I- Les BCIM : concepts nouveaux, enjeux inouïs, défis mondiaux à relever

Face à l’ampleur des problèmes globaux, notamment les crises économiques et financières qui occupent aujourd’hui le devant de la scène, il serait une exigence de logique ou de raison d’engager des réflexions sur la façon de stabiliser le système économique et financier mondial et de pallier la grave insuffisance de BCIM qui, selon Kaul, Grunberg et Stren (1999), serait à l’origine de la plupart de ces crises. En effet, la sous-production de BCIM donne lieu à la croissance de « maux collectifs internationaux » qui désignent les externalités négatives qui touchent toute la planète 8 . Compte tenu de la nature des crises économiques et financières ainsi que de leur propagation à d’autres régions de la planète, leur résolution pourrait devenir la principale justification des institutions financières internationales 9 (IFI).

Ainsi, la présente étude s’inscrit dans le cadre de ces réflexions 10 . Elle vise à apporter une pensée propre à ce débat, dont l’acuité trouve son fondement dans le manque de cohérence intellectuelle ou l’absence d’un ensemble de théories, étayées par des approches empiriques, pouvant préciser clairement le rôle et l’importance des IFI dans la définition de l’ordre mondial et la fourniture de BCIM 11 .

Cet exercice suscite de nombreuses questions, qui constituent les problématiques de cette recherche, et auxquelles nous nous emploierons à répondre : dans quelle mesure les concepts de BCIM sont-ils un instrument utile pour décrire et analyser les défis mondiaux actuels ? Etant donné qu’au niveau national, ce sont les pouvoirs publics qui ont habituellement la tâche d’internaliser les externalités liées à certaines activités (notamment économiques) et de fournir les biens collectifs nationaux, en l’absence d’un gouvernement international, comment concevoir des politiques et des stratégies viables et de portée générale qui garantiraient une production optimale de BCIM ? Comment forger un consensus théorique, à la lumière des faits concrets, capable de déboucher sur des prescriptions réelles en faveur de la coopération et de l’action collective à l’échelle mondiale nécessaires à la production de ces biens ?

L’analyse de ces questions sous l’angle des relations internationales exprime le rôle avéré des institutions internationales dans la promotion de ces coopération et action collective internationales ; ce qui dégage d’autres problématiques dans cette étude, à savoir : en se basant sur les problèmes économiques et financiers mondiaux, reflétant la sous-production de certains BCIM, les IFI sont-elles à même de favoriser la production de cette catégorie de biens, en coordonnant les efforts globaux et en forgeant l’action collective internationale qui commandent ce processus ? Sinon, comment pallier une éventuelle défaillance de ces institutions et intégrer le traitement de la question de BCIM dans leur architecture ?

Pour mieux appréhender le sujet dans son ensemble et aborder toutes ces questions, il convient d’analyser – à la fois théoriquement et empiriquement – le rôle des IFI dans l’émergence des prescriptions concrètes pour l’action collective internationale nécessaire à la production optimale de BCIM. La démarche que nous retenons consiste à examiner ces questions à la lumière des approches relatives aux BCIM, qui permettent de mieux identifier ces biens, de fixer les régimes nécessaires à leur production et/ou financement 12 et de répondre aux questions concernant la façon de coordonner les actions à l’échelle mondiale en faveur de ces biens, censés contribuer au bien-être mondial.

D’abord, pour mettre en évidence l’intérêt de ces interrogations, il est intéressant d’analyser le concept de biens collectifs, qui permet de mieux appréhender la genèse et l’évolution de concepts de BCIM, qui, depuis ces dernières années, font de plus en plus l’objet d’analyse, de recherches et de débats dans les milieux académiques et politiques. Sans insister sur le débat philosophique concernant le terme « biens », ceux-ci englobent ici à la fois les biens, services, patrimoines, phénomènes,... qui sont nécessaires aux êtres humains ou aux autres êtres vivants 13 .

