1.3.5.1. Intériorité/extériorité.

Les personnalités que nous étudions souffrent classiquement, comme nous le vérifierons par la clinique, de troubles de l'intériorité. La défaillance porte sur l'investissement de l'espace psychique. Tout se passe comme si la référence topique était inappropriée pour ces sujets, comme si le concept d'appareil psychique était inopérant. "La fiction (visant à) rendre compréhensible les complications du fonctionnement psychique en divisant ce fonctionnement et en attribuant chaque fonction particulière à une partie constitutive de l'appareil" (S. Freud, 1900), "l'ordre" nécessaire pour le traitement des excitations semble ne plus avoir cours dans ces situations.

Dans l'élaboration de ses deux topiques, S. Freud insiste sur la différence interne des systèmes ou instances psychiques, tant par nature que par fonction, afin que l'excitation reçue soit transformable et assimilable. Si, dans la première topique de 1900, les systèmes sont nettement séparés entre eux, en revanche les instances de la deuxième (1920) montrent des frontières plus approximatives; celles du moi et du ça se confondent, tandis que le surmoi ancre ses racines dans le ça. En regard de la proposition de 1900, le préconscient défaille dans les problématiques états-limites qui montrent des "débordements, des empiétements entre les systèmes qui témoignent de la porosité des frontières internes et externes". (C. Chabert); il assure mal sa nécessaire fonction de contenance des excitations et peine à la transformation des représentations de choses en représentations de mots.

Toujours pour les fonctionnements limites, dans la deuxième topique le conflit psychique est considéré comme inhibé puis extériorisé.

Ainsi, la spatialisation freudienne est définie par la succession temporelle ou l'emboîtement informel de lieux psychiques différenciés. Cependant, si elles sont efficientes dans le cas des structurations névrotiques, ces catégories ne sont pas suffisantes pour identifier et traiter le conflit inter-instantiel chez les états-limites. Nous rencontrons ainsi, à la suite de J. B. Pontalis (1977) le paradoxe qui exige la constitution précoce d'un espace psychique primitif pour que la pleine séparation des lieux internes soit réalisée. Si ce n'est pas le cas, le néant emplit ce creux vacant en attente de comblement, tandis que la réalité externe fait office d'obturation du conflit interne.