CONCLUSION GÉNÉRALE

Au terme de cette étude, nous signalons au préalable que la complexité et la profondeur du thème, ainsi que la nature de la démarche adoptée, nous imposent une certaine humilité pour ne pas prétendre avoir trouvé les solutions idéales aux problèmes de la production de BCIM. De ce fait, nous nous contenterons de synthétiser nos résultats pour répondre aux problématiques que nous nous sommes posées dès le départ, et étaierons nos réponses par les résultats de la partie empirique.

D’abord, sur la portée de concepts de BCIM comme instrument permettant la perception des problèmes mondiaux, le bouleversement qu’ils suscitent ainsi que la nécessité d’agir collectivement pour les résoudre, notre analyse, partant de phénomènes de la mondialisation et des externalités, a souligné l’existence de problèmes dépassant les frontières nationales et soutenu la réalité de la notion de « maux collectifs internationaux », qui indiquent le caractère contagieux des conséquences néfastes de ces problèmes mondiaux. De même, l’observation de l’impuissance des mesures nationales face à certains problèmes mondiaux et de la nécessité d’un cadre global de prévention et de gestion des crises, donc de défendre des objectifs et intérêts communs globaux, a mis en évidence la reconnaissance et l’importance des concepts de BCIM 1161 . Au demeurant, réfuter cette évidence pourrait équivaloir à ignorer la réalité et la portée de la mondialisation et, au-delà remettre en cause l’appartenance à un monde commun.

Dans le domaine de la finance mondiale, les crises financières apparaissent comme les conséquences du mauvais fonctionnement des marchés financiers et leur caractère contagieux a révélé l’intérêt de la stabilité financière internationale. De la même manière, les conséquences de la pauvreté sur l’environnement global et les ressources naturelles ont légitimé le soutien aux pays pauvres pour accroître le bien-être mondial 1162 . Les concepts de BCIM apparaissent ainsi comme des symboles fédérateurs, susceptible d’intégrer à la fois les préoccupations de tous les pays, ceux du Nord comme du Sud.

Cependant, on s’aperçoit que s’il existe une prise de conscience générale de l’intérêt de ces biens, leur détermination, leur hiérarchisation ainsi que les instruments nécessaires pour leur production font de plus en plus l’objet de controverses au niveau mondial. Les concepts de BCIM recèlent en effet, sous une apparence de clarté et d’évidence, une grande diversité de préoccupation, parfois contradictoires, selon la nature des acteurs et de leurs intérêts. Ce qui serait à l’origine de la sous-production de plusieurs BCIM et donc des crises internationales. Le caractère moins pressant de la lutte contre la pauvreté internationale pour les pays riches affectera sans doute la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement 1163 . De même, nous avons démontré que la stabilité financière internationale n’est une question mondiale que par ricochets, à travers les conséquences de l’instabilité financière et des crises systémiques sur les économies des PED&E, qui pourraient accessoirement affecter les économies industrialisées, par les canaux de la mondialisation. Cette situation pourrait également contrarier de réels engagements en faveur du bon fonctionnement des marchés financiers internationaux et l’adoption des mesures globales appropriées pour ce faire.

Ainsi, aujourd’hui, plus que le manque de consensus sur la détermination et la hiérarchisation de BCIM, c’est l’absence de consensus sur les modalités de fourniture de ces biens qui semble inquiétante. Cela nous ramène à la deuxième réponse concernant les moyens de concevoir des politiques et stratégies viables et de portée générale qui garantiraient une production optimale de BCIM en l’absence d’un gouvernement international.

