2.2.3.1. Une inactivité lourde de contraintes

Les femmes au foyer se déplacent plus souvent que les actifs (+17 %) et les chômeurs, ce sont les plus mobiles de notre échantillon (Tableau 48). Cependant, en dépit d’une localisation résidentielle plus périphérique (67 % résident en périphérie contre 55 % des actifs et 49 % des chômeurs), elles parcourent quotidiennement moins de kilomètres que ces deux groupes. Le plus souvent elles utilisent la voiture particulière mais les déplacements à pied sont fréquents. En revanche, les transports en commun, mal adaptés aux impératifs de la mobilité « domestique », sont très peu utilisés.

L’emploi du temps des femmes au foyer s’organise principalement autour de deux types d’activités : celles liées à la vie quotidienne du ménage (approvisionnement, santé, démarches administratives…) et celles liées aux accompagnements des enfants (respectivement 50 % et 26 % des déplacements). Bien qu’elles disposent de davantage de temps libre, les femmes au foyer ne réalisent pas plus d’activités de visites et de loisirs que la moyenne de la population. Leur mobilité, généralement soumise au rythme scolaire des enfants, est une mobilité de proximité (près des deux tiers des déplacements). Ainsi, bien que n’exerçant pas d’activité professionnelle, les femmes au foyer supportent pourtant de fortes contraintes spatiales et temporelles.

Tableau 48 : Niveaux et comportements de mobilité des femmes au foyer

Source : EMD de Lyon 1994-1995

Moins de la moitié des femmes au foyer (46 %) disposent de manière autonome et régulière d’une voiture, rappelons qu’il s’agit du taux d’accès le plus faible en milieu de cycle de vie 1 . En effet, lorsque le ménage est mono-motorisé les femmes au foyer ne sont pas prioritaires dans l’accès au volant et, avec un seul salaire, il semble plus difficile de couvrir les frais liés à l’utilisation d’une 2ème voiture. Les différences, très significatives, observées entre accédantes et non-accédantes ne se limitent pas à des distances parcourues supérieures pour les premières, elles concernent tous les indicateurs de niveaux (Tableau 48). Les accédantes se déplacent 1,7 fois plus souvent, parcourent 3,2 fois plus de kilomètres et y consacrent 1,5 fois plus de temps. Elles réalisent plus des trois quarts de leurs déplacements au volant d’une voiture tandis que les non-accédantes se déplacent principalement à pied. Exprimée en nombre de déplacements quotidiens, la mobilité des femmes au foyer ayant la possibilité de conduire régulièrement est de loin la plus élevée de la population (+26 % et +22 % respectivement par rapport aux actifs et aux chômeurs accédant au volant).

La possibilité effective de conduire régulièrement une voiture est aussi une source de contraintes supplémentaires dans l’emploi du temps des femmes au foyer : les accédantes au volant réalisent ainsi deux fois plus d’accompagnements. Elles n’ont pourtant pas plus d’enfants à charge (respectivement 2,3 contre 2,5) et leurs enfants ne sont pas plus jeunes. Leurs lieux de résidence en moyenne plus excentrés justifient également l’importance de ces accompagnements en voiture. Parallèlement on constate que les loisirs extérieurs au domicile sont 2,6 fois plus fréquents chez les accédantes. Les déplacements liés aux achats, à la santé ou aux démarches diminuent en part relative. Ces sorties paraissent toutefois relativement incompressibles puisqu’elles restent assez proches en valeur absolue. Les visites sont indépendantes des possibilités d’accès au volant. Ainsi l’accès au volant, s’il contribue à renforcer la place des accompagnements, réduit les tensions pesant sur les budgets-temps et permet une meilleure rentabilisation des déplacements ce qui laisse plus de temps pour les activités personnelles, qu’il s’agisse d’activités sportives, culturelles ou associatives.

Qu’elles aient ou non-accès à une voiture particulière, la mobilité des femmes au foyer dépend ensuite, mais de manière secondaire, de leurs charges de famille. A niveau de motorisation identique, plus les enfants sont nombreux dans le ménage, plus la fréquence des déplacements augmente et plus les activités deviennent contraintes. La mobilité des femmes au foyer dépend enfin de leur localisation résidentielle. Comme pour l’ensemble de la population, une localisation en centre-ville se traduit par plus de déplacements quotidiens pour moins de distances parcourues. Cependant, dès lors que l’on s’affranchit des effets liés à l’accès à une voiture particulière et à la présence d’enfants, les niveaux de mobilité des femmes au foyer sont assez peu sensibles à leur éloignement du centre de l’agglomération.

Notes
1.

Pour ce groupe socio-démographique aux revenus modestes (41 % font partie d’un ménage appartenant au 1er quintile), les inégalités d’accès au volant sont très importantes et du même ordre que les inégalités de revenu (c f. Chapitre 3).