Et, le concept de biens collectifs ou publics 14 remonte au XVIII e siècle avec David Hume. Ce dernier a traité de difficultés inhérentes à la production de « biens collectifs » (common goods) dans son Traités de la Nature Humaine publié en 1739 15 . Quelques 30 ans plus tard, Adam Smith analyse les questions similaires dans son Recherches sur la Nature et les Causes de Richesse des Nations. Enfin, dans les années 1950, Samuelson développe l’approche conceptuelle des biens collectifs, formalisée dans un cadre d’hypothèses bien définies. A partir de là, la notion de biens collectifs est devenue un élément important de l’économie publique. Il ne s’agit pas là de faire un résumé de la littérature économique sur le sujet qui n’a cessé d’émerger depuis. En fait, comme le souligne Shmanske (1991), c’est « une littérature aussi vaste et variée que la notion de biens collectifs ranime à l’esprit une douzaine de questions, dont chacune apporte son propre modèle particulier et dépend de sa propre série d’hypothèses particulières ».

Habituellement, les économistes définissent les biens collectifs comme les biens, services ou ressources qui bénéficient à tous, et se caractérisent par la non-rivalité (la consommation du bien par un individu n’empêche pas sa consommation par un autre), et la non-exclusion (personne ne peut être exclu de la consommation de ce bien) 16 . Ainsi, pour ces biens, il est impossible de rendre la consommation payante ; ce qui explique que le secteur privé ne soit pas intéressé par leur production. Celle-ci est en fait assurée dans bien des cas par les pouvoirs publics. Les biens collectifs sont généralement nationaux ou locaux. La défense est un bien collectif national qui profite à la population de tout un pays. Les routes rurales sont des biens collectifs locaux qui profitent à un groupe d’individus plus réduit. La défense nationale, l’éducation primaire gratuite pour tous sont des exemples classiques de biens collectifs nationaux 17 . La principale caractéristique des biens collectifs, c’est l’incapacité des marchés privés à en assurer une fourniture optimale. Il existe également des biens collectifs qui profitent à la majorité de la population du globe : ce sont des biens collectifs internationaux ou mondiaux.

Nous définissons les BCIM 18 comme ceux dont les avantages ne sont pas limités à un seul pays, à une seule génération et à un seul groupe de population. En d’autres termes, ce sont des biens dont les bénéfices franchissent les frontières – qu’il s’agisse des frontières entre les Etats, les populations, les riches et les pauvres ou encore entre les générations. Ce sont donc sont des biens dont les effets sont indivisiblement répartis à la surface du globe. Cette définition ne se recoupe pas avec d’autres qui font appel à des critères moins conceptuels. Par exemple, Lille (2004) estime que la théorie économique n’est pas le cadre pertinent pour déterminer ce que doivent être les BCI, et définit ceux-ci comme : « des choses auxquelles le gens et les peuples ont droit, produites et reparties dans les conditions d’équité et de liberté qui sont la définition même du service public, quels que soient les statuts des entreprises qui assurent cette mission. Les droits universels humains et écologiques en sont la règle, les institutions internationales légitimes le garant, la démocratie l’exigence permanente, et le mouvement social la source » 19 . Les exemples évoqués varient selon les analyses et les hypothèses retenues ; on y inclut fréquemment l’environnement global sain, la paix et la sécurité mondiales, la protection contre les grandes pandémies, ou encore la diffusion suffisante du savoir global (notamment la connaissance de base), voire la stabilité financière internationale ; en d’autres termes, tous les domaines où les risques et les profits s’étendent au-delà des pays individuels ou séparés. Il existe d’ailleurs une certaine interdépendance entre ces biens ; en effet, la pauvreté et la misère ne pourraient guère disparaître si l’on assure pas la préservations des ressources naturelles et de l’environnement.

