A. La construction d’un modèle théorique d’analyse du pouvoir dans l’État : le triptyque souveraineté/puissance d’État/puissance territoriale

Le diptyque souveraineté/puissance d’État a été précisé par R. CARRÉ DE MALBERG, dans le cadre de ses développements relatifs à la recherche du critère distinctif de l’État. Le maître de Strasbourg, après avoir proposé une définition duale de la souveraineté 80 , en retient finalement une conception négative : celle-ci n’est qu’une garantie d’indépendance, la certitude que l’État ne se verra pas imposer de sujétions qu’il n’accepterait préalablement 81 . Il en déduit alors qu’elle ne peut pas en être la caractéristique essentielle 82 . Si elle était l’élément clé de définition de l’État, il deviendrait en effet impossible d’expliquer la formation des États fédéraux 83 , puisque si tel était le cas, la souveraineté des États fédérés ne s’exprimerait pas pleinement. On devrait alors en déduire soit qu’ils ne constituent pas des États, soit envisager une redéfinition de la souveraineté. Dès lors que celle-ci ne peut plus être le critère de l’État, Raymond CARRÉ DE MALBERG, s’inspirant de la notion allemande d’Herrschaft, propose de la compléter avec la notion de puissance d’État.

R. CARRÉ DE MALBERG définit la puissance d’État comme le « pouvoir de commander d’une façon absolue et avec une puissance de coercition irrésistible. […] La marque distinctive et la condition de l’État, c’est [ainsi] l’existence d’une puissance originaire de domination » 84 . L’originarité de la puissance d’État réside, selon le maître de Strasbourg, dans la capacité qu’a celui-ci de se doter de son propre statut, sous la forme d’une Constitution 85 . Elle se résume donc à l’autonomie constitutionnelle, incarnée dans la puissance d’État. La définition dégagée par CARRÉ DE MALBERG 86 est finalement assez proche de l’acception première de la Herrschaft. Il est en effet possible de traduire ce terme par celui de « domination » « en raison de l’identité des racines (Herr) maître, Dominus » 87 . « Le concept de domination (ou de Herrschaft) tend [alors] à délimiter, à l’intérieur du vaste champ des relations de puissance, […], un domaine plus étroit dans lequel celui dont la volonté s’impose recourt au commandement et s’attend à l’obéissance. Le dominant n’est pas n’importe quel puissant. Il faut que la relation de puissance se stabilise pour que le sujet de cette relation ordonne à ceux qui en sont l’objet. […] On va [ainsi] de la puissance – concept formalisé et abstrait – au Pouvoir (dans le sens que ce mot revêt quand on oppose les gouvernés au Pouvoir) par les diverses étapes de la stabilisation, de l’institutionnalisation, de la légitimation, de la concentration, de la domination » 88 . On retrouve donc à l’œuvre le processus de différenciation du pouvoir mis en lumière par la doctrine publiciste dès le début du XXe siècle ; celui-ci se concrétise alors également dans la Constitution, confirmant la nodalité de cette notion et la proximité de la puissance d’État définie par CARRÉ DE MALBERG et de la Herrschaft issue de la doctrine allemande.

Certains auteurs ont toutefois fait valoir que la distinction souveraineté/puissance d’État n’était pas pleinement satisfaisante, notamment dans le cadre de l’État unitaire, car ces deux notions se confondraient 89 . On peut s’accorder avec eux sur le fait qu’il n’y a pas, dans le cadre de l’État unitaire et contrairement, sur ce point, aux États fédéraux, de différence ontologique entre souveraineté et puissance d’État. D’ailleurs, CARRÉ DE MALBERG lui-même, quelques pages après avoir différencié souveraineté et puissance d’État, donne une définition, tripartite cette fois, de la souveraineté, qui paraît confondre les deux notions. Il considère alors que « dans son sens originaire, [ce terme] désigne le caractère suprême d’une puissance pleinement indépendante, et en particulier de la puissance étatique. Dans une seconde acception, il désigne l’ensemble des pouvoirs compris dans la puissance d’État, et il est par suite synonyme de cette dernière. Enfin, il sert à caractériser la position qu’occupe dans l’État le titulaire suprême de la puissance de l’organe » 90 . Si, dans une perspective matérielle, la souveraineté et la puissance d’État se rejoignent, cela ne signifie pas qu’elles soient strictement identiques. On voit bien, au contraire, que la souveraineté est plus large que la puissance d’État, notamment si l’on adopte la perspective organique (selon la troisième acception développée par CARRÉ DE MALBERG). Aussi, cette distinction, construite selon une acception formelle du pouvoir, conserve-t-elle une valeur heuristique certaine, en ce qu’elle traduit la différence entre le pouvoir souverain agissant au niveau constitutionnel sans tempérament et la puissance d’État, qui ne peut s’exprimer que dans le cadre prévu par la Constitution 91 .

