La Constitution, par essence, organise la répartition des compétences entre les différentes autorités qu’elle consacre. L’équilibre des pouvoirs ainsi créé s’exercera en principe dans le respect de cet « ensemble de pouvoirs et devoirs attribués et imposés à un agent pour lui permettre de remplir sa fonction » 480 . Sous cet angle, le pouvoir normatif du ministre peut être apprécié à l’aune de la répartition constitutionnelle du pouvoir réglementaire.
Cependant, la situation n’est pas aussi simple qu’il paraît. En effet, les compétences dévolues peuvent l’être de manière plus ou moins précise. Certaines dispositions constitutionnelles sont de même susceptibles de donner lieu à discussion lorsque, de leur ambiguïté, pourrait être inférée l’attribution d’un pouvoir non explicitement affirmé. Une telle réflexion sera d’autant plus légitime dès lors que, de la reconnaissance d’un tel pouvoir, dépendra le fonctionnement normal des institutions et de la vie administrative. Un élément supplémentaire peut s’insinuer dans la discussion, tenant à l’éventuelle confrontation entre un texte constitutionnel et un continuum administratif, le second se trouvant invoqué pour justifier le sens à donner au premier dans le but d’en lever l’ambiguïté.
Or, cette préoccupation se trouve au cœur de la situation du ministre en matière d’attribution du pouvoir réglementaire. La Constitution semble en exprimer de façon nette la dévolution, au Président de la République et au Premier ministre. Pourtant, en raison de nombreuses incertitudes, le problème se pose de savoir si le ministre, d’une façon ou d’une autre, en bénéficie. La question n’est pas dénuée d’un intérêt très contemporain. En effet, le caractère interministériel de l’action administrative est devenu majeur, et la centralisation, autour du Premier ministre, de l’exercice du pouvoir réglementaire se comprend plus aisément. Les différentes attributions des ministres pouvant se recouper, des risques de conflits s’agissant de l’édiction d’arrêtés interministériels ne manqueraient pas d’entraîner de graves blocages gouvernementaux.
Il est alors nécessaire de vérifier, à l’aide d’une analyse n’évacuant pas les doutes et les controverses, l’absence de consécration constitutionnelle d’un pouvoir réglementaire ministériel ( Chapitre I ). Il faudra alors s’interroger sur le seul pouvoir de réglementation reconnu au ministre, celui s’exerçant sur ses services, pour en apprécier les contours et en déterminer la valeur véritable ( Chapitre II ).
Chapitre I. L’absence de consécration constitutionnelle d’un pouvoir réglementaire ministériel.
Chapitre II. La seule attribution au ministre d’un pouvoir de réglementation interne et subsidiaire.
CORNU (Gérard) (Sous la direction de), Vocabulaire juridique, op. cit., p. 177.