A. Les quatre problématiques relues par Greimas

Greimas participant à cet ouvrage, considère le texte évangélique comme un discours novateur, et le différencie de deux autres discours (conte, mythe) 316 . Il reprend les questions posées par le CADIR :

  • 1) Stratégie des macro- et des micro-structures  : Greimas, reconnaissant le manque de méthodologie « lorsqu’il s’agit d’analyser les mini-récits ou les séquences autonomisées » 317 , propose comme une nouvelle méthode que les études bibliques cherchent à établir dans le livre. C’est établir par-delà les micro-récits et les scènes dialoguées, des unités discursives intermédiaires plus larges que sont les macro-séquences. « C’est là une novation méthodologique prometteuse » dit-il. L’élargissement d’unités discursives a révélé en effet le vrai problème de la syntaxe narrative. A partir de là, il propose une relecture complète aussi bien dans l’ordre syntagmatique (problème de la véridiction) que dans l’ordre paradigmatique (continuité sémantique : isotope).
  • 2) Pluri-isotopes  : Lorsqu’il s’agit de bi-isotope, deux isotopies sont superposables et hiérarchisées  318 . Quant aux pluri-isotopes, selon la théorie standard, on choisit une isotopie de base sur laquelle se fondent les autres. Cependant les textes évangéliques y résistent. D’une part, toutes les isotopies de lecture sont pragmatiques et figuratives ; d’autre part, la nature du sujet n’est pas la même. Face à ces difficultés, Greimas propose deux solutions : i) trouver une nouvelle isotopie, abstraite qui, tout en reposant sur une structure actantielle sous-jacente, permettrait d’étaler l’ensemble des configurations concernées ; ii) découvrir un modèle d’analyse discursive.
  • 3) Recatégorisation des rôles thématiques  : « Contrairement à ce qui se passe dans le récit proppien, les personnages évangéliques agissent souvent à l’encontre de leur être thématique présumé comme si cet être n’était qu’un paraître et que l’agir révélait leur véritable nature. Si l’Evangile met en place une taxinomie des personnages responsables chacun de son rôle, ce n’est que pour la dénier en produisant des parcours thématiques non conformes aux prévisions. A partir de ces parcours, le lecteur reconstitue facilement de nouveaux rôles qui les caractérisent. Le texte a ‘travaillé’, comme on dit aujourd’hui ; ce travail se trouve décrit dans ce recueil et défini comme la recatégorisation des rôles thématiques » 319 .
  • 4) Problématique du carré sémiotique et le changement du statut d’objet  : Dans le texte évangélique, « les deux programmes narratifs donnés sont parallèles et incompatibles, mais non contradictoires » 320 . Le plus souvent, l’acteur central des évangiles, Jésus, refuse de reconnaître dans son opposant un anti-sujet. Ce n’est plus l’objet en quête qui est au centre de la problématique (performance), mais la compétence du sujet et sa qualité qui deviennent le centre de la question.

Notes
316.

le discours conservateur (le conte merveilleux russe), et le discours mytique.

317.

A.J. Greimas, 1977, p.229

318.

la dimension cognitive sur l’isotopie pragmatique

319.

A.J. Greimas, 1977, p.235-6

320.

A.J. Greimas, 1977, p.236