Cette distinction permet par ailleurs de bien distinguer les champs juridique et politique. Elle correspond en ce sens à l’opposition entre souveraineté de statut et souveraineté de gouvernement, développée par HAURIOU afin de les différencier. « La souveraineté du statut […] est [en effet] d’ordre juridique, c’est la souveraineté du droit établi, tandis que la souveraineté du gouvernement est d’ordre politique » 92 . Ce faisant, cette distinction tire les conséquences du développement de la doctrine constitutionnaliste, admettant que la Constitution, « c’est le statut de l’État, mais c’est en même temps et, avant tout, le statut de la corporation de la nation qui doit servir de barrière aux fantaisies du gouvernement, grâce à la toute-puissance du droit établi » 93 .  La nation ainsi comprise trouve alors dans le monopole de la souveraineté de statut un moyen de se maintenir au-dessus du gouvernement ; la délégation de la souveraineté ne vise qu’à permettre au gouvernement de mener des actions dans le cadre du régime constitutionnel. Celui-ci consiste alors en « la séparation de la souveraineté politique, laquelle crée le droit, et de la souveraineté juridique, laquelle, avec l’aide du juge, assujettit au droit créé, c’est-à-dire au droit positif, le pouvoir politique en même temps que les sujets » 94 . Le pouvoir du gouvernement n’est donc pas souverain stricto sensu puisque la puissance d’État, c’est le pouvoir souverain exprimé à travers la norme constitutionnelle 95 . Le pouvoir de l’État peut alors être présenté de façon plus précise : au niveau constitutionnel, il prend la forme du pouvoir souverain alors que dans l’ordre constitutionnel, il correspond à la puissance d’État.

Ce diptyque rend ainsi tangible la relativité du pouvoir d’État constitutionnalisé ; la Constitution apparaît en effet dans une double dimension positive (elle participe à l’organisation de l’expression du pouvoir dans l’État) et négative (elle limite la puissance d’État) 96 . Rien n’indique alors que la puissance d’État épuise la totalité du pouvoir dans l’État, la Constitution pouvant prévoir d’autres voies d’expression que les organes constitués étatiques (selon le schéma classique de la séparation horizontale des pouvoirs). Dans les États fédéraux, le pouvoir dans l’État est ainsi la somme de la puissance des différentes entités territoriales, organisées par la Constitution. Celle-ci prévoit donc d’autres modalités d’expression du pouvoir dans l’État que la seule puissance de l’État fédéral. L’organisation verticale des États, dont l’expression du pouvoir s’avère plurale, est alors classiquement qualifiée de décentralisation politique, en ce qu’elle implique un nécessaire partage du pouvoir (ou de la compétence) législative entre les deux niveaux étatiques.

Dans cette veine, il est en effet généralement admis l’identité entre nature politique d’un pouvoir et exercice de la compétence législative 97 , tous les autres pouvoirs étant alors renvoyés à la catégorie « pouvoir administratif ». L’amplitude de cette dernière catégorie suffit à elle seule, nous semble-t-il, à justifier une remise en cause de cette conception : on peut en effet s’interroger sur ce qu’il y a de commun entre le pouvoir du Premier ministre, celui d’une collectivité territoriale et/ou d’une autorité administrative indépendante ? Le terme administratif renvoie uniquement, à cette occasion, à un plus commun dénominateur : ces pouvoirs ne sont pas législatifs. Subsumer des autorités aussi différentes sous un critère aussi large est d’autant moins acceptable que l’identité postulée entre loi et pouvoir politique semble remise en cause par l’évolution contemporaine de l’organisation du pouvoir dans l’État. Que la loi ait pu, pendant une période, épuiser l’intégralité du pouvoir politique dans l’État, cela semble incontestable. L’ère du légicentrisme 98 , qui se traduit en termes d’organisation verticale du pouvoir dans la décentralisation administrative, en témoigne. L’émergence, puis l’affirmation de l’ère constitutionnaliste a toutefois remis en cause cette identité, substituant la Constitution à la loi. Le texte constitutionnel peut alors prévoir différents canaux (horizontaux, mais également verticaux) d’expression du pouvoir politique. Les fondements de l’organisation territoriale dans les États ont alors changé de valeur normative, passant de la loi à la Constitution sans que l’on en tire véritablement les conséquences quant à la distinction des différents types de décentralisation. L’approche classique présente ainsi de sérieuses limites, qui incitent à privilégier un nouvel angle d’analyse. Aussi, si l’on accepte le terme « politique » pour qualifier l’organisation de ces États, il semble parallèlement possible de justifier son usage, non plus par la seule traduction de l’organisation verticale du pouvoir en termes de compétence normative mais par la qualité (constitutionnelle) de ses fondements.

