1.3.8. Sujet n° 8. Monsieur C. Les liens .

Monsieur C débute l’entretien en formulant son désir de rendre service, tout en montrant paradoxalement, sur le plan non-verbal, une forme de déplaisir à être là.

Il relate sa vie, somme toute ordinaire, sur un mode qui exige une attention soutenue, à travers le style de communication qu’il met en place. Cependant, tout se brouille de manière systématique dans l’énonciation particulière de la dimension affective de son histoire.

Tout se passe comme s’il fallait défricher, au-delà du contenu patent du discours, un « mal-dit », un malentendu avec l’autre, qui auraient déterminé son parcours. Vraisemblablement, la thématique des liens est essentielle dans la situation, en ce qu’elle prévaut sur l’appropriation de l’espace et du corps par le sujet. Monsieur C montre en effet combien ses déplacements ont été pré-déterminés par l’objet, en dépit de ses tentatives ultérieures pour reprendre la main, redevenir acteur.

De la même façon, les problèmes attenants au corps, les maladies et lésions sont toujours associés à autrui, même s’il y intervient naïvement à une place de surhomme.

Il semble opportun de noter les rodomontades paradoxales qui émaillent la narration des événements subis sans qu’il n’en ait aucune maîtrise. Un événement saillant de cet entretien concerne la façon dont le sujet parle des liens tissés dans son enfance, davantage en négatif, en sourdine, que dans une authentique parole. Nous pensons spécialement à ses variations d’accent, devenant clairement méridional lorsqu’il évoque des souvenirs personnels et familiaux. Nous considérons la narration de la blessure de la langue comme relevant de ce même procédé, qui condense l’organe de la phonation, la chose, en même temps que l’accent, la représentation de la filiation maternelle et culturelle, tous abîmés dans leur lien. Monsieur C utilise la voix dans cette même logique: stentor, elle fanfaronne sur ses exploits virils; étouffée, elle témoigne de son impuissance infantile et de l’abandon subis de la part de ce qui est « sacré ». C’est pourquoi toute l’organisation psychique de cet homme semble résulter de la maladie de ce lien itérativement rompu par les siens. C’est aussi la raison pour laquelle, une fois dévoilée, cette paradoxalité fait retour en laissant le sujet démuni et désespéré de l’échec de ses illusions.