1.3.1.2. Des comportements différenciés

Compte tenu du cycle de vie de l’automobilité, qui désigne ici tout à la fois le degré d’autonomie de mobilité et l’accès au volant, les comportements des individus en matière de modes de transports utilisés sont très largement fonction de leur position dans le cycle de vie (Tableau 28). Bien évidemment les moins de 18 ans sont captifs de la marche à pied, des accompagnements en voiture ou des transports en commun. La part de la marche à pied et celle des accompagnements en voiture déclinent avec l’autonomisation progressive des enfants et l’éloignement de leur lieu d’étude, au profit des transports en commun. Les étudiants qui continuent d’habiter chez leurs parents commencent à pouvoir accéder à une voiture pour réaliser leurs déplacements. Ils sont donc moins dépendants des transports publics et la part de la marche à pied devient tout à fait secondaire. Lorsque les individus s’installent en ménage et commencent à travailler, l’accès au volant se généralise, leur mobilité est fondamentalement captive de la voiture et la part des transports en commun devient marginale. Les femmes au foyer moins motorisées et ayant une mobilité de plus forte proximité se déplacent certes le plus souvent en voiture, mais aussi assez fréquemment à pied. Leurs comportements modaux sont proches de ceux des chômeurs. Enfin, à la retraite, la voiture reste importante chez les seniors, mais compte tenu de la faible motorisation de cette génération et avec le début de la démotorisation partielle ou définitive, la part des transports en commun augmente. Le phénomène s’accélère avec l’âge.

Tableau 28 : Modes de transports quotidiens selon le cycle de vie
Position dans le cycle de vie Marche à pied (%) Voiture conducteur (%) Voiture passager (%) Transport en commun (%)
Ecolier de 6-10 ans 54 0 41 4
Collégien de 11-14 ans 50 0 28 20
Lycéen de 15-20 ans 34 3 17 43
Etudiant de 18-25 ans* 20 30 14 33
Actif à plein temps de 25-59 ans 21 64 6 7
Chômeur de 25-55 ans 37 47 7 8
Femme au foyer de 25-59 ans 39 46 11 4
Retraité de 60-74 ans 41 33 10 13
Retraité de 75 ans et plus 57 17 10 15
Moyenne sur l’ensemble de la population 32 41 12 13
*Seuls les étudiants résidants chez leurs parents sont pris en compte

Source : EMD de Lyon 1994-1995

Les activités extérieures au domicile varient également selon le cycle de vie (Tableau 29). Les schémas de mobilité des actifs comme des scolaires sont fortement structurés par leur activité principale. Les enfants qui vivent chez leurs parents se déplacent principalement pour se rendre à l’école et pour leurs loisirs. Il faut attendre qu’ils entrent dans la vie active et surtout qu’ils quittent le foyer parental et qu’ils s’installent dans leur propre logement, pour voir apparaître dans leur emploi du temps des déplacements dédiés à l’intendance du ménage. Alors, leur programme d’activités dépendra de leurs charges familiales, de leur activité principale, de la répartition des rôles au sein du ménage et de leur accès à une voiture. Par exemple un célibataire actif n’aura pratiquement pas d’accompagnement à faire (2 % de ses déplacements), à l’inverse une mère de famille au foyer aura de nombreux accompagnements à réaliser (50 % de ses déplacements). Ainsi, au fur et à mesure que les charges de famille augmentent, les déplacements liés aux achats, à la santé, aux démarches et à l’accompagnement gagnent logiquement de l’importance. Lorsque dans un couple avec ou sans enfant les deux conjoints sont actifs, une répartition des rôles s’organisent autour de ces activités, mais ce sont dans l’ensemble plus souvent les femmes qui auront à les assumer. Dès lors que la femme reste au foyer, l’accompagnement des enfants, les courses, les achats et les démarches diverses et variées lui incombent. A la retraite, les hommes bénéficiant en règle générale d’un accès au volant plus élevé, les rôles se rééquilibrent.

