3.2. Une approche par groupe de cycle de vie

Pour chaque individu, il existe une propension initiale à la mobilité qui varie selon l’âge, l’occupation, l’origine sociale, le type de ménage d’appartenance, l’environnement dans lequel la personne évolue, ses habitudes et ses projets, de sorte que se dessine, pour chacun, un potentiel de mobilité, dépendant de facteurs plus ou moins subjectifs et variables selon le degré de participation à la vie en société. L’attention sera portée sur le résultat des arbitrages individuels ou collectifs conduisant à la concrétisation du déplacement. Le système d’opportunités et de contraintes qui guide cet arbitrage dépend pour partie de la position de l’individu dans le cycle de vie et de sa situation vis-à-vis de l’occupation.

Il existe ainsi un certain nombre de déterminants communs de structuration de la mobilité selon la position dans le cycle de vie et l’occupation : à chaque période du cycle de vie correspondent des schémas d’activités contrastés qui s’organisent dans le temps et dans l’espace de manière plus ou moins flexible, le plus souvent autour d’une activité principale. De même, à chaque période du cycle de vie correspondent des opportunités et des contraintes d’activités (travail, étude, intendance ménagère…), des opportunités et des contraintes de déplacements (motorisation du ménage, accès au volant, densité du réseau de transports publics…), des opportunités et des contraintes de localisation (localisation résidentielle, localisation de l’activité principale…) qui structurent très largement les niveaux et les comportements de mobilité. En semaine, par exemple les actifs comme les enfants scolarisés, ont une mobilité fortement prédéterminée par leur activité principale, celle-ci répond aux normes institutionnelles qui introduisent une forme de régularité dans les déplacements.

Compte tenu de ces éléments, il serait a priori vain de rechercher des inégalités, sans neutraliser au moins dans un premier temps, les différences de mobilité liées à la position de l’individu dans le cycle de vie. Une telle démarche comporterait quelques risques, sauf à considérer que, au fur et à mesure que les niveaux de vie des individus augmentent, ils sont en capacité de s’affranchir assez radicalement de ces contraintes et de s’ouvrir de telles opportunités que leur programme d’activités s’en trouverait profondément transformé. Raisonner sur des groupes relativement homogènes en termes d’opportunités et de contraintes, ne permet certes pas de distinguer la mobilité potentielle de la mobilité effective ; cette démarche offre cependant la possibilité de s’affranchir des effets liés à la dimension socio-démographique de la mobilité, et permet en retour une meilleure appréhension de ce qui relève du revenu.

A partir de ces observations plusieurs groupes socio-démographiques, variables selon le type de mobilité analysée, ont été constitués (Tableau 11). Durant la semaine (y.c le week-end) les caractéristiques individuelles comme l’âge, l’activité et la position au sein du ménage sont primordiales. Concernant la mobilité de longue distance pour motifs personnels, qui regroupent essentiellement des déplacements de vacances, de loisirs et de visites, la typologie retenue intègre davantage les facteurs familiaux, comme le type de ménage d’appartenance (célibataires, couples ou familles) et la position dans le cycle de vie des ménages, appréhendée grâce à l’âge de la personne de référence. Ces caractéristiques jouent un rôle plus important que l’occupation quotidienne (actif, au foyer..) dans la détermination des pratiques individuelles de longue distance.

Tableau 11 : Groupes socio-démographiques
Typologie d’analyse de la mobilité individuelle de semaine et de week-end Typologie d’analyse de la mobilité individuelle
de longue distance pour motifs personnels
Ecolier de 6-10 ans Personne seule âgée de moins de 35 ans
Collégien de 11-14 ans Individu en couple sans enfant
PR âgée de moins de 35 ans
Lycéen de 15-20 ans Individu en couple avec enfant
PR âgée de 25-59 ans
Etudiant* de 18-25 ans Individu en couple sans enfant
PR âgée de 60-74 ans
Chef ou conjoint actif à plein temps
âgé de 25-59 ans
Personne seule âgée de 60-74 ans
Chef ou conjoint chômeur âgé de 25-55 ans Individu en couple sans enfant
PR âgée de 75 ans et plus
Chef ou conjoint femme au foyer
âgé de 25-59 ans
Personne seule âgée de 75 ans et plus
Chef ou conjoint retraité âgé de 60-74 ans  
Chef ou conjoint retraité âgé de 75 ans et plus  
*Seuls les étudiants résidants chez leurs parents sont pris en compte
PR : correspond à la Personne de Référence du ménage

Ces typologies laissent à l’écart certains individus (actifs à temps partiel, retraités hébergés par leurs enfants, hommes au foyer, monoparentaux…), afin d’obtenir les groupes les plus homogènes possibles au regard des principaux déterminants de la mobilité. De même, les individus aux profils de vie « atypiques » pour lesquels nous ne disposons pas d’effectif suffisant ont été écartés. Les limites de cette construction sont particulièrement gênantes s’agissant de la non prise en compte des nouvelles formes d’emploi et des modèles familiaux en forte croissance comme les familles monoparentales. C’est donc bien en complémentarité d’approches plus spécifiques quant aux populations enquêtées que ce travail doit être appréhendé.