Paragraphe 2. L’élection, critère de reconnaissance et d’expression du pouvoir local

« Les élections locales sont faites pour créer des municipalités ».

Charles de GAULLE cité in PEYREFITTE (A.), C’était de GAULLE, Paris, Gallimard, « Quarto », 2002 (1ère éd. 1997), p. 741.

La population est, nous venons de le voir, l’élément déterminant dans la conception française des collectivités territoriales, justifiant la présomption de naturalité reconnue en faveur du pouvoir local depuis 1789. La simple admission de ce caractère naturel de la population ne suffit toutefois pas à rendre compte de la prise en considération de l’originarité du pouvoir local, elle permet tout au plus de prendre connaissance de l’origine sociologique de ce pouvoir. C’est pourquoi il faut à présent en envisager les moyens d’expression. Ceux-ci s’incarnent dans le procédé électif, mis en œuvre dès 1789 313 . À l’origine, le recours à l’élection a pu surprendre et être source de contradictions ; nous verrons qu’il est l’expression du caractère communautaire des communes et découle donc logiquement de la conception des collectivités territoriales portée en 1789 (A.).

Latente à l’origine, la dimension démocratique se greffe sur la problématique de la décentralisation au cours du XIXe siècle. Dans cette perspective, les fonction et signification de l’élection changent. Si l’on y voit au départ un moyen de respecter la gestion privée des intérêts communaux, elle devient ensuite la marque de la décentralisation, l’élément discriminant le plus important. Symbole de la rupture de la relation hiérarchique entre l’État et les collectivités territoriales, la technique élective assure en effet que les organes locaux jouiront d’une véritable liberté dans l’exercice de leur compétence (B.).

Notes
313.

La personnalité morale, condition de l’accès des collectivités territoriales au commerce juridique, n’est pas considérée ici comme un moyen d’expression du pouvoir local. Si elle constitue la condition de l’existence des structures territoriales, elle n’est pas, ainsi que nous l’avons déjà mentionné, propre aux collectivités. Elle est de plus induite par les développements précédents ; la prise en compte de l’élément « population » dans la définition de la catégorie « collectivité territoriale » par l’État implique en effet la transformation des populations de fait en personne de droit. Aussi, ne retiendrons-nous que la caractéristique propre d’expression du pouvoir local, à savoir le procédé électif.