

‘Le matin de bonne heure, le catéchiste appelle son monde à la chapelle pour la prière et le catéchisme. Vient à la chapelle qui veut ; il n’y a de contrainte d’aucune sorte ; il n’est fait appel qu’à la bonne volonté des postulants. Les exercices du matin terminés, tout le monde est rendu à la liberté : les adultes vont au travail, les enfants les accompagnent ou se livrent à leurs ébats. À 10 heures, la jeunesse revient, pour la classe, et sous la conduite du catéchiste-maître d’école, les marmots épellent courageusement leur abécédaire ; les plus avancés lisent quelque livre élémentaire ou griffonnent sur une ardoise les premiers éléments de l’écriture. Tout cela pèle-mêle, à tue-tête, sans que personne ne s’occupe de son voisin. L’après-midi, la classe recommence pour ceux qui veulent bien y revenir, et le soir, la chapelle se remplit de nouveau pour la prière et le catéchisme. De temps en temps, l’école rurale reçoit la visite du missionnaire ; jour redoutable pour les paresseux, car tout le monde est appelé à l’examen 3 . ’

Lorsque Vanderyst et Struyf arrivent dans la région d’Ipamu, ils commencent par l’implantation des écoles rurales. Les sources de cette époque, notamment la correspondance relative au conflit qui oppose les missionnaires aux agents de l’État, indiquent qu’entre 1921 et 1923, les jésuites avaient disséminé leurs catéchistes-instituteurs dans la presque totalité du territoire des Ding orientaux compris entre la Piopio et la Loange. Une partie des Ngwi (surtout ceux proche de Mangaï), les Ding du Sud-Ouest et les Mbuun (jusque dans la région d’Ifwanzondo) ont aussi leurs écoles rurales.

Dans ce premier temps, les Jésuites ont eu recours aux catéchistes formés par les Pères scheutistes de l’ancienne mission de Pangu et à ceux qu’ils importaient du Bas-Congo et du Kwilu. Ces catéchistes-instituteurs (surtout ceux venus d’ailleurs) ont été, comme nous l’avons déjà évoqué, à l’origine d’un certain nombre de conflits qui ont surgi entre les missionnaires, les chefs traditionnels et l’État. Malgré toutes les difficultés qu’il a pu engendrer, le système d’écoles rurales a été à la base de la prospérité des nouvelles chrétientés qui vont bientôt se développer dans la zone couverte par la mission d’Ipamu et chez les Ding orientaux.

Notes
1.

VAN HEE, « Écoles rurales et catéchistes dans la Mission du Kwango » in Revue des Missions Belges, Supplément, avril, 1922, p. 1.

2.

Idem, p. 1.

3.

VAN HEE, « Écoles rurales et catéchistes dans la Mission du Kwango » in Revue des Missions Belges,. 1-2.