Les approches théoriques relatives aux BCIM ont été d’une grande utilité pour dépasser cette impasse. D’abord, en opposant l’approche néoclassique relative aux BCIM à celle de la nouvelle économie politique internationale, nous avons pu dégager un cadre cohérent, se voulant hybride et faisant état de l’intérêt des interventions publiques et de l’action collective internationale pour fournir les BCIM. On s’aperçoit en effet que certaines questions mondiales ne peuvent trouver leurs solutions qu’à l’échelle mondiale et que pour certains biens à caractère mondial, l’action collective au niveau mondial est un aspect essentiel de leur production. Ainsi, il est avéré que dans le domaine de la finance mondiale, des politiques nationales non coopératives de stabilité financière ne différeraient guère d’une absence totale de politiques ; car la stabilité financière internationale comme BCI dépend de la somme des actions de chaque pays et nécessite donc la coordination entre le maximum de pays dans ce domaine. Toute défaillance de celle-ci équivaut à une situation sous-optimale vulnérable aux crises financières internationales. De plus, la lutte contre certaines maladies infectieuses (telles que le VIH/sida) transcende inévitablement les frontières. La recherche fondamentale sur le sida soulève nécessairement la question de l’action collective au niveau mondial, parce qu’aucun pays ne peut (ou ne veut ?) à lui seul assumer les coûts de la recherche et du développement à un niveau efficace, faute de moyens et/ou d’incitations.

Par ailleurs, en l’absence d’un gouvernement mondial, les moyens et mécanismes pour fournir les BCIM demeurent vagues, car ils s’attachent aux aléas de l’action collective internationale, qui est confrontée à des sérieux problèmes de décisions et de défaut d’incitations. Ainsi, se pose la question de la coordination des objectifs, des préférences et des politiques publiques pour une production optimale de BCIM.

Les approches "contemporaines" de la production de BCIM apportent un éclairage fort utile à cette problématique. Notre étude avance trois approches théoriques, plus complémentaires que substituables, qui facilitent la conception des politiques et des stratégies globales, une coordination de ces politiques et une coopération accrue, non pas entre deux ou plusieurs Etats, mais au niveau mondial, permettant des avancées en matière de production de BCIM. Elles partent du principe que les problèmes globaux exigent des réponses globales et tirent fondement de plusieurs sources : politique – car la pérennité des Etats en dépend – ; économique – que justifie la logique de la rationalité – et social – car le principe d’équité s’impose, que renforce l’émergence d’une « citoyenneté internationale ».

D’abord, l’approche de la coopération internationale a révélé qu’une relation dynamique entre Etats, unis par une motivation et une vision communes, et ayant pour but de planifier et de réaliser ensemble des objectifs clairement définis et acceptés, constitue une posture rationnelle et globalement bénéfique. C’est un moyen efficace de partage des coûts d’une initiative commune internationale, de garantir la contribution de tous les acteurs à l’entreprise commune et de réaliser des économies d’échelle et d’envergures. La coopération internationale a été et demeure dans certaines circonstances un instrument fiable de résolution des problèmes mondiaux et le moyen de garantir des objectifs communs globaux. Ainsi, en matière de stabilité financière internationale, les efforts pour le bon fonctionnement du SFI sont voués à l’échec dans une coordination efficace de prévention et de gestion des crises financières. Par exemple, les CAC qui constituent désormais un instrument alternatif de gestion de la crise de la dette a pour socle la coopération entre tous les partis. De même, en matière de la promotion du développement et de la lutte contre la pauvreté internationale, il est évident que la réalisation des OMD est fondée sur un partenariat mondial pour le développement, un financement global, dont l’efficacité dépend du degré de la coordination entre les partenaires du développement.

Les limites de la coopération internationales ne sont pas occultées par ses avantages dans notre étude. La coopération internationale a jusqu’à présent été essentiellement un processus intergouvernemental, fondé sur l’établissement de règles régissant les rapports entre pays et les questions transfrontières. Or, nous avons vu que des préoccupations et intérêts nationaux, des questions de souveraineté et de subsidiarité, des positions morales ou doctrinales viennent souvent saper la participation des Etats au processus mondial de production de BCIM.

Dans le domaine de la finance mondiale, l’unification des systèmes monétaires, à travers l’usage d’une unité de compte commune, susceptible de remédier à maints déséquilibres financiers, est loin d’acquérir un aval politique des Etats, sous prétexte des principes de souveraineté, d’objectivité ou de réalisme. En matière de lutte contre la pauvreté internationale, les contraintes liées au principe du développement durable lui ôtent son acuité et son caractère pressant ; même si les problèmes qu’il s’attache à résoudre sont toujours aussi présents et comportent des risques majeurs, économiques, sociaux et environnementaux, pour l’ensemble de la planète.