Selon Kaul (2005), les concepts de biens collectifs à caractère mondial étaient connus d’antan par la notion de « priorités globales partagées ». Elle a servi d’inspiration après les guerres dévastatrices du XXe siècle et plusieurs institutions (ONU, FMI, BM,...) et instances internationales (G7, GATT,...) ont certainement été motivées par cette perspective, pour défendre des objectifs communs. Avec les évolutions, cette idée est ressuscitée sous la forme, plus actuelle, des biens collectifs internationaux et mondiaux (BCIM).

Quant aux facteurs à l’origine de l’émergence des biens collectifs à caractère international, ils sont multiples. D’abord, la grande ouverture des frontières et le degré élevé d’interdépendance économique mondiale ont facilité l’extension de certains problèmes, tels que le dumping social, la dévaluation compétitive, voire même la délinquance financière, du niveau national à l’échelon mondial. Cela a conduit certains économistes à réfléchir à l’application du concept de biens collectifs aux problèmes mondiaux 20 . En d’autres termes, avec la mondialisation – quiestun puissant facteur de transmission des externalités –, les biens collectifs génèrent d’importantes externalités, positives ou négatives 21 , qui retombent de plus en plus sur les habitants des autres pays. Par exemple, dans un système financier complexe et interdépendant, quand une institution fait faillite, cela peut sûrement entraîner la faillite de toute une chaîne d’autres banques et institutions, et déstabiliser le système financier dans son ensemble. Les problèmes qui, traditionnellement, étaient uniquement nationaux (changement climatique, crises financières, explosions politiques provoquées par l’accroissement des inégalités,...) sont aujourd’hui mondiaux, car ils dépassent les capacités de réaction d’un seul pays. La montée en puissance de ces concepts pourrait en outre s’expliquer par l’entrée dans le jeu international des acteurs non étatiques, tels que des organisations internationales, des organisations non gouvernementales, etc. En effet, depuis ces dernières, on assiste de plus en plus à l’implication des acteurs de la société civile 22 (les ONG, les collectivités territoriales, etc.) et du secteur privé dans la considération des problèmes mondiaux et, plus particulièrement, dans la résolution de la question de BCIM.

Globalement, avec le phénomène de la mondialisation, l’intérêt de concepts de BCIM s’avère considérable. Ce vaste processus réoriente en fait à la fois l’action et la perception des acteurs sur les questions globales. Les concepts de BCIM offrent ainsi un angle d’analyse et d’élaboration de politiques adaptées aux nouveaux défis mondiaux, car ils supposent de penser la pluridimensionnalité, les interdépendances, de modifier les échelles de temps (en liant le très long terme au court terme) et d’espace (en reliant le local au global) et de mettre en œuvre des stratégies globales. Tous les pays doivent repenser leurs modes de production et de surconsommation. La question éminemment politique est celle des procédures, des négociations, des conventions ou des constitutions internationales permettant de hiérarchiser les BCIM et de traduire les relations de conflits en relations de coopération.

Les réflexions et les débats sur les meilleurs moyens de produire les BCIM portent sur les mécanismes internationaux de garantie et de financement. Il existe plusieurs approches théoriques qui analysent l’interaction entre les BCIM et les technologies requises pour leur production 23 . Ainsi, la théorie de la stabilité hégémonique souligne que le coût de production de certains BCIM est largement assumé par un seul acteur, plus soucieux de l’intérêt de ces biens. D’autres types de ces biens sont produits par une démarche additive, impliquant la contribution de tous les acteurs (Etats). C’est le cas la réduction de la pollution ou de la lutte contre le terrorisme international. La production de certains BCIM exige des apports techniques et réglementaires, mais aussi financiers. Cette circonstance soulève la question d’allocations optimales de ressources pour la production de BCIM. Au-delà des diverses sources de financement (publiques, privées, des institutions internationales,...), l’idée d’une fiscalité mondiale et le dilemme de l’aide publique au développement pour le financement de BCIM pourraient être analysés dans cette optique 24 .

