Les critères formels

Deux critères graphiques permettent de mettre en évidence la lexicalité d’un binôme. Le premier est l’existence d’une graphie de type X’n’Y, laquelle peut être répertoriée comme orthographe principale ou variante orthographique (ex. : rock’n’roll, fish’n’chips, pick’n’mix, chew-’n’-spew, drum’n’bass, surf-’n’-turf), ou simplement attestée de manière répétée en corpus, comme par exemple eggs’n’bacon, rhythm’n’blues, bed’n’breakfast, macaroni’n’cheese, sex’n’shopping, sweet’n’sour, mom’n’pop et bricks’n’mortar dans FindArticles. Le deuxième est la présence de traits d’union entre les coordonnés en cas de non-recatégorisation lexicale du binôme. Les traits d’union servent à lever des ambiguïtés de lecture, à faire ressortir visuellement des groupes de sens. Ils apparaissent généralement entre les composants d’un hendiadys en cas de recatégorisation (ex. : trick-or-treat (N > V), hit-and-miss (V > A), life-and-death (N > A)), mais aussi parfois dans le but de souligner l’unicité, la lexicalité de binômes qui ne sont pas recatégorisés. C’est l’orthographe répertoriée de plusieurs adjectifs (ex. : black-and-blue, hard-and-fast, quick-and-dirty), et une variante orthogra-phique attestée de slow-but-sure :

‘“The same sort of slow-but-sure approach is working to help prevent runoff in rivers elsewhere.”, Joby Warrick, National Wildlife, avril-mai 2001.’ ‘“[...] the Fed report confirms other data showing the area’s economy making a slow-but-sure recovery from the recent downturn.”, Jay Fitzgerald, The Boston Herald, 10 mars 2005.’

Un autre critère formel, phonologique celui-là, peut être utilisé comme preuve de lexicalité. Un hendiadys se caractérise par un schéma accentuel invariable : le premier composant porte un accent secondaire, le coordonnant est inaccentué (il est réalisé sous sa forme réduite), et le deuxième composant porte, lui, un accent primaire. Comme tout binôme peut posséder ces caractéristiques en discours, il convient de renverser le mécanisme de la preuve : le coordonnant étant obligatoirement réduit en cas de lexicalisation, une suite X and Y est lexicale si elle n’admet pas la réalisation phonologique pleine du coordonnant sans perte ou modification de sens. La réalisation /ˈfɪʃˈændˈʧɪps/ du binôme fish and chips ne peut renvoyer à une unité ; elle désigne nécessairement une association quelconque de poisson et de frites. De manière surpre-nantecette analysen’est pas clairement vérifiée pour les hendiadys de type X or Y : si l’AHD4 et le RHUD ne donnent que la forme réduite /ə/du coordonnant dans la trans-cription des hendiadys qu’ils répertorient, l’EPD16 indique, lui, que la réalisation standard de or dans les composés all-or-nothing, common-or-garden, life-or-death et make-or-break est la forme pleine, /ɔː/, la forme réduiten’étant qu’une variante en anglais américain standard pour all-or-nothing et make-or-break. Le but hendiadytique a, lui, un statut marginal, et aucune information sur sa réalisation n’est donnée dans les dictionnaires consultés.