2.1.2. Intérêts et limites

Les données utilisées dans ce travail permettent de raisonner sur des échantillons de grande taille. Elles offrent ainsi la possibilité de faire la part entre la dimension socio-démographique de la mobilité (liée à l’âge, la génération, l’activité, le type de ménage…), les effets liés à la localisation résidentielle et ceux qu’il est possible d’attribuer au revenu. Elles permettent ainsi de procéder à une analyse des inégalités économiques de mobilité « toutes choses égales par ailleurs », c’est-à-dire décorrélée de ces différents effets.

Le recours à plusieurs types d’enquêtes, bien que contraint par l’absence de données homogènes, présente un intérêt qui réside à la fois dans la diversité des données fournies par les enquêtes et dans l’hybridation et l’éventuelle convergence dans les analyses qu’elles permettent de développer. Il reste que ces enquêtes, comme toutes les enquêtes quantitatives représentatives, ne recueillent que très partiellement les comportements des populations marginalisées. Ce n’est pas à notre sens, un handicap majeur au regard de la problématique des inégalités que nous avons développée précédemment. En effet nous nous situons dans un cadre d’analyse qui considère les inégalités comme constitutives de la société. Elles ne concernent pas uniquement les marges, les situations d’exclusion, la pauvreté extrême mais traversent au contraire le cœur, l’ensemble de notre organisation sociale 1 .

Concernant la prise en compte des différentes formes de mobilité, on ne peut que regretter l’absence de données permettant de suivre un vaste échantillon d’individus, à différentes périodes (semaine, week-end, année) et sur différentes échelles spatiales (en urbain, local et non-local). Cette impossibilité est pour partie liée à la modification du mode de tirage de l’individu dans l’enquête transport, ce qui ne permet pas d’analyser la mobilité d’un même individu aux différentes échelles spatio-temporelles d’observation, sauf à restreindre l’échantillon aux individus ayant répondu aux trois questionnaires. Dans ce cas, il faudrait redresser convenablement l’échantillon obtenu pour le rendre représentatif, or cette opération implique des manipulations, qui peuvent s’avérer hasardeuses. De plus, la réduction de l’échantillon de départ, en limitant les possibilités de décorrélation, empêche de distinguer clairement l’impact du revenu des autres paramètres pesant sur la mobilité. Pour toutes ces raisons, et compte tenu des objectifs que nous nous sommes fixés, la restriction de l’échantillon de départ constitue une option que nous n’avons pas souhaitée retenir.

Pour pallier en partie cette absence de données homogènes et afin de mettre en évidence des tendances robustes sur les différents segments de la mobilité, nous avons choisi de limiter l’analyse de la mobilité de fin de semaine et de longue distance aux seuls résidants des agglomérations de province d’au moins 20 000 habitants. Ce choix revient à exclure les habitants de l’unité urbaine de Paris et des communes rurales hors influence urbaine pour lesquels, nous le montrerons, les pratiques de mobilité sont assez distinctes du reste de la population. Bien que cette situation ne soit pas tout à fait satisfaisante, elle permet toutefois de raisonner sur des cadres spatiaux relativement homogènes, facilitant les comparaisons. Cette option offre ainsi la possibilité de recomposer, même de façon assez sommaire, l’impact du revenu sur les différents segments de mobilité analysés.

Notes
1.

Cela ne signifie pas que nous sous-estimions la gravité des problèmes d’exclusion, qui par leur acuité, semblent au contraire nécessiter un traitement spécifique, même s’ils participent selon nous d’une problématique plus vaste, interrogeant la globalité de notre société.