Au total, si un consensus général semble se dégager sur l’intérêt de ces biens, les moyens et mécanismes pour les fournir demeurent vagues, car ils s’attachent aux aléas de l’action collective. Celle-ci – au niveau local, national et international – est confrontée à des sérieux problèmes de décisions et de défaut d’incitations 25 . Les questions soulevées par les modalités de production de BCIM portent en effet sur la nécessité des interventions collectives à l’échelle mondiale pour fournir ces biens, les niveaux possibles de gouvernance et les niveaux pertinents d’articulation des préférences collectives (local, national, régional ou mondial). Ces questions augurent des difficultés que comporte la production de BCIM. En effet, à l’instar des biens collectifs, la fourniture optimale 26 de BCIM connaît des impasses. D’abord, il est admis que les marchés ne sont pas aptes à les fournir 27 en quantité suffisante. Le principe selon lequel le marché et la croissance seraient à même de résoudre l’ensemble des problèmes de bien-être et d’équité n’est donc pas réellement soutenable. De même, les Etats pris indépendamment ne sont pas à même d’inventer de nouvelles dynamiques propres à fournir ces biens de façon optimale. L’absence de cadre international dans les domaines qui ont trait au fonctionnement des marchés financiers, par exemple, apparaît comme étant une source de problèmes pour tous les acteurs 28 . L’approche du PNUD (1999, 2003) concernant les BCIM, résume les explications à la sous-production de BCIM en trois raisons essentielles : le manque de participation des acteurs concernés aux décisions ayant des enjeux mondiaux ; le manque d’incitations à produire les BCIM ; le décalage entre la nature mondiale des problèmes et les compétences territoriales des Etats.

Néanmoins, quelles que soient les modalités de production de BCIM, un principe est fondamental à toute réflexion pertinente sur ces questions : la justice mondiale. L’explication est que la divergence des priorités affectant la hiérarchisation de ces biens fait que tous n’accordent pas la même importance à un BCI/M 29 . Les populations du Sud pourraient apprécier davantage la lutte contre le VIH/Sida et considérer cette tâche comme prioritaire ; tandis qu’un financier occidental accorderait plus de valeur à la stabilité financière internationale. Le principe de la justice mondiale permet ainsi de concilier les différentes exigences des nations et de soutenir un programme fiable et équitable de promotion de BCIM 30 .

Pour mieux appréhender ces questions, des approches théoriques relatives aux BCIM seraient d’une grande utilité. Deux conceptions majeures s’opposent sur l’intérêt de l’action collective internationale comme moyen de gérer les crises internationales et de garantir des intérêts collectifs mondiaux. L’approche néoclassique ou économique qui stipule que l’action internationale n’est pas nécessaire et que les forces du marché garantiraient spontanément l’apparition des normes collectives là où elles sont nécessaires. La concurrence entre les entreprises et les différentes communautés garantira la prééminence du cadre juridique le plus favorable au niveau mondial. A cette pensée, s’oppose l’approche de la nouvelle économie politique internationale qui soutient que les rapports de force, les déséquilibres mondiaux et les défaillances du marché appellent une forme d’intervention publique dans un cadre concerté impliquant tous les acteurs étatiques.

Sans nier ou affirmer ni l’une ou l’autre, nous tenterons de concilier les deux approches, en considérant qu’en temps normal, le marché pourrait fonctionner normalement au point de ne pas avoir d’intervention collective ; mais en cas de dysfonctionnements majeurs ou d’existence d’externalités, l’absence de cadre international pourrait apparaître comme une source de problèmes. Or, tel est souvent le cas des BCIM où chacun prend conscience que, à l’ère de la mondialisation, une résolution laxiste d’un pays, faisant supporter ses coûts (sociaux, économiques ou écologique) par les autres, est non seulement inéquitable, mais également inefficace, et que la réponse aux intérêts nationaux passe de plus en plus par la réalisation d’objectifs communs et par l’action collective internationale. Les concepts de BCIM répondent ainsi aux dysfonctionnements qu’a révélés au niveau planétaire l’analyse de la mondialisation économique et financière, et que la théorie économique avait déjà identifiés au niveau national. A aucun de ces deux niveaux, le marché n’est donc capable de fournir de façon optimale les sources indispensables à la richesse collective, au bien-être des populations, ainsi qu’à la fourniture de BCIM.

