Seconde partie :
Le site abbatial, XIe-XIVe s.

Introduction

Avec la période qui s’ouvre aux abords de l’an mil, on touche à une séquence majeure du développement de l’abbaye Saint-Philibert-et-Saint-Valérien, désormais pleinement inscrite dans le paysage tournugeois.

Peut-être, notre vision d’archéologue était-elle faussée, pour les IXe - Xe s., par la faiblesse des données dont nous disposions, quand les sources écrites restaient muettes sur la vie propre du monastère. Désormais, les vestiges, conservés en élévation ou parfois enfouis et dégagés dans quelques fouilles, offrent des données concrètes qui nous manquaient jusque là. Quant aux sources écrites, elles attestent au moins du degré de prospérité atteint par le monastère à la fin du XIe et au début du XIIe s. Et les moines semblent tirer parti du nouvel ordre social issu de ce qu’on appelle « révolution », ou « mutation », de l’an mil - tout en sachant s’inscrire dans le jeu ascendant de la papauté.

A l’observation des vestiges, on assiste à l’évidence, aux XIe - XIIe s., à d’importants remaniements. L’abbatiale romane a déjà eu droit aux égards de plusieurs historiens de l’Art : ils se sont intéressés surtout au chantier du XIe s., le XIIe s. étant envisagé essentiellement sous l’angle de la sculpture. Les bâtiments claustraux, eux, n’étaient l’objet que de premières approches. Le large examen que nous avons tenté, visant à retracer phase après phase, la physionomie d’ensemble du monastère, fait réapparaître en force l’importance des travaux de ces deux siècles, sur la totalité du site. Mais les XIIIe et XIVe s. retrouvent aussi leur juste place, peut-être un peu négligée jusque là.

Ce sont donc le repérage des vestiges de ces périodes et les questions de chronologie, relative et absolue, qui constituent les premiers apports de nos travaux. Mais nous avons cherché aussi à comprendre, à différents moments de son évolution, le fonctionnement de l’établissement, et les intentions de la communauté.

Pour l’heure, et dans un souci de clarification de nos données, nous voulons d’abord faire le point des informations issues des sources écrites. Puis sur la base de ces acquis, nous pourrons présenter longuement les apports de notre démarche archéologique, à travers une succession d’états du monastère, dans l’ordre chronologique, entre le début du XIe et le milieu du XIVe s.