Paragraphe 2. La clause générale de compétence, principe fondamental reconnu par les lois de la République ?

L’idée selon laquelle la clause générale de compétence constituerait un principe fondamental reconnu par les lois de la République est assez répandue en doctrine. On trouve ainsi cette idée dans les travaux de Jean BÉNOIT 1226 , ainsi que, sous une forme un peu différente, dans une note de jurisprudence d’Yves WEBER 1227 , dont la position est prolongée par Marie-Christine ROUAULT 1228  ; elle figure également sous la plume de Christian AUTEXIER dans son article consacré à « l’ancrage constitutionnel des collectivités de la République » 1229 . Si Jean BÉNOIT se réfère explicitement à la clause générale de compétence, les trois autres auteurs aspirent à la consécration du principe de libre administration des collectivités territoriales, en tant que principe fondamental reconnu par les lois de la République. Y. WEBER estime ainsi que ce principe pourrait « relever des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (loi du 10 août 1871 pour les départements et loi du 5 avril 1884 pour les communes dans le bloc constitutionnel) » 1230 . La référence à la loi du 5 avril 1884 implique toutefois un renvoi implicite à son article 61, seul élément susceptible de soutenir une conception libérale de la décentralisation dans ce texte. Cet auteur établit bien dès lors un lien entre la qualification en tant que principe fondamental reconnu par les lois de la République et la vocation générale des collectivités territoriales, fondement de la liberté locale d’administration. On retrouve d’ailleurs une référence identique tant chez C. AUTEXIER 1231 que chez M.-C. ROUAULT 1232 . Ces auteurs ne développent toutefois pas vraiment leur démonstration 1233 et l’on peut voir dans leurs positions davantage une pétition de principe que le résultat d’une démarche démonstrative. De ce point de vue, il n’y a d’ailleurs qu’une certitude : le Conseil constitutionnel n’a jamais consacré explicitement la clause générale de compétence, à l’exception de la notion de « compétence propre ». Aussi ne l’a-t-il jamais qualifiée expressément de principe fondamental reconnu par les lois de la République. Cela n’empêche toutefois pas la réflexion doctrinale de s’avancer dans cette direction, afin de voir si la position du juge constitutionnel pourrait évoluer.

Afin de proposer une analyse structurée, il faut dans un premier temps déterminer quels sont les éléments constitutifs d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République (A.).

Ce faisceau d’indices servira alors à analyser la clause générale de compétence (B.).

Notes
1226.

BÉNOIT (J.), Théorie juridique de la décentralisation…, op. cit., p. 135.

1227.

WEBER (Y.), « Note sous CE, Sect., 7 octobre 1977, Commune de Tomblaine », AJDA, 1978, pp. 153-157.

1228.

ROUAULT (M.-C.), L’intérêt communal, op. cit., p. 150.

1229.

AUTEXIER (C.), « L’ancrage constitutionnel … », op. cit., pp. 581-620.

1230.

WEBER (Y.), « Note sous CE, Sect., 7 octobre 1977, Commune de Tomblaine », op. cit., p. 155.

1231.

AUTEXIER (C.), « L’ancrage constitutionnel… », op. cit., p. 615.

1232.

ROUAULT (M.-C.), L’intérêt communal, op. cit., p. 151.

1233.

Marie-Christine ROUAULT renvoie à l’importance « unanimement reconnue » de la loi du 5 avril 1884, au fait que la clause générale de compétence n’ait jamais été supprimée et au caractère fondamental de la liberté d’administration, sans, toutefois, étayer ces assertions par de véritables renvois à l’état du droit positif, ibid., p. 152.