Pour résoudre l’éternel problème de la cause de la mort et du mal absolu engendré par la sorcellerie, les Ding orientaux ont eu recours, dans le nouveau contexte politique qui était le leur, celui de la colonisation, à des recettes qui, traditionnellement, leur étaient familières, à savoir les cultes « anti-sorciers ». Le Lukoshi est le plus important de ces cultes qui ont émergé à l’époque des Jésuites et pour lequel nous disposons actuellement d’une abondante documentation.
Selon Vansina, « Lukoshi ou des dérivés de ce vocable sont les noms donnés à un culte religieux issu d’un mouvement précédent, Omotamba, vers 1920-1924 » 1 . L’étude de Vansina se base sur le fonds « sectes secrètes » des archives provinciales de Kananga. Ici, cette rubrique n'a été mise en place qu’en 1924 2 . Or la prise de conscience par l’État colonial de l’existence des sectes dites secrètes est bien antérieure à cette date. La première circulaire du gouverneur attirant l’attention des commissaires de District sur cette question date du 3 septembre 1917. En janvier 1918, une deuxième circulaire est rédigée précisant l’attitude que les Commissaires de District doivent avoir vis-à-vis de ces sectes secrètes :
‘Dans la circulaire n° 35 du 3 septembre 1917, j’ai attiré votre attention sur les sectes secrètes dont le nombre tend à s’accroître parmi les indigènes. Je vous demande de vous appliquer à découvrir leur existence et de tâcher de connaître, par une enquête discrète, les buts qu’elles poursuivent et les pratiques qu’elles imposent à leurs adhérents. En vue de documenter le gouvernement pour l’étude des armes légales pouvant être mises entre les mains des autorités pour combattre les sociétés de cette nature, j’ai l’honneur de vous prier de m’envoyer tous les renseignements que vous auriez pu recueillir sur elles, notamment leur but, leur caractère, leurs pratiques, l’initiation qu’elle font subir à leur membres 3 .’Nous estimons que le Lukoshi serait apparu bien avant 1924. En effet, un charme de chasse du nom de Omotamba existait plus tard, vers 1923, au nord, en territoire de Lomela. Il est attesté au sud de Bena Dibele, non loin du village d’origine du Lukoshi 4 .
VANSINA, « Lukoshi/Lupambula… », op.cit., p. 51.
Nous avons, pour notre part, consulté les Archives africaines du Ministère Belge des Affaires étrangères (AF-AMBAE), notamment le fonds AIMO, II. D. 15.C. Affaires Indigènes.
Circulaire du Gouverneur Général, Boma, le 29 janvier 1918, AMBAE, AIMO, II. D.15, C5.
VANSINA, « Lukoshi/Lupambulu… », op.cit., p. 59.