b. Les autobus en site propre intégral, une meilleure satisfaction des exigences de flexibilité d’une innovation

Si les différentes technologies de STUM ont été maintes fois expérimentées en Afrique du nord, en Amérique latine ou en Asie, elles constitueraient une nouveauté en Afrique subsaharienne. Et comme toute innovation, un tel aménagement présente des risques. Reprenant des travaux précédents sur les risques liés à l’innovation en transport, L. Dennant-Boemont présente une typologie de ces risques :

  • Le risque technologique : « Il est possible que la technologie ne produise pas les résultats escomptés, ou à des coûts supérieurs à ceux prévus ». On peut imaginer, en ce qui nous concerne, que la capacité offerte par l’aménagement soit très en-dessous de la demande à satisfaire ou encore, que les charges de fonctionnement, soient trop élevées.
  • Le risque marchand : « La seconde possibilité de se tromper réside dans la plus ou moins grande faiblesse des réactions du marché à la nouvelle technique ». Quel attrait aura l’infrastructure d’un STUM et surtout la superstructure qui l’accompagne (tarification, système de dessertes et de correspondances…) ?
  • Le risque non marchand : « Le troisième élément susceptible d’introduire de l’aléa dans la prévision des effets d’une nouvelle technologie est l’existence d’effets externes, dont le caractère (positifs, négatifs) et l’importance peuvent différer de ce qui avait été initialement anticipé. ». La forte croissance des villes africaines pourrait, par exemple, faire que le système aménagé ne corresponde plus aux nouveaux axes de développement urbain.

Toute innovation produit de l’incertitude quant à son succès et cette incertitude contraint à une recherche de flexibilité ou plutôt de « souplesse » des investissements, concept privilégié par P. Massé 45  : « … [l’investisseur] réalise , au prix d’un supplément de coût immédiat, un dispositif souple, susceptible de s’adapter à un large éventail de circonstances ».

Il est plus facile de reconvertir un site propre intégral pour autobus que des infrastructures ferroviaires. Un site propre intégral pour autobus présente un caractère moins irréversible qui permet plus facilement sa remise en cause ultérieure. Il est moins coûteux à construire et sans doute moins coûteux à « effacer ». Et s’il permet plus facilement un retour en arrière, un ASPI peut être conçu comme une étape vers un aménagement ferroviaire de surface. Au Brésil, Belo Horizonte a ainsi transformé un corridor d’ASPI en métro et le même processus est envisagé à Salvador . Certaines agglomérations des pays du nord, à l’instar de Birmingham, ont dès le départ intégré la logique d’évolution de leurs systèmes à base de bus vers des systèmes ferroviaires.

La technologie d’autobus en site propre intégral est la moins coûteuse des STUM. Solution privilégiée par certaines villes d’Amérique latine, elle a montré qu’elle savait répondre efficacement à de fortes demandes. Les ASPI présentent également l’avantage d’être une technologie plus simple à mettre en œuvre, et plus flexible que les systèmes ferroviaires. Leur construction et leur exploitation n’en seront que plus aisées pour des agglomérations subsahariennes n’ayant aucune expérience de STUM mais qui se sont familiarisées, par contre, avec les infrastructures et la circulation routière. Toutefois, le coût d’un ASPI reste cependant relativement important dans un contexte de rareté de ressources. Est-il accessible aux agglomérations subsahariennes ?

Notes
45.

Massé P. (1959). Le choix des investissements, Paris, Dunod, 489 p. cité par L. Dennant-Boemont [1996, p. 177]