Ce qui nous a conduit à examiner la réflexion sur la délégation de pouvoirs de la part des Etats-nations à des institutions internationales comme moyen de bâtir des cadres d’actions collectives au niveau mondial, permettant de dépasser le blocage du processus intergouvernemental et la panne des négociations en matière de production de BCIM. L’approche institutionnaliste n’est pas totalement substituable à celle de la coopération internationale. C’est un mécanisme qui vise à consolider et légitimer cette coopération, la situer dans un cadre normatif et plus universel. Les conventions internationales les plus largement ratifiées sous l’égide des institutions internationales confirment la capacité des institutions internationale à dicter des règles et des normes de portée générale, portant sur des questions mondiales et visant à correspondre les stratégies globales aux préférences fondamentales exprimées par la communauté des nations. L’objectif du FMI est de résoudre l’incertitude en matière de stabilité financière internationale et d’augmenter la probabilité de l’action collective internationale dans ce domaine. De son côté, la Banque mondiale apparaît comme une source inépuisable d’informations et d’expériences sur les questions du développement, permettant de rationaliser les actions globales de lutte contre la pauvreté internationale.

Cependant, les limites de l’approche de la coopération sont les mêmes qui entravent les actions des institutions internationales en matière de production de BCIM, à savoir les divergences d’intérêts et des visions des Etats, corrélées au manque de consensus sur à la fois sur la détermination des BCIM et sur la nature d’action collective internationale à ériger pour résoudre les problèmes mondiaux et produire les BCIM. Autrement dit, les défaillances dans les actions des institutions internationales en matière de production de BCIM, sont les résultats du manque de volonté politique des Etats en faveur d’une résolution mondiale de certaines questions globales. Si bien qu’on constate que le bilan de plusieurs années de mobilisation internationale semble fort mince au point parfois de s’interroger sur l’utilité des institutions internationales 1164 . Dans l’ordre international actuel, celles-ci, dans la plupart des cas, n’ont réellement pas de pouvoirs supranationaux permettant de concevoir l’action collective internationale qui commande la fourniture de BCIM. La souveraineté réside encore dans les Etats-nations ; et ces derniers sont encore réticents à des abandons de cette souveraineté et pourraient opposer des obstacles à toute avancée institutionnelle susceptible de trop remettre en cause leur autonomie de décision. Ce qui contrarie fortement l’effectivité de l’option institutionnaliste comme moyen de produire les BCIM.

Le FMI a, par exemple, été incapable d’associer réellement le secteur privé dans la résolution des crises financières internationales, avec le rejet de son projet de « loi de faillite pour les Etats souverains » 1165 . De la même, on s’est aperçu qu’à travers le consensus de Washington, la Banque mondiale privilégie les mécanismes du marché en matière de lutte contre la pauvreté internationale, alors la nature de cette tâche ne cadre pas avec la primauté du marché 1166 .

Ainsi, l’ampleur de la tâche et le constat commun du relatif échec des IFI ont amené à s’interroger sur la nécessité de repenser les procédures de production de BCIM et d’envisager d’autres concours face aux défis mondiaux. L’approche de la gouvernance mondiale nous a permis de dépasser le stade jusqu’alors atteint – à notre connaissance – par les réflexions sur les mécanismes internationaux appropriés pour résoudre les questions mondiales et produire les BCIM, notamment avec la proposition de Stiglitz (1998).  Elle nous a ainsi permis d’apporter des éléments de réponses à la problématique sur les moyens de forger un consensus théorique, à la lumière des faits concrets, capable de déboucher sur des prescriptions réelles en faveur de l’action collective internationale nécessaire à la production de BCIM.

On pourrait considérer que cette approche est une réponse issue du débat intensif et récurrent entre une vision de l’ordre mondial fondée sur les rapports de force et l’exercice de la puissance et celle plaidant pour un ordre international bâti sur des règles collectivement négociées et équitablement appliquées pour atteindre des objectifs communs. Elle considère en effet que l’ordre international actuel, fondé sur des relations entre Etats souverains, n’est pas en mesure de relever les défis du monde actuel et qu’il pâtit de plus d’un défaut de légitimité, en raison des modes de résolution inique de certaines questions mondiales.

