Deuxième Partie : Figure, discours, énonciation

Introduction de la deuxième partie

Notre choix de faire une analyse figurative à la manière sémiotique dans le roman SSS, a buté dès le départ sur une difficulté par rapport à la compréhension du mot ‘figure’. Que désigne-t-elle exactement ?

L’ambiguïté de ce terme croisse pour nous de plus en plus lorsque nous voulons l’appliquer concrètement dans une analyse figurative d’un texte précis, car beaucoup parlent de ce mot mais il nous semble qu’il n’a pas forcément le même sens lorsqu’il est utilisé dans une analyse 173 . Cette ambiguïté nous invite à préciser l’usage que nous en ferons dans notre étude. L’objectif de cette deuxième partie est donc d’observer les divers usages du terme ‘Figure’, afin de le définir comme outil d’analyse pour la suite de notre travail.

La ‘Figure’ est, en effet, une notion à la fois ancienne et nouvelle. D’une part, pour la rhétorique, la figure n’a cessé d’être objet d’interrogation depuis l’antiquité, d’autre part, la problématique de la figure pose la question de la théorie de l’énonciation qui tient une place importante dans les sciences humaines dans le monde d’aujourd’hui : par exemple, dans la pratique de la gestalt-thérapie chez les psychanalystes, ou dans la sémiotique de l’énonciation.

Dans ce contexte, le terme ‘figure’ est difficile à définir, puisqu’il désigne à la fois au-dessus et au-dessous des mots. Les rhétoriciens classiques veulent saisir les ‘figures’ au-dessus des mots et établir à partir d’elles un code rhétorique. Quant aux études d’origine linguistique, ceux qui la considérent au-dessous des mots, disent qu’on ne peut l’observer que dans un parcours (isotopie figurative ou thématique). Cependant ils parlent du même mot, ‘Figure’.

D’où vient cette complexité de ce mot ?

La révision de la rhétorique ancienne nous permettra à résoudre d’une partie de cette énigme, car nous y découvrirons que au départ, il y avait plusieurs mots grecs qui ont les usages différents. En les traduisant en latin, tous ces mots sont regroupés en un mot : figure. Ensuite, un tour dans la sémiotique de Greimas nous résoudra une autre moitié de cette énigme, car le concept de ce mot est tout autre dans la sémiotique. Après ces révisions qui nous permettra comprendre les divers usages qu’on met sur ce terme, nous verrons comment le CADIR utilise ‘Figure’ lorsqu’il pratique l’analyse figurative.

Cette étape pourrait paraître au lecteur comme un long détour pour enfin aboutir à l’analyse des textes dans la troisième partie. Cependant cette deuxième partie théorique nous a été nécessaires et opportune pour définir, d’une part, la notion de ‘Figure’ comme outil de la lecture, d’autre part, la relation qu’elle peut y avoir avec la ‘rencontre’ qui est l’objet principal de notre étude.

Nous aborderons cette deuxième partie dans l’ordre suivant : Les figures en rhétorique (chapitre 1), La sémiotique – figurative et énonciative - (chapitre 2), La proposition du CADIR (chapitre 3). Au chapitre 4, nous construirons un « Modèle figuratif de la rencontre » qui sera servi comme le modèle analytique pour la troisième partie de ce travail.

Notes
173.

Le terme ‘Figure’ est utilisé également en critique littéraire : par exemple, C.W.Nettelbeck, 1970, p.103 : figure allégorique de Mouchette, ou figure stylistique.