2. 3. 2. Contraintes liées à la mise en valeur de la région et à l'occupation européenne

Ensuite, toutes les contraintes liées à la mise en valeur de la région et à l'occupation des terres par les Européens ont aussi joué un rôle négatif dans l’évolution démographique. À partir de 1892, de nombreuses compagnies commerciales installent leurs agents dans les factoreries créées pour la « récolte » de l'ivoire et du caoutchouc. En 1901, la Compagnie du Kasaï prend le monopole du commerce dans la région. Toute la population masculine est mise à contribution pour la production. Pour nourrir les agents et les travailleurs dans les factoreries et les stations, il est systématiquement fait appel aux villageois, le plus souvent de manière brutale. Cette nouvelle donne socio-économique ne manquera pas de bouleverser les manières traditionnelles de s'approvisionner et de distribuer la nourriture. Aussi la famine ne tardera-t-elle pas à s'installer dans cette région qui, quelques décennies plus tôt, était réputée prospère : grands champs de manioc, de nombreuses plantations de bananes, des poissons bon marché, des victuailles en abondance, etc.

Selon les témoignages du début du 20e siècle, la disette - et même la peur du Blanc – règnent sur cette région. Les premiers missionnaires de Pangu ne se voient offrir que peu de vivres à acheter. Un jeune Jésuite d’Ipamu, ne manquera pas de stigmatiser la famine existant dans la région 1 . L'avis de Mertens au sujet de l'alimentation n'est guère plus favorable pour la contrée 2 .

Si nous comparons ces allégations aux propos de premiers voyageurs du 19e siècle avec l'éloge de la production alimentaire, nous constatons la régression opérée entre les deux périodes. Les hommes et les femmes que Wissmann et Stache qualifiaient de robustes, deviennent donc, en l'espace de quelques décennies, chétifs, frileux et paresseux !

Notes
1.

DELAERE, Cf. Supra.

2.

MERTENS, op.cit., p. 66.