2 Amnésie rétrograde et gradient temporel

Trois types d’amnésie rétrograde sont individualisées dans la littérature : l’amnésie rétrograde avec gradient temporel de Ribot, l’amnésie avec gradient inversé et l’amnésie sans gradient temporel.

L’amnésie rétrograde avec gradient temporel peut être étendue ou non.Dans le cas de lésions bilatérales du lobe temporal interne, l’amnésie peut être limitée à 2 ou 3 ans. Le cas princeps est celui d’HM dont l’amnésie recouvrait cette période (Milner et al., 1968). Ce même tableau a été décrit après des électrochocs (Squire et al. , 1981). L’étendue de l’amnésie rétrograde dépendrait de l’importance de l’atteinte de la formation hippocampique et de son extension vers le cortex temporal. Ainsi, Zola-Morgan et al.,(1986) ont rapporté l’observation du patient RB présentant une amnésie de 2 ans et présentant une lésion limitée au champ CA1 de l’hippocampe. A l’inverse, des amnésies s’étendant sur 10 ou 20 ans ont pu être décrites chez des patients présentant des lésions de l’hippocampe, du gyrus dentatus, du complexe subiculaire et du cortex enthorinal (Squire & Zola-Morgan, 1996).L’amnésie rétrograde étendue sur plusieurs décennies (20 à 40 ans) peut se rencontrer dans le syndrome de Korsakoff et l’on peut citer l’étude du patient PZ, d’autant plus intéressant qu’il tenait un journal personnel de toutes ses activités que les auteurs purent utiliser lors de son évaluation (Butters et Cermark, 1986) et dans la maladie d’Alzheimer débutante (Kopelman, 1992 ; Thomas-Antérion et al., 1996).

L’amnésie rétrograde avec un gradient temporel inversé ne s’observe que dans la démence sémantique du fait de la préservation de la mémoire épisodique et de la perturbation de la mémoire sémantique (Hodges et Graham, 1998).

La troisième forme d’amnésie rétrograde sans gradient temporel traduit une atteinte beau-coup plus global du lobe temporal. Elle a été rapportée dans l’encéphalite herpétique où les lésions concernent les lobe temporaux dans leurs parties externes et interne (Cermark et O’Connor, 1983 ; Mc Carthy et Warrington, 1992), la maladie d’Alzheimer au stade moyen (Gade et Mortensen, 1990) et certains traumatismes craniens. Une observation a toutefois été rapportée dans le cadre d’une minime lésion temporale antérieure (Markowitsch et al., 1993).

Dans ce dernier cadre, il faut sûrement isoler les observations très particulières de patients présentant au décours d’une pathologie neurologique discrète ( Sellal et al., 2002) n’ayant entraînée aucune lésion visible sur l’imagerie, une amnésie rétrograde focalisée et le plus souvent exclusivement biographique. Le concept sur la nature de l’amnésie étant discutée, pour les uns authentiquement et uniquement « psychogène » (même si le terme recouvre un sens différent selon les auteurs) et pour d’autres « fonctionnelle ». Ainsi Markowtisch et al. (1996) suggère qu’un stress post-traumatique puisse entraîner un blocage du fonctionnement neuronal avec même modification éventuelle des données d’imagerie fonctionnelle dans les régions hippocampiques et cingulaire postérieure.. Nous reviendrons sur ces observations singulières et ce qu’elles nous apprennent.