Envisager une qualification de l’organisation verticale du pouvoir reposant sur ses fondements permet en effet de dépasser les apories relevées, en articulant la réflexion à partir des notions clairement définissables de Constitution, de puissance et de pouvoir originaire et/ou secondaire. Si le pouvoir originaire est à l’origine du droit et donc de la Constitution 99 , dans l’ordre constitutionnel, cette qualité peut être reconnue à tout pouvoir qui tire directement sa source de la Constitution 100  ; il est une modalité constitutionnalisée d’expression du pouvoir souverain dans l’État. De son côté, le pouvoir secondaire est une simple capacité de mise en œuvre, dont les fondements ne sont pas constitutionnels, et soumis, de ce fait, à l’absoluité du pouvoir originaire. Seul celui-ci peut, alors, être qualifié de politique, tandis que le pouvoir secondaire ne le peut pas 101 . La puissance d’État incarne l’exemple typique du pouvoir originaire : le souverain transmet, à travers la norme constitutionnelle, sa puissance aux organes exprimant son pouvoir dans l’État. Cette qualité est de plus confirmée et renforcée par le renouvellement régulier de ces organes par le corps électoral, émanation première du souverain 102 , confirmant, à ces occasions, la délégation de sa puissance à ces organes 103 . Le pouvoir secondaire quant à lui a longtemps été incarné dans les collectivités territoriales, dont le pouvoir était défini par le législateur. Elles ne jouissaient alors d’aucune protection contre l’État, qui pouvait les aménager selon son « bon plaisir ». L’inscription constitutionnelle des collectivités territoriales paraît toutefois venir tempérer ce point puisque la puissance d’État est conditionnée par la Constitution. La constitutionnalisation des libertés territoriales relativise ainsi le pouvoir de l’État à l’égard des structures territoriales, en ce sens qu’elle leur reconnaît une réserve d’action. Nous l’appellerons, complétant en cela le diptyque malbergien, puissance territoriale. La constitutionnalisation de l’agencement vertical du pouvoir aboutit ainsi à une limitation des prérogatives de la puissance d’État, garantissant l’existence d’une expression territoriale du pouvoir. Le pouvoir dans l’État sera dès lors l’addition de la puissance d’État et de la puissance territoriale, toutes deux s’appuyant sur des fondements constitutionnels.

La coexistence de deux modalités d’expression du pouvoir dans l’État place alors la réflexion dans le cadre de l’« État non fédéral », c’est-à-dire d’« un État dont la Constitution n’a pas de clause explicite reconnaissant une forme fédérative ni de clause de répartition explicite des compétences législatives entre l’État (le gouvernement central) et les collectivités locales (les gouvernements locaux) » 104 . Le pouvoir dans l’État fédéral repose en effet et a contrario sur l’articulation entre les différentes puissances d’État, propres à l’entité fédérale et à ses composantes, puisque « le fédéralisme comporte traditionnellement une superposition d’ordres juridiques, à savoir ceux des États fédérés et celui de l’État fédéral » 105 , les deux niveaux de collectivités de la Fédération étant ainsi véritablement des États. L’« État non fédéral » ne comporte en revanche qu’un ordre juridique (fondé par la Constitution de l’État), qui a longtemps paru épuisé par la puissance d’État, seul pouvoir constitutionnalisé. Or, l’inscription constitutionnelle des collectivités infraétatiques conduit à admettre l’existence d’un pouvoir au profit des collectivités territoriales. Aussi, la puissance d’État se trouve-t-elle réduite, cantonnée en faveur d’une puissance territoriale, caractéristique du pouvoir des collectivités territoriales. Cette manière de voir invite à dépasser le traditionnel clivage entre les formes administrative et politique de la décentralisation, en proposant d’en repenser les fondements, pour lui substituer le diptyque décentralisation légale et décentralisation constitutionnelle. La distinction entre puissance d’État et puissance territoriale, version actualisée de la doctrine malbergienne 106 , constitue dès lors un modèle théorique utile pour étudier l’organisation verticale du pouvoir d’un « État non fédéral ». Dans ce cadre, nous privilégierons l’étude d’un État unitaire plutôt que régional, car ses caractéristiques, plus facilement définissables, fourniront des bases plus solides d’analyse.

