Les problèmes globaux, tels qu’ils sont perçus objectivement de nos jours, ravivent le débat sur la nécessité d’une action collective internationale dans des très nombreux domaines. Pourtant ces problèmes, dont la résolution se résume à des actions de fourniture de BCIM, sont plus que jamais saisissants et comportent des risques majeurs, économiques, sociaux, environnementaux, sanitaires, pour l’ensemble de la planète.
Les approches relatives aux BCIM apportent une contribution significative à la compréhension du phénomène des crises, qui ébranlent l’économie mondiale, et mettent en exergue la nécessité d’une action collective pour les résoudre. Toutefois, elles ne permettent pas d’identifier les moyens pour réaliser cette action collective. Car, toute action collective – au niveau local, national et international – est confrontée à des sérieux problèmes de décision qui affectent profondément le processus de négociations, qui est la clef de voûte pour résoudre ces questions mondiales. La question de souverainetés étatiques venant complexifier davantage la situation, toute évolution dans le processus de fourniture de BCIM dépendra de l’acceptation des Etats-nations de nouveaux abandons de souveraineté. Or ces Etats semblent plus que jamais réticents à de tels renoncements, d’autant plus qu’ils ne s’accordent pas sur la détermination et la hiérarchisation de ces biens. D’où la difficulté d’engager tous les Etats de la communauté internationale dans un processus de production efficace de BCIM.
A cet égard, la théorie de la coopération internationale apporte une contribution significative : elle a permis de dévoiler la fragilité de l’état des relations internationales et de l’organisation des pouvoirs politiques et de révéler la nécessité de reconsidérer le fonctionnement du système actuel. Face à l’ampleur de la tâche, les positions morales ou doctrinales sont d’une faible utilité. C’est par la pratique et en s’appuyant sur des dynamiques existantes que la question de la production de BCIM pourra avancer. Dans cette perspective, les institutions internationales peuvent représenter une force importante pour rendre cette tâche à la fois accessible et plus probable. Mais pour répondre effectivement à ces besoins, elles se doivent d’évoluer aussi bien dans leur mode de fonctionnement que dans la façon dont elles gèrent les interdépendances croissantes observables dans le mouvement de la mondialisation.
L’approche de la gouvernance mondiale semble constituer une réponse pertinente à ces exigences d’évolution. En effet, elle révèle que le rôle déterminant des institutions internationales en matière de production de BCIM appelle d’abord une réforme institutionnelle interne : associer les institutions nationales, les organiser autour des débats internationaux afin qu’elles puissent influer sur les comportements internes et facilitent la prise de décision internationale, est un facteur de légitimité important pour l’action collective internationale. D’un autre côté, elle enseigne que la production optimale de BCIM requiert la flexibilité sur les dispositifs, les procédures de coopération et la nature de partenariats à ériger ; ce qui implique de croiser, de métisser les approches incitatives et prospectives, militantes et scientifiques dans le processus de production de BCIM. Cela suppose également une mise en cohérence des politiques publiques nationales et internationales, un lien entre l’unilatéralisme, le bilatéralisme, le régionalisme et le multilatéralisme ainsi qu’une mobilisation et une concertation des différents pouvoirs publics, des institutions internationales (notamment des IFI), de la société civile et du secteur privé.
Notre étude paréed’exemples, dans cette partie, a ainsi prouvé que quels que soient les avantages de la coopération internationale, soutenue par les mérites des institutions internationales, elle ne limite en rien les autres initiatives ; tant s’en faut, elle doit déboucher sur un autre type de collaboration entre tous les acteurs de la politique mondiale (Etats-nations, institutions internationales et régionales, organisations de la société civile, firmes transnationales,...). Ainsi, ces stratégies permettent de dépasser quelque peu les défaillances des relations internationales et de recenser des succès, mais aucune ne semble décisive si beaucoup d’autres interfèrent dans le sens opposé. De même, elle a permis d’édifier la portée de la contribution de chacun de ces acteurs. D’abord, les Etats-nations restent l’horizon de la régulation politique, permettant de légitimer la gouvernance mondiale qui commande la production optimale de BCIM. Car, au-delà des efforts réglementaires, matériels et financiers, les engagements étatiques devraient déboucher sur des renoncements des pouvoirs et des prérogatives au sein des institutions internationales (notamment le FMI, la Banque mondiale, l’OMC) afin de promouvoir la régulation de la mondialisation, conduisant à une gouvernance mondiale satisfaisante. Ce qui met en filigrane le rôle déterminant des institutions internationales en matière de production de BCIM. Ainsi, la potentialité de la production de BCIM par les IFI s’explique par le fait que ces institutions constituent les cadres globaux idéaux deconcertation et d’harmonisation de politiques, où se matérialisent les engagements collectifs en faveur de ces biens, permettant de concrétiser l’action collective internationale nécessaire. En fait, nonobstant des contestations et critiques – souvent bien fondées –, nous estimons que les institutions internationales globalement, et les IFI en particulier, sont indispensables pour surveiller l’application des règles dont se dote la communauté internationale, et leur caractère permanent pourrait être un atout qui inspirerait la stabilité et l’équilibre en relations internationales. D’ailleurs, comment concevoir une meilleure régulation de la mondialisation et une réelle gouvernance mondiale sans la coopération et les institutions supranationales qui l’instituent et la fortifient ? En outre, il est admis que toutes les questions mondiales relèvent d’ores et déjà – directement ou indirectement – de la responsabilité des institutions internationales, créées ou converties à cet effet, et les problèmes de défaillances concernent plutôt les statuts et modes de fonctionnements de ces institutions, dus aux vicissitudes politiques des Etats-nations. Cependant, les espoirs de la communauté internationale portés sur les IFI pour résoudre les problèmes bien réels de la production de BCIM devraient s’aligner sur les recommandations et les propositions allant dans le sens de réformer les institutions de BW, qui sont en charge de la gestion de l’économie mondiale, de l’OMC garant de la régulation (ou de la dérégulation ?) des échanges mondiaux, de l’ONU et de son Conseil de sécurité afin de garantir la paix et la sécurité mondiales, etc. Quant à la nature de la contribution de la société civile, étant donné que l’incitation constitue un instrument fiable pour garantir l’implication des acteurs en matière de fourniture de BCIM, il s’agit pour cette catégorie d’acteurs de dépasser le stade de la contestation et de l’outrance pour proposer une nouvelle vision du système mondial où la production de BCIM sera admise comme alternative dans la résolution des problèmes mondiaux.
Ces conclusions peuvent paraître vagues et ouvrent la voie à d’autres questions. Au nombre de celles-ci figure en bonne place la suivante : étant donné que l’évolution est une chose et le passage de la théorie à l’acte en est une autre, les institutions financières internationales sont-elles réellement à même de relever les défis du troisième millénaire, en l’occurrence la production de BCIM, en constituant la base d’une gouvernance mondiale légitime, efficace et équitable ?
La deuxième phase de notre étude vise ainsi à répondre à cette question, à l’aide des examens qui se veulent pratiques, portant sur deux thèmes liés à la plupart des questions mondiales préoccupantes de nos jours, et engageant deux institutions financières internationale ; il s’agit d’examiner la capacité du FMI à garantir la stabilité financière internationale et celle de la Banque mondiale à éradiquer le double fléau du sous-développement et de la pauvreté internationale.