2.3.1. Des inégalités accentuées parmi les anciennes générations

La motorisation s’est progressivement diffusée des plus aisés vers les plus modestes, puis des hommes vers les femmes. Les inégalités économiques d’accès à la mobilité motorisée sont ainsi nettement plus prononcées parmi les générations les plus anciennes. Cela tient pour l’essentiel au retard accumulé par les femmes. Leur moindre participation à la vie professionnelle et les rôles sociaux fortement sexués au sein de ces générations, rendent les femmes moins autonomes que les hommes dans leur accès à la mobilité motorisée.

Parmi les générations les plus anciennes, le revenu ne discrimine pas l’accès au permis de conduire des hommes, en revanche chez les femmes, seules les plus aisées en ont prioritairement bénéficié. Les inégalités concernant l’accès au permis de conduire conditionnent par la suite les inégalités d’équipement et de motorisation du ménage. C’est parmi les individus âgés, en particulier ceux qui vivent seuls et qui sont majoritairement des femmes, que les inégalités d’équipement en automobiles sont les plus prononcées. La dynamique générationnelle a permis de réduire fortement ces inégalités, toutefois elle semble aujourd’hui se ralentir. On observe en effet une diminution du taux d’accession à la motorisation des ménages les plus jeunes [Chauvel, 1998 ; Gallez et al., 1997]. Cette diminution bien réelle serait même pour partie compensée par une plus grande solidarité inter-générationnelle (prêt ou don de véhicule, aide à l’achat… ) [Augello et Feiltler, 1999]. Ce fléchissement de la dynamique générationnelle mériterait d’être confirmé à partir de données plus récentes.

Compte tenu des différentiels importants observés en matière d’accès à la mobilité motorisée, les inégalités de pratiques sont globalement plus prononcées parmi les retraités quel que soit le segment de la mobilité considéré. Le changement de mode de vie aux âges élevés, caractérisé par le passage au second plan des déplacements fortement contraints, fait apparaît des schémas de mobilité quotidiens distincts selon les revenus. Les plus aisés se déplacent plus souvent, notamment du fait de l’importance qu’occupent les activités de loisirs dans leur emploi du temps. Ils témoignent d’une bonne maîtrise du champ spatial, alors que les plus modestes se déplacent le plus souvent à proximité de leur domicile.

De même, parmi les anciennes générations, les pratiques de longue distance sont très fortement corrélées au revenu. Elles opposent les retraités aisés, en couples et motorisés, adeptes de loisirs et de vacances parmi lesquels les possesseurs de résidences secondaires ne sont pas rares, aux retraités modestes, seuls et non motorisés subissant quelques fois un isolement relationnel sévère. A l’inverse, c’est parmi les jeunes générations d’adultes célibataires ou en couples, que l’influence du revenu sur la fréquence des voyages est la plus réduite. Toutefois, au sein de ces jeunes générations, les écarts se creusent concernant l’accès aux destinations les plus lointaines.