Chapitre I. La puissance territoriale, véritable capacité d’être : la libre administration des collectivités territoriales est une liberté politique originaire

Les collectivités territoriales ont été inscrites dans la Constitution à titre de cadres de la démocratie politique. Leur pouvoir repose ainsi sur leur origine élective et la liberté qui leur est laissée de gérer leurs affaires, consacrant la prévalence de la dimension organique de la libre administration des collectivités territoriales. Celle-ci débouche alors sur la reconnaissance d’une véritable liberté institutionnelle au profit des collectivités territoriales. Conformément aux conclusions précédentes, l’appréhension organique de la puissance territoriale confirme qu’en tant que canal d’expression de la démocratie, elle est une liberté politique, participant de l’expression du pouvoir dans l’État. Cette intégration des cadres territoriaux à la démocratie étatique se traduit de deux façons, à la fois par l’extension des principes de la démocratie politique à l’échelon territorial et par le rapprochement de la structuration des puissances d’État et territoriale.

Si la libre administration des collectivités territoriales repose sur l’élection des organes locaux par la population locale, il est de tradition républicaine que la démocratie locale soit régie par les mécanismes du système représentatif 1348 . L’intégration des structures territoriales à la démocratie politique a ainsi conduit à accepter et progressivement organiser l’expression du pluralisme politique en leur sein, rapprochant leurs règles de fonctionnement de celles des assemblées parlementaires. L’ensemble des assemblées politiques connaît progressivement l’application de principes communs, permettant l’émergence d’un droit politique républicain, résultat, autant que facteur de renforcement, du caractère politique de la liberté territoriale (Section I.).

L’économie classique de la démocratie locale, caractérisée par la quasi exclusivité de sa dimension représentative, a fini par laisser apparaître ses faiblesses dans la résolution de la « crise du politique ». Il est alors très vite apparu que la seule reproduction des mécanismes représentatifs au niveau local ne suffirait pas. Il a donc été décidé, malgré les réticences de nombreux élus locaux, de promouvoir la participation populaire territoriale. Le développement de différentes formes de consultation, puis la constitutionnalisation du référendum local, érigent progressivement le corps des citoyens en un décideur potentiel. La liberté institutionnelle locale prend de ce fait toute sa dimension démocratique, puisque le peuple, considéré territorialement, devient un véritable acteur de sa liberté d’administration. Comme pour la puissance d’État, la « Puissance populaire » s’affirme comme une composante essentielle dans la mise en œuvre de la puissance territoriale (Section II.).

Notes
1348.

CHEVALLIER (J.), « Synthèse », in C.U.R.A.P.P., La démocratie locale. Représentation, participation et espace public, Paris, P.U.F., 1999, p. 408.