3.2. Hypothèse spécifique principale.

Cette hypothèse va reprendre sous un angle plus général les éléments déjà observés, en particulier à propos de l’indéterminé et de la proto-topique. Il s’agira de les identifier dans un contexte décentré et de considérer leur effet d’interface dedans/dehors.

3.2.1. L’errance comme issue.

On peut émettre l’idée que le sujet a constitué son espace en réaction à une série d’empiétements de la réalité; si c’est le cas, l’errance prendrait valeur de défense par l’extériorité. Car l’insupportable se trouvant désormais incorporé, le sujet peut garder foi en un extérieur vierge de telles déchirures.

Nous avons essayé d’explorer la construction de la proto-topique, en tant que modalité d’attente de la reprise du processus d’élaboration interne. Intermédiaire temporel rabattu sur l’espace, l’errance porte en elle une espérance d’un corps rétabli, d’un espace approprié et de liens bonifiés, l’espérance d’une réaffiliation complète. Elle doit donc être comprise comme une illusion, parfois comme une fiction, de temps en temps comme un délire cicatriciels, qui essaient de manière itérative de trouver une voie de secours. C’est pourquoi nous entendons l’errance comme un authentique objet social, nécessaire à la survie de certains, enclos dans une relation désorganisée à l’objet. Création d’un rythme différent que le sujet voudrait considérer comme sien, le «choix» erratique frôle sans cesse la compulsion de répétition, sans pour autant toujours s’y absorber. Car le sujet innove souvent, malgré les «lignes d’erres» qu’il trace, inévitablement. Imprévisible, il l’est par ses parcours ou ses étapes, ses rejets ou ses attentes de l’autre, les soins qu’il se donne ou l’incurie qu’il manifeste. Longtemps, ces chemins sont visibles pour le tiers, il n’est que les désespérés pour se perdre et disparaître pour de bon.

C’est pourquoi les lieux d’errance ne peuvent être que périphériques au sujet, en ce sens qu’ils doivent rencontrer des témoins, possibles compensateurs des blessures précoces. L’errance psychique remet au travail- en actes plus qu’en scène- sur l’espace public actuel, la trame incertaine de l’histoire privée d’autrefois.