Notes
8.

Dans ses travaux sur ces questions, le PNUD (1999) propose une nouvelle approche globale des crises mondiales (crises financières, urgences humanitaires, réchauffement climatique, maladies ravageuses,...), qu’elle considère comme des maux publics mondiaux, résultats de problèmes qui dépassent les frontières nationales.

9.

L’accent sera mis ultérieurement, dans cette introduction générale, sur le choix des IFI pour cette tâche (voir p. 10).

10.

Il est tout de même surprenant de constater que peu d’études étaient jusqu’à présent faites sur ce sujet, notamment sur ce que sont réellement les BCIM et peu de tentatives en dressent une typologie. Toutefois, depuis quelques années, cette réalité a tendance à s’inverser, notamment avec les récents ouvrages collectifs du PNUD, dirigés par Kaul and al (1999, 2003, 2006), qui font suite au travail pionnier de Kindleberger (1986). Cf. bibliographie générale.

11.

La première théorie qui explicite les BCI remonte, à notre connaissance à Kindleberger (1986) avec la publication de son article intitulé « International Public Goods Without International Government ». Toutefois, certaines approches théoriques portant sur l’action collective, telles que The Economics of Welfare de Pigou (1920), traitaient le problème des externalités et pouvaient s’appliquer implicitement à la notion de BCI. De même, les travaux de Hardin (1968) et de Russet et Sullivan (1971) comportaient une réflexion portant globalement sur ces questions.

12.

Sur la théorie des régimes internationaux, voir Keohane, 1984 ; Krasner, 1986, Gilpin, 1987 ; Mayer, Rittberger et Zurn, 1993 ; la Brookings institution, 1994 - 1998.

13.

Nous faisons fi des débats dont a fait l’objet le terme « bien » en science économique, opposant, par exemple, « biens » matériels et « biens » au sens de jugement de valeur,... ainsi que des interprétations philosophiques dans ce domaine impliquant des principes d’équité.

14.

Certes, les termes « public » et « collectif » sont synonymes, mais le premier a une connotation « étatique » et laisse souvent penser aux actions produites par les pouvoirs publics sans référence à la nature du bien. Alors que les pouvoirs publics produisent également des biens privés ; ce qui pourrait prêter à équivoque. C’est la raison pour laquelle le deuxième terme aura notre préférence dans cette étude. En plus, il a tendance à signaler le caractère collectif du bien, notamment dans son utilisation et la répartition de ces avantages.

15.

Il remarquait en fait que certaines tâches n’étaient pas rentables à produire par un seul individu mais le seraient pourtant pour la société dans son ensemble.

16.

Cette définition est un alliage d’un ensemble de définitions de biens collectifs dans la littérature économique et dont la plupart se réfèrent à celle de Samuelson (1954).

17.

A signaler que les économistes présentent les dépenses militaires comme le bien collectif national utile par excellence. Pourtant, l’ensemble des dépenses militaires mondiales peut aussi être présenté comme un bien collectif international indésirable, au contraire de la sécurité internationale et de la paix globale, qui sont directement utiles à l’ensemble des nations. Ce qui révèle la complexité de ces notions.

18.

Nous distinguons les biens collectifs internationaux (BCI) de biens collectifs mondiaux (BCM) par le fait que les premiers ont un caractère interétatique, impliquant davantage des entités institutionnelles (gouvernements, marché, institutions nationales et internationales, etc.) ; c’est le cas de la stabilité financière internationale. Tandis que les seconds semblent plus globaux et concernent toutes les populations, voire les générations futures ; c’est l’exemple de la stabilité climatique globale ou de la préservation de l’environnement global.

