Conclusion du titre second

La fonction administrative du ministre lui offre les voies indirectes d’une émancipation de son autorité, de son influence, de son pouvoir.

Une fois encore, la comparaison est troublante entre, d’une part, les compétences du ministre telles qu’elles ressortent du dispositif institutionnel, et le pouvoir qu’il détient dès lors qu’il se trouve dans l’exercice de sa fonction.

Ce qui semble se dégager au long des développements de ce titre, c’est que la place centrale du ministre dans le dispositif institutionnel ne peut se satisfaire d’une subordination, fut-elle déplacée du Parlement vers le sommet de l’exécutif. Elle requiert l’attribution de moyens sans lesquels l’ensemble du système politico-administratif ne saurait fonctionner.

Ces moyens sont constitués de l’ensemble des actes par lesquels le ministre met en œuvre son autorité hiérarchique. Ces actes sont essentiellement les circulaires et instructions ministérielles. Le traitement dont ils font l’objet devant le juge est suffisamment souple pour que ces actes se révèlent d’une utilité décisive pour leur auteur. En tout état de cause, en dehors de toute volonté déterminée du juge à l’occasion de son instruction, le phénomène interprétatif, induit par les critères utilisés pour le contrôle des circulaires, traduit par lui-même l’exercice potentiel d’un pouvoir normatif.

Par conséquent, en dépit de la position plus modeste occupée depuis 1958 par l’autorité ministérielle dans le fonctionnement des institutions françaises, celle-ci conserve la faculté de mener à bien ses missions. Le ministre dispose, assez largement, des possibilités que lui offre son pouvoir hiérarchique, reflet juridique de la construction pyramidale du système français de gouvernement. Disposant des moyens juridiques – matériellement et organiquement – pour imposer ses décisions et les faire entrer dans l’ordonnancement juridique, le ministre se trouve alors en position de premier exécutant de la loi. Son pouvoir n’en est que plus décisif dans la mesure où, par différents actes qu’il est à même de produire, son influence est grande jusqu’à pouvoir interpréter la norme à appliquer. De là, on assiste à une véritable expansion du pouvoir ministériel par l’instrumentalisation des relations hiérarchiques du ministre.