4.3.2. Les sources Tournusiennes : de trop rares mentions

Hélas, à Tournus au XIe s., sous la plume du chroniqueur Falcon, tout ce qui n’est pas église ou sanctuaire se résume à de vagues « officinae » (évoquées à deux reprises) ou « domus » - qu’on peut traduire par... « bâtiments » ! Seule peut être relevée la mention de « cryptae » dans l’église de 1007 / 1008, dont l’interprétation exacte reste discutable (« cryptes », ou plus prudemment, « galeries », « espaces voûtés » ? Nous y reviendrons : infra, II. Etude archéologique de l’abbaye. A. L’abbaye au XIe s.....)274.

Pour le reste, il faut attendre 1108 pour voir simplement citer une première fois une salle du chapitre (« capitulo trenorchiensi»), 1200 pour le dortoir et le réfectoire, et 1239 pour le cloître275. Même l’église en tant que monument n’est mentionnée que rarement, toujours de façon générale, comme « ecclesia beati Filiberti », ou pour son chœur ou l’un de ses autels (l’attribution n’étant généralement pas spécifiée, il doit s’agir le plus souvent de l’autel majeur). Au moins, l’abbé Bérard y signale, en 1224, la « Galilaea ecclesiae », sur laquelle nous aurons l’occasion de nous interroger (infra, II. Etude archéologique de l’abbaye. A. L’abbaye au XIe s). Et Juénin relate, sans en livrer la source, la fondation en 1339, par le chevalier Geoffroy de Berzé, d’une chapelle Saint-Georges dans l’église abbatiale, qui devrait avoir hébergé sa sépulture276. Quant au cimetière mentionné dans la bulle de Calixte II, qui le bénit lors de la consécration de 1120, il est situé l’année suivante, par le même pape, littéralement « à côté du monastère » (« juxta idem monasterium»)277 : ce qui laisse beaucoup de possibilités ouvertes - nous aurons encore l’occasion d’y revenir.

Au total, la récolte est bien maigre. Au quasi silence des textes médiévaux répond l’énumération tout de même plus fournie de 1562,  « mémoyre des dégasts et des pertes causés par le capitaine Ponsenat et son armée à l’abbaye de Tournus »278, qui pourra se révéler utile à notre analyse. Son principal tort est évidemment de décrire une situation largement postérieure à la période qui nous occupe ici. En outre, les visiteurs, dressant surtout une liste de réparations à faire, se taisent sur un grand nombre de choses, circulant d’un espace à l’autre sans toujours donner au lecteur les moyens de s’y repérer.

De ce texte, on retiendra néanmoins, dans la grande église, la mention des « crottes et basses esglises », dans lesquelles on reconnaît sans peine la crypte actuellement subsistante, et « lesglise Sainct Michel qui est en hault et au dessus de la votte de la première esglise », à laquelle on accède par un escalier de cinquante marches, qui désigne visiblement l’actuel étage de l’avant-nef. Puis sont cités le cloître, le chapitre, le dortoir, le réfectoire, la « maison abbatiale », des pressoirs et caves, flanqués de la « vieille cuysine », « lAuditoire des cours dudict Tornus », la prison, la « grand porte de ladicte Abbaye par laquelle on sort aux champs », avec son pont-levis, quelques tours, la « chapelle Saint-Eutrope » et la « chambre du Trésor », et diverses « maisons » ou « chambres » et leurs dépendances, où résident certains religieux au XVIe s. La localisation de ces diverses constructions est souvent problématique, et l’interprétation de leurs attributions particulièrement délicate si l’on cherche à reconnaître des vestiges de la période XIe / XIVe s. - entre lesquels il conviendrait d’ailleurs, d’établir une chronologie.

Notes
274.

FALCON, chap. 45, 46, et 47 (JUENIN, Preuves , p. 26 et 27 - ou POUPARDIN 1905, p. 101, 102, 104).

275.

1108 : accord entre les moines de Tournus et de Cluny (JUENIN, Preuves , p. 140). 1200 : Société avec l’abbaye de l’Ile-Barbe (JUENIN, Preuves , p. 18). 1239 : « Mémorial » de l’abbé Bérard (JUENIN, Preuves , p. 189)

276.

JUENIN, I, p. 180. Sur la galilée de l’église : « Mémorial » de l’abbé Bérard, in JUENIN, Preuves , p. 187.

277.

JUENIN, Preuves , p. 149.

278.

« Mémoyre des dégasts... », in BERNARD 1914.