II. La lente importation du patrimoine mondial à Lyon et à Québec, ou la formation progressive d’« entrepreneurs politiques »

Les acteurs identifiés précédemment dans les démarches et les stratégies de protection et de valorisation des patrimoines historiques ne s’engagent pas tous de la même manière dans la résolution du problème public lié au patrimoine historique. Ils n’ont pas les mêmes représentations du patrimoine historique, ne donnent pas forcément les mêmes définitions de ce qu’est la protection ou la valorisation du patrimoine et ne leur accordent pas les mêmes visées stratégiques. Enfin, ces acteurs ne sont pas impliqués dans les mêmes institutions qu’elles soient locales, nationales ou internationales. Toutefois, bien que ces différences soient importantes, la stabilité apparente des contextes d’action que nous venons d’observer questionne les conditions dans lesquelles l’idée d’inscription sur la Liste du patrimoine mondial émerge. Qui porte cette idée ? Comment est saisie la possibilité d’une inscription sur la Liste et comment est construite une candidature d’un site local ? Comment est initié la quête d’un label international ?

Les profils des « entrepreneurs politiques » des inscriptions sur la Liste du patrimoine mondial à Québec et à Lyon peuvent, dans un premier temps, être perçus comme très différents. Retracer les trajectoires socio-professionnelles de ces individus permet toutefois de pointer deux ressources communes : leur proximité avec certaines élites locales ou nationales ainsi que leur connaissance fine du patrimoine et, plus précisément de la protection du patrimoine historique. Si la première facilite la mise à l’agenda de leur solution, la seconde se révèle, au terme de notre analyse, indispensable à ces deux individus dans leur présentation de l’inscription sur la Liste du patrimoine mondial comme solution acceptable par les différentes instances gouvernementales concernées. Autrement dit, c’est bien dans le lien qu’ils établissent entre patrimoine historique et patrimoine mondial que ces « entrepreneurs politiques » sont à même de proposer ces solutions.