Conclusion du titre premier

En dépit de la condition du ministre sous la Cinquième République, en dépit de son statut particulier, en dépit de la répartition des compétences au sein du pouvoir exécutif telle que résultant de la Constitution, il semble être de l’essence même de la fonction gouvernementale de renfermer les ressources lui permettant de s’exercer.

La qualité de membre du Gouvernement implique la détention de moyens permettant de dépasser les obstacles découlant du statut constitutionnel du ministre. D’une certaine façon, ce statut constitutionnel ne renseigne pas suffisamment sur la situation des relations et rapports de force entre les ministres, au sein du Gouvernement. Une sorte d’infra droit rend les choses infiniment plus complexes qu’elles n’apparaissent de prime abord. Il a ainsi été possible de déceler une inégalité ministérielle au sein du Gouvernement. Cette situation inégale provient de pouvoirs juridiques différents entre les membres du Gouvernement, instaurant une hiérarchie des droits et des pouvoirs, et ouvrant la voie d’une émancipation au profit de certains membres du Gouvernement.

Il a ensuite semblé admissible de constater que la qualité de ministre entraînait la détention d’une autorité susceptible d’accroître le pouvoir ministériel. Le caractère à la fois politique et administratif de l’institution ministérielle donne à celle-ci un avantage spécifique dans l’exercice de l’autorité hiérarchique. Cette autorité s’exerce d’autant plus aisément qu’elle profite des potentialités du pouvoir d’instruction, véritable source d’épanouissement du pouvoir ministériel. Cet épanouissement trouve son achèvement le plus éclatant dans l’appropriation des pouvoirs préfectoraux que le ministre est en mesure d’opérer indirectement, captant par là même des prérogatives qui lui demeurent constitutionnellement refusées, et compensant en quelque sorte les servitudes d’un statut restrictif.

Cette émancipation organique du ministre dans sa fonction de membre du Gouvernement est nécessaire pour permettre, dans une seconde étape, son émancipation normative par l’exercice administratif de ses compétences.