Les obstacles majeurs qui contrarient la coopération internationale et l’action collective nécessaires dans la production optimale de BCIM ont conduit certains analystes à envisager le renforcement des institutions internationales afin de leur confier la tâche de résoudre les questions globales et de fournir ces biens. Cette réflexion prévoit que les institutions internationales pourraient pallier l’absence sur le plan international d’une autorité gouvernementale, capable de disposer les objectifs et priorités de tous les Etats, permettant de favoriser la fourniture optimale de BCIM. Elles s’emploieraient en effet à ériger un cadre multilatéral de négociations et à éviter des tendances discrétionnaires qui seraient dommageables au bien-être mondial.
Cette démarche consiste à dresser un cadre de consensus, dans le respect des souverainetés, à travers la délégation des pouvoirs étatiques à des institutions supranationales, qui, dotées des pouvoirs légitimes, se chargeraient de l’application et du suivi des règles et des décisions collectivement définies, se rapportant aux BCIM. Il s’agit en fait d’envisager une production centralisée de ces biens à l’échelle internationale, contrôlée par des institutions internationales et ce, selon la nature de chaque BCI/M 258 .
En réalité, il y a plusieurs exemples d’institutions internationales variant d’organisations mondiales gouvernementales (telles que le FMI, la BM, l’AFD,...) aux organisations internationales non gouvernementales (telles que Oxfam, Secours catholique,...), se distinguant également selon le nombre et la nature d’adhérents (Etats, acteurs de la société civile,...), qui interviennent sur divers domaines en rapport avec les BCIM. Notre étude porte essentiellement sur celles qui comprennent plusieurs nations et qui ont pour mandat de participer activement à la conception, la mise en œuvre et à la surveillance des mesures économiques susceptibles d’avoir des ramifications internationales. Plus précisément, il s’agit des institutions économiques et financières internationales (telles que le FMI, la Banque mondiale, l’OMC,...), qui suivent étroitement des évolutions de politiques économiques et accomplissent des missions, pouvant converger les préférences de plusieurs nations et consolider l’action collective internationale, dans le but de contribuer à l’amélioration du bien-être mondial. Au-demeurant, cette tâche constitue depuis longtemps l’activité centrale de plusieurs IFI.
Ainsi, la principale question qui attirera notre attention est la suivante : comment les institutions internationales pourraient-elle amener l’ensemble des acteurs (Etats) à régir de concert des problèmes mondiaux dont ils ont des définitions différentes et qui ne les intéressent pas au même degré ? Formulée autrement, la question de savoir si les institutions internationales, notamment les IFI, sont à même d’engager un processus de convergence et de faire évoluer la perception que les différents Etats peuvent avoir de la résolution et de l’utilité des BCIM.
Nous tenterons de répondre à cette question à la lumière des approches théoriques et des études empiriques qui abordent le rôle des institutions internationales pour la gestion des problèmes globaux – en insistant sur le cas des IFI (2.1). Il s’agira ensuite d’examiner les limites de cette approche de délégation des pouvoirs étatiques ainsi que les obstacles aux bons fonctionnements de ces institutions en faveur d’une production optimale de BCIM (2.2).
Certesla plupart des institutions internationales étaient destinées à garantir des objectifs communs, mais l’idée d’assigner la production de BCIM aux institutions (financières) internationales est ravivée par Stiglitz (1998a) ; op. cit. Rappelons que notre étude s’inspire au demeurant de son article phare sur la question : "International Financial Institutions and the Provision of International Public Goods".