2.1.2. Epreuve de fusion de phonèmes

Même si cela demeure une tendance, c’est à l’épreuve de fusion de phonèmes que les sujets obtiennent les performances les plus élevées avec une moyenne de 5,18 (+/-2,53) items justes, ce qui peut sembler surprenant au regard du classement des tâches proposé dans la littérature sur le développement (Aro et al., 1999 ; Yopp & Yopp, 2000). Comment expliquer ce phénomène ?

Tout d’abord, l’épreuve de notre protocole contient des items dont le nombre de phonèmes à assembler est réduit. Il est possible que cela ait eu un effet facilitateur pour les sujets, ce qui peut constituer un point limitatif de notre protocole. En effet, nous avons volontairement limité le nombre de phonèmes à assembler à deux ou trois par item, afin que les performances ne soient pas désavantagées par la faiblesse éventuelle de la mémoire de travail des sujets du groupe « illettrismes ».

Ensuite, dans les trois autres épreuves, l’identification et l’extraction des phonèmes (épreuves de suppression et de segmentation) reposent sur le fait que le sujet entend des mots globaux, avec des phonèmes co-articulés. L’épreuve de fusion est la seule épreuve métaphonémique qui met à disposition les phonèmes à manipuler. Certes, elle exige de percevoir et de discriminer ces unités abstraites, alors prononcées de façon isolée et par conséquent inhabituelle dans le langage oral. Elle demande également la capacité de combiner ces phonèmes. Cependant, la théorie du déficit phonologique avance que celui-ci se situerait au niveau de la représentation, du stockage ou de la récupération des phonèmes (Ramus, 2002 ; Ramus et al., 2003). On peut alors supposer que les sujets se partagent au moins en deux groupes. L’activation des représentations contenues dans le processeur phonologique, grâce à l’oralisation d’un phonème et non pas d’un mot, favoriserait les sujets dont le déficit se situe au niveau de la récupération des phonèmes. Les sujets dont la difficulté touche à la qualité même de la représentation ou de son stockage ne bénéficieraient pas de cette situation.