De la charte au Parc

Le Parc est donc créé à la fin de l'année 1995, et sa charte signée par les communes au début de l'année 1996. Celle-ci décline ses objectifs en trois grandes sections : « préserver un patrimoine de qualité, à forte identité », « une politique de développement revitalisante » et « accueillir et communiquer ».

Il est intéressant de se pencher sur la place conférée dans cette charte à la valorisation du patrimoine. Le patrimoine qui est évoqué dans la première section est essentiellement constitué par le « patrimoine naturel », ainsi que par l'architecture et les paysages. L'architecture, en particulier, doit « faire renaître l'identité culturelle des Bauges  139 ». Les autres éléments désignés comme patrimoine culturel (« petit patrimoine rural », patrimoine « immatériel ») sont mentionnés surtout dans la section « une politique de développement revitalisante », dans une partie consacrée à « une offre touristique de qualité dans un cadre authentique ». Ce patrimoine est donc présenté d'abord et avant tout comme ce qui doit conférer ses qualités à l'offre touristique. D'ailleurs, dans l'organigramme prévisionnel de l'équipe, on peut lire que le chargé de mission aura pour rôle la « valorisation touristique du patrimoine » 140 .

Arrêtons nous sur « style » revendiqué dans la charte par le PNR, qui transparaît notamment dans la dernière section du document intitulée « le fonctionnement du Parc ». Par rapport aux collectivités locales existantes, les auteurs insistent sur le fait que le Parc se veut un animateur, un coordinateur d'un réseau de partenaires et non un « échelon administratif supplémentaire » 141 et qu'il n'a pas de « visée hégémonique » sur les autres groupements de communes. Le texte porte ensuite sur la participation des « forces vives »- c'est-à-dire « les institutions, les organismes socio-économiques, le monde associatif, les professionnels locaux... »- à l'organisme de gestion. L'intention d'être à l'écoute d'un « population qui participe » était déjà mentionnée dans le chapitre « accueillir et communiquer », avec notamment un paragraphe intitulé « des échanges directs et permanents avec la population ». 142

La charte affiche donc d'importantes ambitions en matière de démocratie participative. Il s'agit de permettre une meilleure concertation et de consulter avant toute action les acteurs existant.

Cependant, nous pouvons d'ores et déjà remarquer un décalage entre ce qui est annoncé dans la charte et ce qui existe en réalité.

Les « forces vives », est-il annoncé organigramme à l'appui, doivent participer activement à la vie du Parc « à quatre niveaux » : les commissions thématiques, dont j'ai déjà décrit le fonctionnement, le comité technique, constitué par des représentants de toutes les commissions, le comité scientifique et l'association des Amis et Usagers du parc. Or, ces deux derniers organes n'ont jamais vu le jour. Si la création d'une association des amis et usagers n'est pas du ressort du Parc, celle d'un comité scientifique l'est en revanche. Alors que le Parc arrive au terme de sa charte, celui-ci n'a toujours pas été mis en place.

Autre préconisation oubliée, celle de la création d'une « centrale de documentation », qui devait permettre la diffusion des études et inventaires réalisés sur le massif et être « utilisable par tous ». Actuellement, si les salariés du Parc entreposent dans son siège de nombreux rapports de recherches, rien n'a été entrepris pour permettre au public d'accéder à cet important fond documentaire. La maison du Parc dispose d'un imposant hall d'accueil, mais n'est pas à proprement parler un lieu d'accueil du public. L'on ne peut s'y rendre que si l'on est invité à une réunion ou pour un rendez-vous avec un chargé de mission.

Enfin il est étonnant de constater que l'organigramme de l'équipe prévue au départ ne comporte que 9 personnes. Aujourd'hui le Parc compte 17 salariés. Il semble qu'à l'époque, les promoteurs du dispositif aient voulu rassurer une partie de la population réticente à l'idée de voir une nouvelle institution voir le jour. Une « petite équipe » avait donc été annoncée. Elle est décrite dans la charte comme « très accrochée "au terrain" » 143 .

Notes
139.

Charte du PNRMB, Charte d'objectifs, p 34.

140.

Ibidem, p 82.

141.

Ibidem, p 79.

142.

Ibidem, p 74.

143.

Ibidem, p 82.