19.

Force est de constater que cette définition conduit à privilégier le rôle de la société civile pour déterminer la question de BCIM. En effet, selon cette conception, les BCIM devraient refléter la conscience collective des citoyens de part le monde de l’existence des droits fondamentaux universels et inaliénables. D’autres définitions mettent en avant des visions, considérant que ces biens se construisent au cœur des luttes d’intérêts entre puissances.

20.

Notamment avec Mendez (1992), Stiglitz (1995), Sandler (1997), Kaul et al (1999).

21.

Auquel cas on parle de « maux collectifs ». Les marchés sont souvent organisés d’une manière telle qu’ils ne prennent pas spontanément en compte ces externalités. Ainsi, une pollution (externalité négative), émise par une firme et qui résulte de la production d’un bien privé, échappe au mécanisme décentralisé des prix, reflétant des défaillances du marché. Il s’ensuit un coût supporté par la collectivité réduisant ainsi le bien-être social. Pour corriger ces défaillances, les pouvoirs publics peuvent faire en sorte que ces coûts soient internalisés à l’aide d’instruments réglementaires ou économiques adéquats. L’internalisation des effets externes permet alors de contribuer au renforcement du bien-être social global.

22.

Par acteurs de la société civile, on entend un vaste ensemble d’associations et de réseaux, notamment les organisations communautaires, les organisations non gouvernementales (ONG), les associations d’entreprises et les groupes de réflexion, les mouvements sociaux, les organisations religieuses, les mouvements pour les droits des femmes, les mouvements de collectivités locales, ainsi que les organisations bénévoles.

23.

Cf. Hirshleifer (1983).

24.

Le précepte de l’APD pourrait d’ailleurs être re-légitimé par la conception de BCIM, autrement que par des justificatifs de solidarité ou d’éthique. L’APD serait alors comprise comme un des instruments de gestion des rapports Nord-Sud liés au processus de mondialisation. Dans cette logique, elle devient en fait la contribution des pays industrialisés à la production par les pays du Sud de BCIM.

25.

En témoignent les tracasseries qui enserrent l’application du protocole de Kyoto. Ratifié par 141 pays, ce protocole est officiellement entré en vigueur en février 2005. Son objectif : imposer à trente pays industrialisés de réduire de 5,2% leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici A 2012. Aujourd'hui l’objectif est très loin d’être atteint. Selon l’Onu, l’Europe n’a baissé ses émissions que de deux points et demi. Premier pays émetteur de gaz à effet de serre, les Etats-Unis qui se sont retirés du protocole en 2001, ont augmenté leurs rejets de plus de 12%.

26.

Nous emploierons indistinctement les termes « produire », « fournir », « garantir »,... qui nous semblent parfaitement synonymes.

27.

Nous tenons à préciser que la « fourniture » de BCIM peut impliquer soit la « production » soit le « financement » selon la nature de biens. Ainsi, le terme « production » convient lorsque la fourniture d’un BCI/M ne requiert pas un apport financier (tels que la stabilité financière internationale) mais plutôt la réglementation ou le changement d’attitudes ou de comportements,... En revanche, le terme « financement » est employé dans le cas inverse, comme dans la lutte contre la propagation de certaines maladies infectieuses.

28.

Dans ce domaine, les cadres multiples, créateurs d’incertitude, peuvent engendrer des coûts énormes lors des transactions internationales (livraison de titres, investissements à l’étranger). En outre, la multiplicité des interactions signifie qu’il y aura inévitablement des externalités, le cadre juridique d’une autorité gouvernementale ayant des implications sur les autres.

29.

Signalons que la formule « BCI/M » indique « bien collectif international ou mondial ».

30.

Cf. Kaul (2005).