IV. Sémiotique du cadre

Le modèle sémiotique que nous proposons ci-dessous est une synthèse de lectures qui seront commentées en note et le fruit d’observations auprès des œuvres. C’est une construction et une proposition élaborée en vue des chapitres qui suivent. Pour une plus grande clarté, nous nous limiterons ici à une description de l’encadrement empirique du tableau, l’objet-cadre. Les fonctions du cadre se combinent en une synthèse que l’on va déplier pour examen, tout en rappelant que le processus n’est pas linéaire mais simultané et qu’une fonction peut se fondre avec les autres. Ces fonctions s’effectuent dans une interaction qu’il aurait été intéressant de représenter par des liens en hypertexte mais que nous décrirons, cependant, de façon discontinue pour permettre une lecture orthodoxe.

La beauté du cadre provient de la surdétermination de ses fonctions et de la fluidité du passage de l’une à l’autre. Il faut imaginer le cadre sous son aspect plastique fixe comme dans un état de turbulence et de contradiction interne. Car si l’on devait nommer une fonction au-dessus des autres, ce serait celle-ci : le cadre doit s’afficher et s’effacer, se signaler et s’annuler. C’est un signal binaire (présence, absence). Cette oscillation est certes modulée par la discrétion ou l’éclat relatif du cadre, mais il est surtout du ressort de l’action subjective d’attention de la part du spectateur.

En répertoriant les fonctions du cadre, nous constatons deux mouvements complémentaires : d’un côté, des actions qui mettent le tableau à l’abri, qui le cachent et le conservent, et, de l’autre, des actions bien plus nombreuses qui mettent le tableau en scène, qui l’exhibent et l’exposent. Il existe aussi des fonctions entre les deux ou qui ne relèvent pas clairement de l’un ni de l’autre. Nous présenterons à la suite les actions de retenue (de 1 à 3), celles de l’entre-deux et celles de l’exposition (de 10 à 20).