2.4.4. L’objet miroir du sujet ?

Ce dernier chapitre concerne ce qui a pu se dessiner en nous d’une contre-attitude qui nous appartient en propre, ou à tout le moins éprouvée comme telle.

Il apparaît des vécus que l’on peut regrouper surtout sous les registres d’instabilité et/ou de violence ; la confusion analogique à la honte ne semble nette qu’à la réaction face au sujet n°2, lorsqu’il est question d’abjection; encore que même dans ce cas, l’abjection liée à l’avilissement, donc à l’idée de mépris, peut s’entendre comme une forme de violence. Cette récurrence des deux derniers chapitres insiste ainsi sur le désespoir mais aussi l’effraction, l’empiètement, amenés dans l’objet par des motions traitées dans l’intersubjectivité. On pourrait suggérer qu’il s’agit de contenir dans notre propre psychisme, ce qui, cette fois sans venir formellement du sujet, en émane dans l’indétermination d’une impression, d’un affect brut.

Pour préciser notre pensée, il faut noter en correspondance à l’idée d’instabilité /labilité, plusieurs traces perceptives approximativement définies par les termes de «compassion», «catastrophe», «ambivalence», «empathie» et «désespérance». Celles-ci se présentent comme répondant à la notion de commisération, donc de communauté de désespoir et d’effondrement. Il nous vient à ce propos en mémoire quelques émotions éprouvées au cours de la recherche et à distance des rencontres, dans lesquelles la pitié envahissait notre esprit au point de ne plus nous sentir capable d’aucune cohérence ni projet. Dans le même mouvement que les sujets, nous étions contaminée par l’instabilité psychique et le renoncement, en ce qui touchait à notre travail les concernant. Cependant cette pitié même était en soi inacceptable car incompatible avec une position clinicienne, et redoublait la paradoxalité en tension dans la situation.

Sur le plan de la violence, il faut comprendre qu’après ce mouvement de compassion, est alors survenue la haine de ces ressentis, inconciliables avec la représentation classique de notre place; elle s’est donc très vite, par économie psychique, renversée à son tour sur la haine de ceux qui l’avaient suscitée. C’est ainsi que se sont manifestés l’agacement, l’ennui à leur égard, ou l’effroi devant la transgression qu’ils avaient provoquée; à un autre niveau, la terreur ou l’horreur se sont propagées en nous lorsque les sujets montraient ou développaient à l’envi ces mêmes motions restées informulées. Au fond, il pourrait exister une circularité entre instabilité et violence qui se sont succédées dans notre subjectivité, au-delà même de ce que les sujets ont réellement mis en acte.