Sur la question de la production de BCIM, nous avons vu qu’elle prône de créer des bases communes pour la régulation et la gestion des affaires mondiales et de mettre en priorité la poursuite d’objectifs communs, tout en restant flexible sur les dispositifs, les réseaux multiples, les modalités de coopération ou la nature des partenariats. La gouvernance mondiale repose sur le rôle déterminant des Etats-nations 1167 , mais transcende celui-ci en englobant les autres acteurs (institutions publiques internationales, société civile, secteur privé), renouvelant les méthodes de débat, de prise de décisions, de contrôle et de gestion, et créant un espace institutionnel approprié pour gérer les BCIM.

Ainsi, partant de l’apport de l’approche de la gouvernance mondiale, faisant état de la nécessité de réguler la mondialisation 1168 , de pallier l’incapacité des IFI à peser effectivement sur les réalités économiques et financières et leur évolution, de dépasser l’analyse des relations interétatiques et prendre acte de la diversité des acteurs de la scène internationale, afin de mieux résoudre les problèmes mondiaux, notre apport conceptuel a été de spécifier la responsabilité de chaque acteur dans l’action collective internationale qui commande la production optimale de BCIM. En effet, nous estimons que les Etats-nations constituent l’horizon de la régulation politique où s’engagent les efforts collectifs en matière de la production de ces biens 1169 . L’exemple en matière de la stabilité financière internationale souligne le poids politique dans la résolution globale visant à mieux réguler les flux des capitaux mondiaux, dont l’instabilité et la vivacité nuisent davantage aux économies émergentes ; c’est le cas également de la résolution en faveur d’une supervision internationale des parités et des régimes de changes, pouvant déboucher sur l’option d’une autorité monétaire internationale émettant une monnaie unique mondiale ou l’établissement d’un SMI coordonné, fondé sur la régionalisation. En matière de lutte contre la pauvreté internationale, la régulation du système mondial du commerce, le financement du développement et le soutien aux pays pauvres, avec un plan Marshall global, sont largement tributaires de la volonté politique des Etats les plus riches. En outre, les PED&E, en s’inspirant de l’exemple de la construction européenne, devraient rechercher dans une intégration de plus en plus poussée au sein d’ensembles plus vastes une zone de développement progressif et équilibré, afin de trouver leur place dans la mondialisation et construire leur parcours de croissance 1170 .

D’un autre côté, nous estimons que le rôle des institutions internationales serait de coordonner et de concrétiser les engagements collectifs pour la production de BCIM. Pour répondre au dernier questionnement concernant le rôle des IFI en matière de production de BCIM dans les domaines économique et financier, celles-ci, notamment le FMI et la Banque mondiale, devraient veiller à réguler la mondialisation économique et financière pour prétendre à internaliser les externalités qui s’y rattachent et créer les conditions favorables à la production de BCIM. Ainsi, pour garantir la stabilité financière internationale, le FMI devrait servir de cadre de coordination où se matérialiseraient les engagements collectifs en faveur d’une nouvelle architecture financière internationale et des politiques globales visant à réguler la mondialisation financière 1171 . La Banque mondiale, de son côté, devrait contribuer à créer les conditions d’une mondialisation économique juste et équitable, permettant de généraliser ses fruits – qui sont globalement certains, mais conditionnels 1172 – en s’attaquant aux revers de la libéralisation économique mondiale et de l’ouverture des marchés, et en favorisant l’intégration des pays pauvres à l’économie mondiale. Ce qui ne sera plausible qu’à la suite des réformes dans les structures et modes de fonctionnement des IFI, qui refléteraient en outre la volonté politique des Etats-nations à s’engager pour une gouvernance mondiale favorable à la production de BCIM 1173 . Ce sont en effet ces réformes qui pallieraient les défaillances des IFI et permettraient d’intégrer la question de la production de ces biens dans leur architecture. Autre exemple, les actions des banques multilatérales de développement en faveur des pays pauvres dépendent essentiellement des engagements étatiques pour la lutte contre la pauvreté internationale.

