1.3.1. Sujet n° 1. Monsieur B : L’espace

Dans cet entretien, l’espace public condense la problématique du sujet autour du lien impossible. L’errance physique s’origine dans les abandons par les objets successivement investis dans sa vie. Cette proposition s’étaie sur le registre spatio-temporel au moment de la double révélation quasi simultanée du décès des parents adoptifs. L’impressionnante précision de l’itinéraire macabre de la recherche du père précède l’énoncé de la culpabilité de n’avoir pas su reconnaître ni empêcher le dessein suicidaire de ce dernier.

En d’autres termes, l’espace répétitivement dérobé à Monsieur B est celui de l’intimité et de la pérennité du lien inter-subjectif, voire intra-psychique. Pour répondre à ces empiètements par l’absence, il ne semble avoir d’autre issue que celle de l’illusion d’un retour à l’origine, évidemment barré. Rappelons que celle-ci est localisée sous un porche, berceau du nourrisson, voussure architecturale des corps du sujet et de son environnement emmêlés, seulement représentés par un espace topologique qui pourtant condense l’imaginaire autour de l’église, lieu mythique des abandons et des protections.

Le corps est identifié à travers les blessures commises par des tiers: l’armée et ses dommages anéantit les dents, l’agresseur paralyse momentanément les jambes, faisant naître «une boule» qui s’enkyste au creux du dos. La trahison de son épouse, enfin, le fait plonger dans l’oubli, l’isolement alcoolique et la dépendance jusqu’à la mendicité.

Dans ce cas encore, Monsieur B traite du lien scélérat qui le conduit ou l’entretient dans l’espace public, la «déchéance» et l’errance.

L’exposé de la vie de cet homme met en évidence les stratifications enchevêtrées entre espace, corps et liens, l’un appelant les autres en écho. Il faut cependant conclure ce chapitre en orientant l’analyse sur l’hypothèse qu’en ce qui concerne Monsieur B, c’est bien l’axe de l’espace qui donne sens aux deux autres, parce qu’il est le plus précocement investi dans le roman des origines, porté par le lien familial, parce qu’aussi, il est itérativement convoqué dans les moments importants de sa vie (l’armée, le suicide du père, la chute).