Aussi recourrons-nous à cet outil d’analyse pour envisager la situation faite au pouvoir local en France. Le choix de ce pays se justifie par la constitutionnalisation récente des dispositions relatives à l’organisation verticale du pouvoir et par le caractère encore plus récent de leur prise en compte (dans leurs effets). La constitutionnalisation doit alors s’entendre non seulement comme synonyme de l’inscription constitutionnelle des dispositions relatives au pouvoir local, mais également comme rendant compte de la prise d’importance (quantitative et qualitative) de la jurisprudence constitutionnelle dans la vie juridique, qu’elle contribue à façonner 107 . Cette seconde acception illustre ainsi le déplacement du « centre de gravité de l’ordre juridique » 108 de la loi vers la Constitution, confirmant la nécessité de prolonger l’analyse malbergienne. L’inscription constitutionnelle des collectivités territoriales remonte ainsi à 1946, tandis que le développement d’un véritable droit constitutionnel local (la constitutionnalisation proprement dite au sens de FAVOREU) commence en 1979 109 , et plus certainement en 1982 110 . La césure apparaît ainsi assez nettement pour que l’on puisse distinguer la longue période pendant laquelle le pouvoir local n’a bénéficié que de fondements légaux de celle où il a été doté d’une base constitutionnelle. Cette configuration rend possible une double mise en perspective entre décentralisation administrative/politique et décentralisation légale/constitutionnelle dans le modèle comme dans la réalité, dont il devrait ressortir une compréhension plus fine du réel.

Notes
80.

« La souveraineté de l’État est habituellement présentée comme double : on la divise en souveraineté externe et interne. La première se manifeste dans les rapports internationaux des États. Elle implique pour l’État souverain l’exclusion de toute subordination, de toute dépendance vis-à-vis des États étrangers. […] Dans l’expression souveraineté externe, le mot souveraineté est donc au fond synonyme d’indépendance : il n’a ainsi qu’une portée toute négative. Au contraire, dans l’expression souveraineté interne, il semble prendre une signification positive. La souveraineté interne implique en effet que l’État possède, soit dans ses rapports avec les individus qui sont ses membres ou qui se trouvent sur son territoire, soit dans ses rapports avec tous autres groupements publics ou privés formés au-dedans de lui, une autorité suprême, en ce sens que sa volonté prédomine sur toutes les autres. […] L’une et l’autre se ramènent à cette notion unique d’un pouvoir qui n’en connaît aucun autre au dessus de lui », CARRÉ DE MALBERG (R.), Contribution…, t. I, op. cit., pp. 70-71.

81.

« La souveraineté, c’est le caractère suprême d’un pouvoir : suprême, en ce que ce pouvoir n’en admet aucun autre ni au-dessus de lui, ni en concurrence avec lui », ibid. « Le mot souveraineté n’exprime donc jamais qu’une idée négative : la souveraineté, c’est la négation de toute entrave ou subordination », ibid., p. 72. On peut, par ailleurs, rapprocher cette définition de celle que donne G. JELLINEK : « ce concept exprime la négation de toute subordination de l’État à l’égard d’un autre pouvoir, la négation de la limitation de l’État par un autre pouvoir », JELLINEK (G.), L’État moderne et son droit. Deuxième partie. Théorie juridique de l’État, Paris, Éditions Panthéon – Assas, « Les Introuvables », 2005 (1ère éd. 1913), p. 126.

82.

JELLINEK parvient, au terme d’une étude historique, et non pas essentiellement théorique comme celle du maître de Strasbourg, à une conclusion identique : la souveraineté n’est pas la marque essentielle de l’État. Ibid., pp. 142-147.

