La pertinence du débat sur la nature hiérarchique ou non de la relation entre les ministres et le Premier ministre perd de sa force lorsque les caractères de cette relation sont analysés de plus près : les ministres sont bel et bien soumis à l’autorité de Matignon. La Constitution ne distingue pas sans raison le Premier ministre du reste du Gouvernement. Il se voit confier des prérogatives confirmant sa suprématie normative, et dispose des moyens à même d’assurer le respect de la solidarité gouvernementale. Tout membre du Gouvernement se voit contraint d’obéir, sous peine de révocation, aux orientations fixées par le biais d’actes relevant du pouvoir d’instruction. Il est alors illusoire de chercher à placer le ministre et le Premier ministre sur un pied d’égalité. « Quasi pouvoir hiérarchique », « pouvoir hiérarchique politique », l’hésitation des formules n’exprime que les doutes persistant sur les contours malaisés d’une notion juridique, en même temps qu’elle révèle l’altérité statutaire au sein du collège gouvernemental.
En tout domaine de l’action ministérielle, les membres du Gouvernement se trouvent contraints de collaborer avec un appareil administratif dédié à la direction de leur action. Les ministres se trouvent soumis à un Premier ministre se trouvant « en mesure d’exercer pleinement une mission qu’il [est] seul à pouvoir remplir parce qu’il contrôl[e] seul la salle des machines » 476 . Aux niveaux national comme européen, les organes dépendant de Matignon, parfois dans une étonnante similitude, assurent la surveillance et le contrôle des ministres.
Tout concourt par conséquent à la subordination du ministre dans l’action gouvernementale.
Selon l’expression imagée de Pierre AVRIL, « Diriger le Gouvernement », op. cit., p. 33.