1. Les transports urbains dans les grandes agglomérations subsahariennes, un système en crise

a. Des différences qui n’empêchent pas de fortes similitudes sur le plan de l’offre de transport et de la demande de déplacement

Les agglomérations millionnaires d’Afrique subsaharienne présentent des caractéristiques similaires sur le plan de l’évolution de la demande et de l’offre de transport :

Avant d’expliciter ces trois points communes, force est de constater que l'Afrique subsaharienne est loin de constituer une zone géographiquement homogène. Elle présente une diversité sur le plan culturel, physique et climatique ou historique. Il serait donc logique de s'attendre à quelques différences de comportement de mobilité, en termes de pratiques de déplacement ou sur le plan des systèmes de transport dans les grandes agglomérations subsahariennes.

Un relief plat peut favoriser certains modes de déplacement nécessitant plus d'efforts physiques au contraire d'un relief accidenté. De même, une pluviométrie plus soutenue ou un ensoleillement plus important auront une influence sur le choix du mode de déplacement. Les flux de mobilité obéissent à la configuration des sites urbains : aux flux radioconcentriques presque parfaits des villes d'intérieur, s’opposent des flux parfois désordonnés de certaines villes coincées par les eaux. Sur le plan culturel, on peut observer des influences plus fortes de la tradition en faveur ou au détriment d'un mode de transport. La polygamie et un foyer plus peuplé peuvent conduire à des stratégies de mobilité différentes à celles des foyers monogames ou de célibataires. Par exemple, une concentration des déplacements pour les achats de vivres sur un seul individu peut amener les autres membres du foyer à réduire leur mobilité ou à se déplacer un peu plus pour des motifs personnels. Certaines sociétés africaines accordent une part plus active aux femmes dans l'apport de revenus pour les ménages, les amenant ainsi à produire une mobilité spécifique. La religion musulmane impose cinq prières quotidiennes, ce sont autant de déplacements potentiels pour ses pratiquants.

Il peut évidemment être trouvé d'autres traits de caractères (niveau de développement des infrastructures, niveau de vie moyen, offre de transport en présence…) poussant à une différenciation des grandes agglomérations subsahariennes en fonction des pratiques de mobilité de leurs habitants et notre propos ne se veut pas exhaustif. Chacun des traits pris à part propose un découpage de la région en un sous-ensemble de pays, mais il est plus difficile de superposer tous les découpages possibles : dans la zone sahélienne, par exemple, aux caractéristiques climatiques assez proches, on trouve Dakar, ville littorale et Ouagadougou, Niamey et Bamako, villes d'intérieur de plus petite taille ; le Burkina Faso y est moins islamisé que les autres.

Fort de ces nuances et du recul nécessaire pour éviter toute généralisation simplificatrice, les caractéristiques communes aux grandes agglomérations subsahariennes, énoncées plus haut, sont susceptibles d'appeler des réflexions ou des solutions qui leur soient communes sur le plan de la mobilité et de l’offre de transport. Toutefois, l’Afrique du sud se démarque de l’ensemble relativement homogène formé par l’Afrique subsaharienne. Les capacités financières de ce pays sont sans commune mesure avec le reste du sous-continent subsaharien. A côté des townships habités par des populations pauvres et desservis par des formes artisanales de transport, les moyens financiers du pays lui permettent par exemple d’envisager des projets de desserte d’aéroport par des systèmes ferroviaires technologiquement très avancés. Cette dualité fait dire à B. Duthion que « les transports urbains, en Afrique du Sud, présentent à la fois des caractéristiques occidentales et africaines ». Nous exclurons dorénavant ce pays de notre réflexion.