83.

Pour une démonstration contemporaine de l’incompatibilité entre souveraineté et fédération, v. BEAUD (O.), « Fédéralisme et souveraineté : Notes pour une théorie constitutionnelle de la Fédération », RDP, 1998, pp. 83-122.

84.

CARRÉ DE MALBERG (R.), Contribution..., t. I, op. cit., p. 158.

85.

On peut alors rapprocher la position de CARRÉ DE MALBERG de celle de JELLINEK, selon qui « le pouvoir étatique est un pouvoir de commander qui n’est pas dérivé d’une autre autorité ; c’est le pouvoir de commander à raison de son propre pouvoir et, par suite, d’après son propre droit », JELLINEK (G.), L’État moderne et son droit. Deuxième…, op. cit., pp. 147-148.

86.

Cette définition est plus large que l’acception normativiste développée par KELSEN qu’elle englobe. Selon KELSEN, « la puissance de l’État n’est [en effet] pas une force ou une instance mystique, qui serait dissimulée derrière l’État ou derrière son droit ; elle n’est rien d’autre que l’efficacité de l’ordre juridique étatique », KELSEN (H.), Théorie pure du droit, Paris, L.G.D.J. – Bruylant, « La pensée juridique », 1999 (Trad. C. EISENMANN), 1ère éd. 1962, p. 285.

87.

C’est d’ailleurs la traduction que retient Julien FREUND. V. WEBER (M.), Le savant et le politique, Paris, 10/18, 1959 (Introduction R. ARON), 185 p.

88.

ARON (R.), « Macht, Power, Puissance… », op. cit., p. 177. Le propre de la puissance politique est alors d’être une « puissance intégrale », ibid., p. 178.

89.

« Cette "puissance étatique" dont parlait la doctrine allemande s’avère, après examen, identique à la souveraineté, dont elle possède les mêmes caractéristiques (puissance de commandement unique, exclusive et irrésistible) », BEAUD (O.), La puissance de l’État, op. cit., p. 18.

90.

CARRÉ DE MALBERG (R.), Contribution…, op. cit., t. I, p. 79. Nous soulignons.

91.

En ce sens, et pour une application à la Ve République, v. BURDEAU (G.), « La conception du pouvoir selon la Constitution française du 4 octobre 1958 », RFSP, 1959, pp. 87-100.

92.

HAURIOU (M.), Principes de droit public à l’usage des étudiants en licence et en doctorat es sciences politiques, Paris, Sirey, 1916, 2e éd. (1ère éd. 1911), p. 625.

93.

Ibid. Nous soulignons. La souveraineté de statut doit ainsi « constituer une limite des pouvoirs gouvernementaux, parce que des règles juridiques peuvent limiter des pouvoirs politiques », ibid.

94.

Ibid., p. 39.

95.

Ceci explique les différences entre eux : le pouvoir souverain est absolu, en ce qu’il n’est tempéré par rien d’autre que ce qu’il accepte, alors que la puissance d’État ne s’exprime que selon les modalités prévues par la Constitution, elle ne peut donc qu’être relative.

96.

CARRÉ DE MALBERG (R.), Contribution…, op. cit., t. I, pp. 232-235.

97.

En cela, la doctrine se rattache une conception classique de « la souveraineté comme monopolisation du droit positif » exprimée à travers la loi. Sur ce point, v. la conclusion de la première partie de la thèse d’Olivier BEAUD, in La puissance de l’État, op. cit., pp. 197-198.

98.

Pour illustration, v. CARRÉ DE MALBERG (R.), La loi, expression de la volonté générale, Paris, Economica, 1984 (1ère éd. 1931), 228 p.

99.

« Le pouvoir originaire est le seul pouvoir dont on puisse dire qu’il ne tient pas sa juridicité de l’ordre juridique mais que, tout à l’opposé, ce que l’on appelle l’ordre juridique lui doit sa juridicité », HÉRAUD (G.), « La conception du pouvoir constituant dans l’œuvre de CARRÉ DE MALBERG », in Relations des Journées d’études en l’honneur de CARRÉ DE MALBERG. Annales de la Faculté de Droit et des sciences politiques et économiques de Strasbourg, Paris, Dalloz, 1966, p. 83. L’auteur souligne.

100.