Tableau 29: Motifs de déplacements quotidiens selon le cycle de vie
Position dans le cycle de vie Fortement contraints(1) (%) Moyennement contraints(2) (%) Loisirs (%) Visites (%)
Ecolier de 6-10 ans 70 7 15 6
Collégien de 11-14 ans 72 6 16 5
Lycéen de 15-20 ans 64 6 15 10
Etudiant de 18-25 ans* 57 8 16 12
Actif à plein temps de 25-59 ans 67 15 10 6
Chômeur de 25-55 ans 33 28 18 16
Femme au foyer de 25-59 ans 50 26 13 7
Retraité de 60-74 ans 9 45 27 13
Retraité de 75 ans et plus 2 57 22 13
Moyenne sur l’ensemble de la population 53 20 15 8
*Seuls les étudiants résidants chez leurs parents sont pris en compte
(1) Domicile-travail (étude), accompagnements…
(2) Achats, santé, démarches administratives …

Source : EMD de Lyon 1994-1995

Les flux de déplacements dessinent des aires d’occupation de l’espace variables selon la position des individus dans le cycle de vie, leur localisation résidentielle, la localisation de leur activité principale et leurs possibilités d’accès au volant (Tableau 30). Les écoliers ont une mobilité fortement centrée sur leur zone de résidence (68 % des déplacements). En passant au collège et surtout au lycée la part des déplacements de proximité se réduit progressivement (respectivement 55 %, puis 31 % de leurs déplacements). La localisation résidentielle, en moyenne plus périphérique des scolaires, explique le poids important des déplacements réalisés en périphérie. Lorsqu’ils deviennent étudiants, compte tenu de la situation très centrale des établissements du supérieur, les navettes entre le centre et la périphérie (respectivement entre la périphérie et le centre) représentent un tiers des déplacements et la part des sorties effectuées dans les zones les plus denses de l’agglomération gagne de l’importance.

Les actifs réalisent autant de déplacements dans le centre qu’en périphérie, un peu moins d’un quart sont des navettes entre ces deux zones. Les femmes au foyer, comme leurs enfants en bas âge, sont nettement plus ancrées à leur zone de résidence : 64 % de leurs déplacements sont effectués à proximité directe de leur domicile. Soulignons également qu’elles investissent très peu le centre de l’agglomération. Les individus à la recherche d’un emploi ont des flux de déplacements qui se répartissent de manière équilibrée entre le centre et la périphérie ; néanmoins, comme pour les autres inactifs, la part des déplacements de proximité est importante (41 %). Avec le passage à la retraite, la mobilité se recentre sur le domicile et ce mouvement s’accélère avec le vieillissement. Après 75 ans, les retraités sont majoritairement localisés dans le centre de l’agglomération qui enregistre une part significative des déplacements (62 %).

Tableau 30 : Répartition spatiale des déplacements quotidiens selon le cycle de vie
Position dans le cycle de vie Déplacements réalisés
dans le centre
Déplacements réalisés
en périphérie
Navettes(1) Déplacements à proximité du domicile
Ecolier de 6-10 ans 34 60 6 68
Collégien de 11-14 ans 36 52 12 55
Lycéen de 15-20 ans 36 39 25 31
Etudiant de 18-25 ans* 47 20 33 12
Actif à plein temps de 25-59 ans 40 37 23 27
Chômeur de 25-55 ans 46 38 16 41
Femme au foyer de 25-59 ans 28 62 10 64
Retraité de 60-74 ans 44 41 15 44
Retraité de 75 ans et plus 62 28 10 53
Moyenne sur l’ensemble de la population 41 40 19 37
*Seuls les étudiants résidants chez leurs parents sont pris en compte
(1) Déplacements entre le centre et la périphérie et entre la périphérie et le centre

Source : EMD de Lyon 1994-1995

Derrière la mobilité quotidienne se cache des modes de vie, des habitudes et des besoins qui varient selon l’âge, l’activité et les charges de famille, c’est pourquoi il apparaît indispensable de spécifier la position de l’individu dans le cycle de vie pour donner une intelligibilité aux dispersions observées au niveau global. En effet, à chaque période du cycle de vie correspondent des programmes d’activités tout à fait contrastés qui s’organisent, dans le temps et dans l’espace de manière plus ou moins flexible, le plus souvent autour d’une activité principale. Préciser la position de l’individu dans le cycle de vie, préalablement à toute analyse des déplacements quotidiens, semble donc incontournable.