Nous présumons enfin que le rôle des acteurs de la société civile consiste à inciter et à impulser cette gouvernance mondiale, car les forces politiques en faveur du changement de l’ordre mondial ne sont spontanées. Leurs efforts en faveur de la régulation de la mondialisation contribueraient à la rationalisation des décisions globales sur des questions mondiales, favorisant la production de BCIM 1174 . Avec peu de succès, certes, des mouvements sociaux exhortent la régulation des mouvements de capitaux spéculatifs, la modération de la libéralisation financière, la résolution de la crise du surendettement international, etc. Dans le domaine de la lutte contre la pauvreté, la « société civile internationale » effectue des actions de sensibilisation, créant des cadres de dialogues et de consensus entre les partenaires du développement, et soutient la coopération et l’engagement universel en faveur du développement durable 1175 , du financement du développement, des actions concrètes en faveur des plus démunis : commerce équitable, système de microfinance, fonds des travailleurs migrants, coopération décentralisée, etc 1176 .

*

Ces réponses sont, évidemment, loin d’épuiser le sujet de la production de BCIM et ne sont pas exclusives d’actions des IFI pour le bien-être mondial, mais, d’une part, sur la base d’un autre angle d’analyse des problèmes mondiaux, elles apportent un argument de plus à la nécessité de réguler les relations économiques internationales pour défendre des intérêts plus globaux et plus justes ; ce que certains observateurs ou politiciens traduisent par la nécessité de donner « une dimension humaine à la mondialisation ».

D’autre part, elles ouvrent la voie à d’autres réflexions, parmi lesquelles : celle de savoir comment adapter les objectifs, structures et modes de fonctionnement des institutions internationales à la tâche globale de la production de BCIM. En l’occurrence, nous estimons judicieux de partir de l’interdépendance entre les divers BCIM et d’approfondir la réflexion sur l’interaction entre la stabilité financière internationale, le développement financier et économique et l’éradication de la pauvreté internationale 1177 afin d’envisager l’accommodement des structures et objectifs du FMI et de la Banque mondiale et leur harmonisation avec la résolution des problèmes économiques et financiers mondiaux, notamment le bon fonctionnement du SFI et l’éradication du sous-développement et de la pauvreté dans le monde. Plus précisément, on peut chercher à savoir si le recouvrement des aptitudes du Fonds et de la BM devrait conduire à envisager l’assignation de la double tâche de la stabilité financière internationale et de l’éradication de la pauvreté à une seule institution financière internationale, qu’il faudrait réformer ou créer en conséquence 1178

Notes
1161.

Rappelons à cet effet que les efforts des gouvernements paraissent de plus en plus centrés avant tout sur l’objectif de réduire les maux globaux plutôt que sur celui de produire les BCIM.

1162.

Ainsi, depuis le Sommet du Millénaire, en 2000, la communauté internationale s’est accordée un ensemble d’objectifs en matière de réduction de la pauvreté, de garantie des droits essentiels, de protection de l’environnement, reconnaissant ainsi l’importance et la nécessité de BCIM.

1163.

De plus, l’exploitation illégale et non transparente des ressources naturelles (forêts, ressources halieutiques) et leur importation par les pays occidentaux témoignent du laxisme global et de peu d’intérêt qu’on porte à cette question globale.

1164.

Par leur prédominance à la Banque mondiale et au FMI, les pays industrialisés peuvent influencer les orientations économiques mondiales affectant des régimes à l’extérieur de leurs frontières et des populations des pays pauvres dont la vie est directement, et souvent négativement, affectée par les politiques et les méthodes de ces institutions. Il suffit, par exemple, de voir la façon dont les stratégies d’aide aux pays pauvres des Etats-Unis et de l’UE s’alignent sur les positions des institutions de BW pour comprendre pour comprendre le degré de connivence entre eux.

1165.

Alors que cette tentative serait louable dans la mesure où elle reviendrait à sanctionner les affectations de capitaux peu pertinents et les comportements inconsidérés des créanciers ou des investisseurs. Elle correspondrait également à une régulation ex post des mouvements de capitaux et l’établissement d’un lien entre la croissance de la sphère financière et la sphère réelle, fruit éventuel de la mondialisation. Cf. Drouin (2001).

1166.

De même, le cycle de développement de Doha, piloté par l’OMC, censé mettre la libéralisation des échanges mondiaux au profit du décollage économique des pays du Sud et de la lutte contre la pauvreté, est toujours heurté aux réfutations des pays riches.

1167.

Qui demeurent encore les acteurs les plus puissants d’un système économique et politique mondial et les interventions publiques sont toujours nécessaires pour la résolution des problèmes mondiaux, même s’il est évident qu’elles doivent changer de forme.

