2-3 Henri Bergson (1859-1941)

Henri Bergson, philosophe professeur au Collège de France expose l’essentiel de sa théorie sur l’organisation de la mémoire humaine dans Matière et Mémoire, publié en 1897, livre qui continue à susciter des questions. Bergson à la différence de Ribot et de James, oppose la mémoire à l’habitude. Bergson prend l’exemple de l’apprentissage d’une leçon et oppose la récitation de la leçon apprise par cœur : « souvenir moteur ou souvenir appris » à la capacité à rappeler les circonstances de chacune des récitations : « mémoire vraie, souvenir spirituel, mémoire par excellence, mémoire pure, souvenir spontané ». La mémoire vraie (mémoire du passé) sert de base à la mémoire des habitudes. L’habitude est corporelle, la mémoire est esprit ; elle se confond en un sens avec notre durée, notre passé, qui se conserve automatiquement et s’accroît sans cesse. Refoulés dans l’inconscient par les mécanismes cérébraux, nos souvenirs attendent, pour reparaître à la conscience. Dans le modèle de Bergson, la répétition d’un souvenir ne permet pas de convertir un souvenir vrai en une habitude et celui-ci considère que dans le cas de l’amnésie pathologique, (ce qui actuellement est clairement infirmé), les lésions du cerveau ne peuvent atteindre que les souvenirs moteurs. Pour cet auteur, plus que la localisation du souvenir pur (dans la « matière »), se pose le problème de son intervention dans le présent et il se positionne clairement pour la reconstruction des souvenirs plus que pour leur récupération tels quels. Ainsi il écrit dans Matière et Mémoire : « ce que j’appelle mon présent, c’est mon attitude vis à vis de l’avenir immédiat, c’est mon action imminente. Mon présent est donc bien sensori-moteur. De mon passé, cela seul devient image, et par conséquent sensation au moins naissante, qui peut collaborer à cette action, s’insérer dans cette attitude, en un mot se rendre utile ; mais, dès qu’il devient image, le passé quitte l’état de souvenir pur et se con fond avec une certaine partie de mon présent. Le souvenir actualisé en image diffère donc profondément de ce souvenir pur. L’image est un état présent, et ne peut participer du passé que par le souvenir dont elle est sortie. Le souvenir au contraire, impuissant tant qu’il demeure inutile, reste pur de tout mélange avec la sensation, sans attache avec le présent, et par conséquent inextensif ».