Les nouveaux liens entre individu et communauté

Ce travail débouche aussi sur de nouvelles questions qu'il conviendrait d'approfondir.

Les problématiques ouvertes ici à partir de l'exemple d'un territoire rural mériteraient pour nombre d'entre elles d'être interrogées à partir de travaux de terrain en milieu urbain.

On peut se demander dans quelle mesure les processus visant à la constitution d'un groupe fondé sur la construction commune d'une localité, et non sur le partage a priori d'un centre d'intérêt ou d'une idéologie, trouvent leur équivalent au sein des agglomérations. Quelles formes peuvent prendre, à l'intérieur des grands ensembles urbains, d'éventuelles tentatives visant à mettre en place des réseaux d'interconnaissance ? Je pense ici au regain de vitalité que peuvent connaître en France les associations visant à animer les quartiers, ou à la création volontaire de groupes fondés sur la localité, comme par exemple les Systèmes d'Echanges Locaux (SEL). Si désormais le territoire, la localité, la communauté sont perçus et vécus comme des constructions et non pas comme des cultures que l'on partagerait d'emblée, quelles conséquences cela a-t-il sur les sociabilités urbaines ? Comment se crée ou ne se crée pas le commun lorsque de fortes densités de populations se conjuguent avec d'importantes différences culturelles ?

En lien avec cette question, le désir manifesté en Bauges de formes de démocratie « directes » ou « participative » reflète sans doute des interrogations plus générales de nos sociétés au sujet des lieux de pouvoir et de prise de décision. Alors que l'individu tend à s'affirmer, à revendiquer une autonomie d'appréciation et de jugement, les lieux au sein desquels il est possible d'échanger des arguments et de s'exprimer d'une manière publique au sujet du collectif semblent se faire bien lointains. Dans les réclamations baujues concernant la création de lieux de paroles se profile le souhait de nouveaux lieux politiques qui prennent en compte cette montée de l'individualité. Désormais, chacun souhaite pouvoir parler par et pour lui-même et non au travers de la représentativité ou de groupes plus ou moins institués. Là encore, il me semble qu'il serait intéressant de rebondir sur cette hypothèse pour observer ce type de mouvement en milieu urbain.