La structure d’un amalgame est conditionnée par plusieurs facteurs. Le nouveau signifiant doit d’abord se conformer aux contraintes phonotactiques de la langue, ce qui interdit des schémas tels que wrench + pliers > *wliers. Une analyse des points de troncation (angl. breakpoints) des bases-sources indique en outre que certains décou-pages sont privilégiés. Le Tableau 16 montre que l’intégrité des constituants syllabiques — attaque, noyau et coda — est préservée dans l’écrasante majorité des cas, et que celle des syllabes 176 est favorisée pour au moins la moitié des amalgames 177 :
point de troncation des bases-sources | amalgames formés par apocope-aphérèse | amalgames formés par double apocope |
intersyllabique | 55,1 % | 62,8 % |
entre attaque et noyau | 30,1 % | 11,8 % |
entre noyau et coda | 11,8 % | 14,5 % |
à l’intérieur d’une coda complexe | 1,5 % | 7,3 % |
à l’intérieur d’un noyau complexe | 0 % | 2,7 % |
à l’intérieur d’une attaque complexe | 1,5 % | 0,9 % |
total | 100 % | 100 % |
La préférence pour un signifiant inédit semble une inclination naturelle, mais elle n’est pas clairement confirmée par les données : si l’amalgamation de short et de skirt donne skort plutôt que shirt, et celle de twist et de fiddle twiddle plutôt que fist, c’est d’abord pour respecter la contrainte de complexité consonantique initiale 178 . Le rapprochement de weld et de melt donne meld plutôt que welt, mais rien ne prouve que l’on n’est pas ici dans le domaine de l’arbitraire, car deux contre-exemples peuvent être avancés : faction, amalgame de fact et fiction, a pour homonyme l’emprunt au françaisfaction ; shoat désigne une chimère de mouton et de chèvre (< sheep + goat), mais aussi un porcelet (< m. angl. shote).
Le modèle de syllabation adopté ici est celui de J. C. Wells dans le Longman Pronunciation Dictionary, deuxième édition (= LPD2).
Seuls les amalgames formés par apocope-aphérèse et par double apocope sont pris en compte. Après avoir écarté les amalgames équivoques, notamment ceux qui contiennent un segment ambimorphémique, le corpus d’étude est réduit à 68 composés formés par apocope-aphérèse et 55 composés bi-apocopés, soit un total de 246 points de troncation.
Voir infra, 5.3.2.