Il faut alors différencier le pouvoir originaire, antérieur au droit et qui est à la source du droit, du pouvoir originaire constitutionnalisé, expression du pouvoir souverain dans l’ordre constitutionnel. Nous utiliserons l’expression pouvoir originaire sans différencier les deux sens ; l’assimilation se justifie par la volonté de mettre en avant l’identité de nature de ces pouvoirs, à travers leur rattachement à la norme constitutionnelle. Cette distinction ressort toutefois à travers le couple souveraineté/puissance d’État.

101.

Cela n’infère rien d’autre quant à sa nature véritable, car les fondements n’impliquent rien quant aux modalités de mise en œuvre. La grille d’analyse gagne en revanche en précision, si l’on réalise une étude combinée des fondements et des modalités de mise en œuvre ; ces dernières constituent alors des degrés au sein des catégories établies.

102.

Le corps électoral est alors conçu comme l’incarnation constitutionnalisée du souverain, exprimant le pouvoir de suffrage, ou « pouvoir électif », mis en évidence par Maurice HAURIOU, in « La souveraineté nationale », Recueil de législation de Toulouse, 1912, pp. 61-ss.

103.

« …L’élection des membres du Parlement par le peuple a, avant tout, pour objet et obtient pour résultat de procurer à l’État ses organes de décision et, par conséquent aussi, une organisation de puissance. En demandant à son peuple de travailler à la nomination des autorités par qui s’exerceront ses fonctions impératives, l’État convie précisément les citoyens à coopérer par leur action collective à l’érection ou l’entretien de sa propre puissance », CARRÉ DE MALBERG (R.), Contribution…, Avant-propos, p. XVII. Nous soulignons.

104.

Selon l’expression et la définition d’Hiroshi OTSU, in « "État de droit", contrôle juridictionnel de légalité et pouvoir normatif autonome local au Japon », RFDC, 2006, p. 15, en note.

105.

PACTET (P.), MÉLIN-SOUCRAMANIEN (F.), Institutions politiques Droit constitutionnel, Paris, Armand Colin, « U », 2005, 24e éd. (1ère éd. 1969), p. 46.

106.

La construction est directement tirée de l’œuvre du maître de Strasbourg, mais la notion de puissance territoriale, ainsi que l’utilisation qui en est faite, si elles sont d’inspiration malbergienne, ne figurent pas telles quelles dans les travaux de cet auteur. Sur la notion de puissance territoriale chez R. CARRÉ DE MALBERG, nous nous permettons de renvoyer à PROTIÈRE (G.), « La puissance territoriale chez Raymond CARRÉ DE MALBERG », VIe Congrès français de droit constitutionnel, 9-11 juin 2005, Montpellier, 11 p. V. www.droitconstitutionnel.org/congresmtp/textes6/PROTIERE.

107.

Le principe de libre administration des collectivités territoriales est une très bonne illustration de ce phénomène, comme le révèle la thèse de C. BACOYANNIS, Le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, Paris, Economica – P.U.A.M., 1993 (Préface de L. FAVOREU), 319 p.

108.

« Au XIXe siècle et au cours de la plus grande partie du XXe, l’ordre juridique a eu, comme axe essentiel, la loi et comme régulateur principal, la Constitution, tout s’ordonnant autour de ces deux pôles. Aujourd’hui, l’axe essentiel est la Constitution et le régulateur, le Conseil constitutionnel, et l’ensemble de l’ordre juridique se réorganise autour de ces deux pôles », FAVOREU (L.), « La constitutionnalisation du droit », in L’unité du droit. Mélanges en l’hommage de Roland DRAGO, Paris, Economica, 1996, p. 41.

109.

CC, déc. n° 79-104 DC, 23 mai 1979 (Loi modifiant les modes d’élections de l’Assemblée territoriale et du Conseil de gouvernement du territoire de la Nouvelle-Calédonie et dépendances et définissant les règles générales de l’aide technique et financière contractuelle de l’État), Rec. p. 27 ; Pouvoirs 1979(11).186, chron. AVRIL, GICQUEL ; RDP 1979.1695, chron. FAVOREU.

110.

CC, déc. n° 82-137 DC, 25 février 1982 (Droits et libertés des communes, des départements et des régions), Rec. p. 38 ; JORF, 3 mars 1982, p. 759 ; RDP 1982. 603, note FABRE et 1259, chron. FAVOREU ; RA 1982.352, note ÉTIEN ; AJDA 1982.303, note BOULOUIS.