3. 3. 3. Le travail du raphia.

D'après les informations recueillies par Nzumguba, avant le port de tissus en raphia, les Ding orientaux se seraient habillés d'écorces d'arbre battues, de feuilles et de peaux de bête. Portés sous forme de cache-sexe (mundin), ces habits couvraient principalement les organes génitaux 1 .

À une époque difficile à déterminer, les Ding connurent l'usage du tissu de raphia. La légende rapporte que l'artisan ding serait parti de l'observation d'un oiseau, le passereau appelé « ndié », qui tisse son nid avec les feuilles de palmier elæis. Il est difficile, à l'état actuel de nos connaissances, de créditer cette allégation. Nous savons simplement que le tissu de raphia était très répandu dans tout le bassin du Congo et surtout dans la savane du sud, bien avant le 19e siècle. Les sources anciennes du royaume Kongo le signalent dès le 15e siècle. Chez les Ding orientaux, le tissu de raphia restera encore l'habit ordinaire jusque dans les années 1940, comme en témoignent les écrits coloniaux et missionnaires 2 .

Le raphia est la matière principale sinon essentielle du tissage. Il provient du palmier à raphia (laurentii).

Pour avoir les fils à tisser, l'artisan cueille les feuilles de raphia pennées dont les folioles sont mures, même si elles sont encore accolées au rachis. Puis les feuilles sont immédiatement dépouillées de leurs folioles, découpées en minces lanières, elles sont séchées au soleil ; elles prennent la teinte jaunâtre.

Mertens décrit un métier à tisser qu'il a observé chez les Ding orientaux 3  : le tissu de raphia est formé par un entrelacement régulier des fils soumis à une tension et à une liaison perpendiculaire de deux séries.

Le tissage est un métier difficile à maîtriser. Il exige une longue formation auprès d'un spécialiste. Parce qu'il devait habiller toute la société et même la noblesse, le tisserand jouit d'une certaine considération. Il a sa place dans le conseil du village. La tradition veut aussi qu'une part de gibier lui soit réservé même s'il n'a pas participé à la partie de chasse. Le vendangeur doit, aussi, lui offrir gratuitement son vin de palme.

Ces tisserands se sont-ils constitués en un rigide corps de métier avec son code et ses interdits ? Nos informations sont limitées et partielles concernant ce corps de métier ; elles le sont également pour le volume et le mode de distribution du tissu de raphia chez les Ding orientaux ; par contre nous pouvons dire l'usage qu'ils en font : il sert comme habit ordinaire (mbal), vêtement d'apparat pour les chefs et pour certaines solennités (sang). Il sert aussi de vêtement d'ensevelissement des morts et d’ornement des cercueils et, même, de pagne pour couvrir la dépouille du léopard et les calebasses de boissons destinées aux chefs.

Chez les Mbuun – et peut-être chez les Lele, - le tissus de raphia, sous forme roulée et tressée, avait une valeur dotale et de monnaie d'échange.

Chez les Ding, malgré ses multiples usages, le tissus de raphia n'avait pas, semble-t-il, le même prestige.

Les administrateurs coloniaux ont continué, jusque vers les années 1950, à se servir du tissu de raphia comme valeur dotale et monétaire chez les Mbuun.

Notes
1.

NZUMGUBA, op.cit., p. 103.

2.

DELAERE, « À Ipamu », op. cit. p. 177.

3.

MERTENS, Les Ba Dzing…, op.cit., p. 178.