2. Entre « Châtel » et abbaye : une enceinte incertaine, mais peut-être déjà une porte

En l’absence de témoignage écrit, faut-il imaginer que dans une période où on néglige la muraille du castrum, le bourg est librement ouvert à l’ouest, entre « Châtel » et abbaye ? Des exemples extérieurs suggèrent plutôt une claire matérialisation du « bourg », même par un simple fossé. Ainsi à Saint-Denis, dès l’époque carolingienne, la ville (« castellum ») est entourée d’un fossé bordé d’un talus et vraisemblablement d’une palissade ; à Dijon, le bourg monastique jouxtant l’abbaye Saint-Bénigne forme jusqu’au XIIe s. une entité autonome : au XIe s. au moins, il est délimité par un simple fossé. A Cluny, la décision de dresser des murs n’est prise qu’à la fin du XIIe s. Cela n’empêche nullement la construction de belles portes de ville, dont la présence est souvent plus symbolique, destinée à marquer solennellement l’entrée en ville, que véritablement défensive. De la ceinture de fossés de Saint-Denis se détachent des portes d’entrées monumentales, refoulées d’une vingtaine de mètres vers l’intérieur ; et à Cluny à la fin du XIIe s., c’est peut-être par les portes maçonnées qu’on a commencé l’enceinte (laquelle pourrait n’avoir été achevée qu’au XIVe s. ?) 902.

A Tournus, A. Bernard, dans sa description des vestiges de la « porte Boyé », démolis en 1908, distingue deux états de cette tour, antérieurs en tout cas à son bouchage survenu vers 1360 . Il rapproche les claveaux de l’arcade primitive  « des plus anciennes ouvertures de l’église Saint-Philibert », et le type de construction du second état, de la porte du château de Brancion, datable selon lui au XIIe ou au XIIIe s.903. Nous ne pouvons évidemment plus vérifier ces observations : mais pas plus qu’à Cluny, la présence éventuelle de cette tour-porte, dès les XIIe - XIIIe s., n’implique celle d’une muraille complète.

Notes
902.

Sur Saint-Denis : cf. MEYER 1993 : plan p. 92, et Atlas historique de Saint-Denis , 1996 : p. 188-192 et 237. Sur Dijon : RICHARD 1946, d’après CHEVRIER, G., et CHAUME, M. - Chartes et documents de Saint-Bénigne de Dijon, prieurés et dépendances, des origines à 1300, tome second (990-1124) (Analecta Burgundica). Dijon : Bernicat et Privat, 1943 : n° 310, charte de Robert I (1031-1046) ; et SAINT-JEAN VITUS 1995 f. Sur Cluny : MEHU 1996 et MEHU 2001, p. 203 - 206, 378 - 379, et 463 - 464.

903.

BERNARD 1911, p. 93.