Dans les réalisations souvent prestigieuses de la fin du XIIe s., rien ne laisse soupçonner les difficultés de l’abbaye, connues par les textes pour les décennies 1160 à 1190. Alors que le poids des dettes fait envisager un temps la dispersion des moines, alors que de sérieuses tensions se font jour avec les habitants du bourg, et que des troubles marquent la région, rien ne trahit par exemple, un ralentissement de l’activité de la cuisine dans ces années-là. Même si les travaux n’ont plus l’ampleur du premier XIIe s., la communauté persiste à embellir l’église et le cloître, et n’hésite pas à lancer un programme aussi ambitieux que le calendrier de mosaïque de l’abbatiale. Il semble donc qu’il faille dissocier les difficultés extérieures du monastère, des réalisations poursuivies à l’intérieur, pour la gloire de Dieu - conformément peut-être, à un programme établi d’avance.
Mais il convient aussi de ne pas exagérer l’importance de la crise. G. Duby a montré par quel processus d’emballement général, la croissance du début du siècle a abouti à l’endettement des plus puissants dans cette période: dans ce jeu en vérité, les grandes abbayes ne sont pas les plus mal loties702. Quelques décennies plus tard à Tournus, les travaux du XIIIe s. témoignent avec force du renouveau - ou de la pérennité - de l’activisme abbatial.
DUBY 1953 (1988) : p. 361 - 399.