Section 3. Vers une vision globale de la lutte contre la pauvreté internationale

Les sections précédentes portant sur l’analyse internationale de la pauvreté et sur les failles dans les stratégies de la BM ne devraient nullement inciter au pessimisme quant aux perspectives des pays pauvres et à l’ambition de vaincre le sous-développement et la pauvreté au niveau mondial. Il s’agissait en fait d’éprouver les approches en termes de BCIM et d’exploiter leurs apports pour mieux définir les politiques internationales à mettre en oeuvre pour promouvoir le développement global et la réduction de la pauvreté internationale.

Ainsi, partant du caractère de BCM que revêtent ces phénomènes et de l’hypothèse de l’inexistence d’un gouvernement mondial capable d’assumer la tâche de les garantir, nous avançons que cette tâche n’est réalisable que dans un cadre multilatéral et pluraliste, formulé par les IFI et adossé par les autres acteurs de la communauté du développement 966 (Etats-nations, société civile,...) et fondé sur la solidarité et l’équité internationales 967 . Cette vision repose sur une approche holistique de la lutte contre la pauvreté internationale, reconnaissant l’importance des fondamentaux macroéconomiques, mais qui accorde le même poids aux éléments institutionnels, structurels et sociaux qui sous-tendent une saine économie de marché. Elle met l’accent sur l’établissement de partenariats solides entre les différents acteurs intervenant dans le cadre de leurs plans d’activité respectifs, forgeant l’action collective internationale nécessaire à l’éradication de la pauvreté.

Cette action collective internationale pourrait concerner trois dimensions stratégiques : lesrelations économiques internationales ; l’apport des ressources nécessaires au financement du développement ; et des apports réels en termes d’infrastructures de développement ; telles que décrites par le schéma ci-dessous :

Schéma introductif

Acteurs
Domaines
Gouvernance mondiale et échanges commerciaux Ressources financières Actions concrètes et infrastructures de développement
Etats-nations (3.1)
** Annulation des subventions agricoles..
** Promotion de l’accès des produits des pays du Sud aux marchés occidentaux..
** Renforcement de l’intégration commerciale entre pays du Sud..
** Accroître le montant et l’efficacité de l’APD.. ** Plan Marshall mondial...
Institutions financières internationales
(3.2)
** Harmonisation de la libéralisation économique mondiale..
** Actions pour atténuer les conséquences de la libéralisation pour les économies pauvres..
** Egaliser les gains des marchés financiers internationaux en faveur de la lutte contre la pauvreté..
** Dénouer la crise de l’endettement international...
** Promotion des actions concrètes des BMD..
Société civile (dont entreprises privées)
(3.3)
** Intervention des acteurs de la civile dans la gouvernance mondiale..
** Commerce équitable..
** Systèmes de micro-crédits..
** Coopération décentralisée

Ces préceptes excluent toutes les formes d’actions ayant pour effet d’accroître la dépendance des pays du Sud envers les pays du Nord. C’est en fait un appel au sens de la responsabilité collective de l’humanité toute entière et l’engagement effectif des tous les acteurs est requis pour réussir la tâche. Car, - nous l’avons signalé – le développement et l’éradication de la pauvreté constituent le type de BCM dont la fourniture efficiente exige un soutien aux « maillons » faibles dans le processus. Ce qui se recoupe avec l’idée de ceux qui estiment que « la vraie question dans la régulation de la mondialisation est de savoir comment tirer les pays pauvres "vers le haut" et amorcer leur décollage économique, selon des modalités susceptibles d’accroître leurs chances de développement » 968 .

Enfin, nous appliquerons les approches en termes de BCIM pour évaluer la pertinence de chaque instrument proposé en analysant : son bien-fondé vis-à-vis de la doctrine du marché, la nécessité de l’action collective internationale pour sa mise en oeuvre et la dimension global de ses avantages en termes de réduction de la pauvreté.

Notes
966.

Plus important encore, les pays concernés sont aux commandes, en ce sens qu’ils maîtrisent et orientent à la fois l’ordre du jour du développement..

967.

Rappelons que le caractère de BCM assigné au développement global et à la réduction de la pauvreté les répertorie parmi la catégorie dont la fourniture optimale exige le soutien aux maillons faibles du réseau au nom de la solidarité.

968.

Cf. Chavagneux, 2005.