2.2.3.1. L’information disponible dans les enquêtes

Dans l’enquête nationale transport, l’information sur les revenus a été recueillie au niveau individuel, pour les différents types de ressources (salaires, allocations, dividendes…). Elle a ensuite été reconstituée au niveau du ménage. Le questionnaire distinguait très clairement les :

  • traitements et salaires, primes incluses (y.c rémunération des emplois temporaires, des activités secondaires, salaires des dirigeants salariés de leur entreprise, indemnités journalières, 13ème mois)
  • revenus des professions indépendantes et agricoles
  • allocations chômages et RMI
  • préretraites, retraites, pensions et rentes diverses (minimum vieillesse, aide aux personnes âgées, invalidité, incapacité, pensions alimentaires…), bourses d’études
  • dividendes, revenus des actifs financiers, loyers et fermages et les prestations familiales, allocations logement…

Lorsque le répondant a refusé de donner ses revenus en clair, on lui posait la question suivante : « A votre avis, en tenant compte, de tous les revenus de toutes les personnes de votre ménage, de quel revenu avez-vous disposé au cours de la dernière année ». Il lui était demandé de situer le revenu du ménage à partir d’une grille en 9 tranches donnant un montant mensuel et un équivalent annuel. Le milieu de la classe de revenu choisie a alors été considéré comme le revenu du ménage. En 1993, 68,7 % des ménages ont déclaré un revenu en clair (soit 70,1 % en chiffres redressés), tandis que 25,3 % de l’échantillon des ménages a fourni un revenu en tranches (soit 24,1 % en données redressées). Le détail des différentes sources de revenu souligne clairement la volonté d’intégrer les différentes sources de revenus (revenus d’activités, revenus sociaux, revenus du patrimoine), afin de disposer de l’appréciation la plus précise du niveau de vie du ménage. Cependant, rien n’indique dans le questionnaire que l’estimation fournie prennent en compte les impôts directs. Par simplification et parce que la question posée semble le suggérer (on cherche une estimation précise des différentes sources) on considèrera qu’il s’agit du revenu disponible du ménage.

Dans l’enquête ménages de l’agglomération lyonnaise, l’information sur les revenus est beaucoup plus approximative. Les ménages devaient indiquer leur revenu mensuel à partir de la question suivante : « Quel est actuellement le montant total des revenus mensuels de votre ménage (y compris prestations sociales) ? ». Une carte comprenant 10 tranches de revenu était alors présentée aux ménages, à charge pour eux d’indiquer la tranche de revenu correspondant à leur situation. La question posée ne détaille pas réellement les différentes sources de revenu à prendre en compte, l’interprétation est laissée à la personne de référence du ménage. On considèrera cependant que l’individu tient compte de l’ensemble des ressources monétaires dont il dispose. On peut en effet raisonnablement penser que l’estimation fournie correspond au revenu disponible du ménage, c’est-à-dire à la somme des revenus d’activités, des revenus sociaux et des revenus du patrimoine perçus chaque mois par le ménage, à laquelle ont été déduits les prélèvements obligatoires, même si rien ne permet réellement de le vérifier. En 1995, 85 % des ménages de l’agglomération lyonnaise ont indiqué leur tranche de revenu. Les foyers n’ayant pas souhaité indiquer leur revenu mensuel (15 %) ne correspondent pas fondamentalement à des catégories de ménages présentant des caractéristiques homogènes 1 . Une telle méthode de recensement des revenus ne saurait prétendre fournir une représentation précise de la distribution des revenus dans l’agglomération, objectif difficile à atteindre même dans le cadre des enquêtes « Budget de famille » de l’INSEE, qui mettent cependant en place un dispositif beaucoup plus fin d’identification des différentes sources de revenus. Cela dit cette méthode d’identification des revenus étant la seule disponible dans le cadre des enquêtes ménages, on est en quelque sorte condamner à utiliser au mieux cette variable sans pour autant abandonner toutes perspectives d’amélioration de la saisie des revenus des ménages dans le cadre des enquêtes ultérieures.

A partir des données recueillies dans l’enquête nationale transport, toutes les informations nécessaires pour tenir compte de la composition du ménage sont disponibles. Nous avons donc calculé un revenu par UC, permettant d’intégrer les éventuelles économies d’échelle au sein des ménages. Ce revenu par UC a ensuite été classé en déciles puis en quintiles. Pour calculer un revenu par UC à partir de l’information disponible dans l’enquête ménages de Lyon, la solution la plus simple consiste à affecter à chaque ménage le milieu de la tranche de revenu dans laquelle il se situe, puis de rapporter ce revenu moyen au nombre d’UC du ménage. Cependant, en procédant ainsi, on introduit des effets de seuil de revenu qui génèrent des biais importants dans la détermination du revenu, notamment lorsque l’on classe les revenus par déciles. La sanction de ces effets de seuil sur les résultats obtenus est immédiate. Il suffit par exemple de regarder le niveau de motorisation des ménages en fonction de leur revenu (Tableau 6).

Tableau 6 : Effets de seuil et incohérences liés au découpage des revenus en tranche
Revenu en tranches Revenu en déciles par uc Revenu en déciles par uc
des couples avec enfants
Tranches de revenu
(1)
Niveau de motorisation
(2)
Déciles par uc
(3)
Niveau de motorisation
(4)
Décile par uc
(5)
Niveau de motorisation
(6)
moins de 2500 F
de 2500 à 5000 F
de 5000 à 7500 F.
de 7500 à 10000 F.
de 10000 à 12500 F.
de 12500 à 15000 F.
de 15000 à 20000 F.
de 20000 à 30000 F.
de 30000 à 50000 F.
50000 F. et plus
0,38
0,36
0,63
0,94
1,19
1,44
1,61
1,85
2,06
2,48
D1
D2
D3
D4
D5
D6
D7
D8
D9
D10
0,74
0,43
1,10
1,21
0,75
1,51
1,07
1,44
1,58
1,73
D1
D2
D3
D4
D5
D6
D7
D8
D9
D10
1,08
1,28
1,35
1,66
1,62
1,78
2,08
1,92
1,98
2,2
Moyenne 1,15 Moyenne 1,15 Moyenne 1,7

Source : EMD de Lyon 1994-1995

Alors que le niveau de motorisation des ménages (nombre de voitures particulières à libre disposition) semble être une fonction croissante de leur revenu exprimé en tranche (cf. colonne (2)), cette relation étroite devient totalement erratique dès lors que l’on exprime le niveau de motorisation en fonction du revenu par UC (cf. colonne (4)) : les ménages du cinquième décile de revenu par uc, par exemple, ont un niveau de motorisation équivalent aux ménages du premier décile, et nettement inférieur aux ménages des troisième et quatrième déciles. Cela tient au fait que dans le cinquième décile on dénombre beaucoup de célibataires vivant seuls. Si l’on ne s’intéresse qu’aux seuls couples avec enfant (cf. colonne (6)), on retrouve cette fonction croissante de la motorisation des ménages en fonction de leur revenu par UC. Ainsi, afin de s’affranchir des effets de seuil liés au type de ménage, une autre méthode de calcul du revenu par UC des ménages a été développée par Claisse et al. [2000b] dans le cadre du contrat de recherche Inégalités de Déplacement et Équité Sociale.

Notes
1.

On retrouve cependant une très forte réticence des agriculteurs et des commerçants-artisans à indiquer leurs revenus mensuels, respectivement 52 % et 23 % de non-réponses. De même on note une plus forte réticence des personnes de 60 ans ou plus (20 %) à répondre à cette question.