Les récits de Lyonnais et de Québécois portant sur la réception locale de la « décision de l’Unesco » laissent voir que l’inscription est saisie et présentée comme un don : l’Unesco aurait délivré un nouveau qualificatif pour la ville. De fait, les réceptions lyonnaises et québécoises des inscriptions sur la Liste du patrimoine mondial se caractérisent par des moments de reformulation des objectifs et des attentes initiales de l’action menée auprès de l’Unesco. Elles correspondent notamment à une prise de conscience, par les acteurs du tourisme, du levier potentiel que représente la « décision internationale » en termes de communication et de publicité, en termes de notoriété et de représentation, c’est-à-dire en termes de « marketing territorial » pour reprendre une expression des acteurs 784 . Aucune politique particulière portant sur la gestion des nouveaux biens du patrimoine mondial (en termes de protection ou de conservation) n’est développée à Lyon en 1999 ou à Québec en 1986. Les municipalités, impliquées dans une seule procédure d’inscription, contrairement aux acteurs affiliés à des scènes nationales ou transnationales, développent une lecture restreinte de l’action : l’inscription est d’abord perçue comme un but en soi, rapidement dissociée de l’action plus globale de protection du patrimoine mondial telle qu’elle découle de la mise en œuvre de la Convention de 1972. Saisir l’inscription sur la Liste comme un don n’est toutefois pas décliné exactement de la même manière pour tous les acteurs locaux. La question du rôle à tenir vis-à-vis des « consacrants », vis-à-vis des autres décideurs ou encore celle des suites à donner à un tel don apparaissent ainsi en filigrane lors des premières réactions. Reste alors à voir comment des discours sont pensés et construits à Lyon et à Québec et à observer les choix politiques qu’ils révèlent.
Expression généralement utilisée par nos interviewés pour qualifier la décision des inscriptions sur la Liste du patrimoine mondial de l’arrondissement historique de Québec et du site historique de Lyon.
Voir également sur ces stratégies de marketing territorial, l’étude de Christian Le Bart. Le Bart (Christian), La rhétorique du maire entrepreneur, Paris, Pédone, 1992.