2.3.2. Variation intra-individuelle de l’analyse de l’information phonique

Au cours des analyses individuelles, nous avons procédé à des analyses détaillées des erreurs produites lors des épreuves de manipulation épiphonémique et métaphonémique puis nous avons conclu en proposant des hypothèses explicatives. Les principales sources de dysfonctionnement pour lesquelles nous avons émis des hypothèses sont :

  • Difficulté à se désengager de procédures d’analyse plus familières (épellation, analyse en rimes et en syllabes,…)
  • Non compréhension de la consigne
  • Difficulté à activer ou à récupérer la représentation du phonème, ou encore à le produire de façon isolée
  • Défaut d’attention, de contrôle, de mémoire de travail

Nous avons également cherché à établir une comparaison entre la fréquence où chaque sujet semble en capacité d’utiliser les unités phoniques lorsqu’il lit ou écrit un pseudo-mot et la fréquence où il peut utiliser ces mêmes unités dans des tâches de manipulation épiphonémique et métaphonémique. Les calculs des coefficients de corrélation ont montré peu de liens entre les différentes épreuves. L’épreuve de suppression du phonème initial du mot est corrélée aux épreuves de traitement de l’Ecrit (hors identification de mots fréquents). Deux autres corrélations, toutefois moins significatives, sont apparues : épreuve d’appariement et identification de pseudo-mots, d’une part et épreuve de fusion et identification de mots rares, d’autre part. Il était, par conséquent, évident que les analyses individuelles allaient montrer le plus souvent des profils inégaux entre identification de pseudo-mots et production écrite de pseudo-mots, d’un côté et épreuves de manipulation épiphonémique et métaphonémique, de l’autre. Restait à déterminer de quelle manière s’orchestraient ces inégalités. Les deux tableaux suivants permettent de constater dans quelles proportions les sujets du groupe « illettrismes » sont plus performants dans chacune des épreuves de traitements de l’Ecrit et dans quelles proportions ils sont plus performants dans chacune des épreuves de manipulation épiphonémique et métaphonémique.

Tableau 34: Répartition en pourcentage des sujets du groupe « illettrismes » en fonction des profils obtenus en identification de pseudo-mots et aux différentes épreuves de manipulation épiphonémique et métaphonémique
  Profil supérieur aux épreuves de manipulation épiphonémique et métaphonémique Profils équivalents Profil inférieur aux épreuves de manipulation épiphonémique et métaphonémique
Appariement 23,5% 29,4% 47,1%
Segmentation 0% 11,8% 88,2%
Suppression 5,9% 41,2% 52,9%
Fusion 29,4% 47,1% 23,5%
Tableau 35: Répartition en pourcentage des sujets du groupe « illettrismes » en fonction des profils obtenus en production écrite de pseudo-mots et aux différentes épreuves de manipulation épiphonémique et métaphonémique
  Profil supérieur aux épreuves de manipulation épiphonémique et métaphonémique Profils équivalents Profil inférieur aux épreuves de manipulation épiphonémique et métaphonémique
Appariement 23,5% 23,5% 53%
Segmentation 0% 11,8% 88,2%
Suppression 5,9% 29,4% 64,7%
Fusion 23,5% 29,4% 47,1%

Tous profils confondus, les sujets obtiennent le plus majoritairement des performances supérieures dans le traitement des pseudo-mots que dans les différentes épreuves de manipulation épiphonémique et métaphonémique, hormis la comparaison entre l’épreuve de fusion phonémique et celle d’identification des pseudo-mots où les profils sont le plus souvent équivalents. Comme nous nous y attendions, la comparaison de ces différentes performances marque leur hétérogénéité. Prenons, par exemple, en considération les résultats que les sujets obtiennent pour l’épreuve de segmentation phonémique et l’épreuve de production écrite. Ceux-ci laissent supposer un fort décalage entre l’analyse en unités phonèmes/phonogrammes que les sujets sont en mesure de mettre en place lorsqu’ils écrivent des pseudo-mots et celle qu’ils ne parviennent pas à résoudre lorsque l’analyse ne porte que sur les mots oraux.