1168.

A signaler ici que l’objectif n’est pas de rompre avec le capitalisme de marché mais, comme on le fait dans de nombreux pays, de le réguler. En fait, il faut reconnaître que la complexité des interactions entre l’économie mondiale et les politiques nationales rend le bilan de la mondialisation plus aléatoire. L’ouverture des frontières et l’intégration à l’économie mondiale accroissent les rendements potentiels dans divers secteurs, mais limitent aussi la capacité des gouvernements à protéger les citoyens ordinaires, notamment dans les pays où la prouesse exige des plans de restructuration, impliquant des réductions des dépenses internes (santé, éducation, subventions, etc.).

1169.

L’idée est que ce sont les Etats-nations qui ont l’autorité politique de régulation et peuvent jouer un rôle décisif dans ce domaine. Ainsi, Jacquet (2002) considère que le principal problème de l’économie internationale n’est pas économique mais politique et que le besoin de volonté politique pour repenser la coopération internationale est très net. De même, selon les termes du Président Mbeki, qui présidait l’UA : « Chaque jour, le processus de mondialisation souligne le grave déséquilibre dans la répartition du pouvoir mondial, et il est donc impératif que nous utilisions notre force collective pour parvenir à la restructuration et à la démocratisation des Nations Unies et des autres organisations multilatérales » ; propos tenus lors du 2ème Sommet Asie-Afrique, à Diakarta, en avril 2005.

1170.

En effet, l’Europe est un exemple de mondialisation réussie : les politiques structurelles de solidarité en direction des régions les moins développées ont augmenté leur potentiel de croissance, l’euro a permis de créer une stabilité monétaire préservée de l’inflation et des dévaluations compétitives.

1171.

Nous avons vu que l’une des clés de la stabilité financière internationale réside dans la convergence des systèmes nationaux, autour des normes internationales de haute qualité dans des domaines tels que les règles et le contrôle prudentiels, la meilleure restructuration des secteurs financiers, la bonne gestion des institutions et des entreprises, la comptabilité et la vérification des comptes, ainsi que différents aspects de la politique fiscale et monétaire. Or, les résolutions visant à encourager l’établissement de normes internationales manquent souvent d’exhaustivité et de coordination, et l’adoption de telles normes est trop souvent contrecarrée par une grave pénurie d’infrastructures et de capacités techniques permettant d’assurer leur application efficace dans les pays du Sud.

1172.

En cela qu’ils pourraient profiter davantage aux pays pauvres si l’on parvient à y corriger certaines importunités, qui font totalement partie de l’engrenage de la pauvreté internationale.

1173.

Ce qui devrait conduire à une meilleure représentation des Etats les plus pauvres dans les instances et négociations internationales.

1174.

Le rôle éminent dans ce domaine revenant aux ONG et à leurs réseaux transnationaux, qui sont dotés des capacités de diagnostic et d’élaboration de solutions dépassant celles des Etats ou les complétant de manière opportune.

1175.

Au-delà de l’efficacité des actions incitatives, ils assurent un système de surveillance crédible, permettant de vérifier que chaque acteur remplit sa part du contrat. C’est justement le cas dans le domaine du changement climatique, à l’origine du succès du protocole de Montréal (1987).

1176.

Il convient de relativiser la portée de cette proposition afin de ne pas tomber dans l’apologie altermondialiste, qui a tendance à reposer l’espoir des changements sur une prise de conscience collective que prétendent aiguillonner les mouvements sociaux. Notre tentative s’inscrit en fait dans une détermination scientifique, qui consiste à démonter la place de la société civile dans la fourniture de BCIM.

1177.

A noter que le sens de cette interaction n’est pas clair : le développement des marchés financiers des pays leur rapport-il de gains de croissance ou est-ce parce que les pays croissent et progressent rapidement qu’ils développement leurs marchés financiers ? Cf. Rajan and Zingales (1998); Guiso et al (2004).

1178.

Cette tentative trouvera une justification théorique dans la mise en évidence d’effets résultant des actions menées par une institution financière internationale sur les objectifs de politique économique d’une autre institution financière internationale. Cf. Boisson (2002).