3.Du PDU au projet de territoire

3.1.PDU = planification très sectorielle et très techniciste. Quelle articulation avec les projets urbains ? Quelle place pour la ville rêvée ?

On revient de loin ! Il n’y avait pas vraiment de projet urbain, pas vraiment de vision cohérente au niveau de l’agglomération. Elle n’existait même pas ! Tout ça se met en place progressivement. Moi je suis par nature, par goût, très sensible à tout ce qui peut être visions de l’avenir, grands projets, rêves partagés d’une ville et d’une agglomération… C’est intéressant, mais ça ne va pas très loin si je le fais tout seul. Donc à un moment donné, il faut qu’on ait les moyens de porter un projet collectif. Ca veut dire que les élus soient à un bon niveau de conscience de tout ça, d’autant qu’on est d’horizons et de territoires différents. C’est pour ça que j’emmène mes collègues de temps en temps voir ce qui se passe ailleurs : Glasgow, Bilbao… Ca laisse des traces, c’est bien ! C’est mon côté pédagogue, il faut que je fasse non seulement mon travail, mais que je fasse adhérer à cette vision d’avenir. Ce ne servirait à rien que je pense à la ville rêvée si je suis tout seul… Donc il faut que je prépare les esprits de l’agglomération, et notamment les élus. Ensuite, il y a un problème de compétence : les élus sont comme ils sont, les reflet d’un territoire avec ses difficultés et ses disparités. Les techniciens sont aussi comme ça : il manquait des compétences, des volontés, des ambitions. Peu à peu, on a structuré la Ville et l’agglomération, avec des compétences nouvelles. Il faut se rappeler que Monsieur Achou était tout seul il y a dix ans ! Aujourd’hui on a structuré les compétences, avec quelques autres… Et puis il y a ce fameux G7 qui s’est constitué, et qui est sympathique parce que c’est une sorte d’émergence spontanée de quelques leaders, qui ont pris conscience de cette nécessité d’un travail collectif. L’Etat nous aide, les esprits sont prêts, les compétences techniques n’ont jamais été aussi forts que maintenant, donc on est à un bon niveau, je dirais qu’on en est où Bilbao devait être il y a 15 ou 20 ans ! Et moi, dans tout ça, oui, j’ai une posture d’entrepreneur. C’est mon rôle ! J’impulse des idées nouvelles, des stratégies. Ensuite, il faut fédérer, rassembler le maximum de partenaires autour de ces stratégies. Ce qui me comble, aujourd’hui, même s’il reste beaucoup à faire, c’est de voir l’adhésion suscitée par ce projet d’agglomération, de la plupart des élus, quelles que soient leur sensibilité politique et leur origine géographique. Et de voir également le soutien de l’Etat, de la Région, du Département. Tout le monde va dans le même sens. Parfois, je souhaiterai que ça aille plus vite, plus loin… et puis quand je regarde dans le rétroviseur, je me dis que c’est déjà pas mal ! On a déjà fait du chemin. J’espère qu’on pourra accélérer et densifier ce travail, il faut donc continuer à entraîner le mouvement. Si je sens que l’équipe est réactive, il faut que j’en demande encore un peu plus ! Il ne faut pas que j’aille trop loin non plus, parce que c’est tendu ! On voit bien que les services sont « charrette » !

3.2.SCOT, RUL : nouvelles échelles politiques et planificatrices. Peut-on reproduire la « méthodologie PDU » ? Nombreux échecs de SDAU et SD : comment s’en prémunir pour le SCOT ?

Il y a une dynamique. Au niveau international, nous sommes aujourd’hui obligés de travailler ensemble, au sein de la RUL. C’est vrai qu’il y a des niveaux différents, mais d’une certaine manière, ça n’empêche pas de travailler ensemble. Si demain on doit travailler avec Lyon et l’agglomération lyonnaise, , ça ne veut pas dire qu’on est au même niveau et qu’on est d’accord sur tout, mais c’est une obligation. Par contre, cette exigence n’est pas spontanée. Lyon a eu la chance d’être une agglomération qui n’a pas connu beaucoup de difficultés, économiques en tout cas, et qui vit sur une dynamique économique forte. Nous, on est sur une course à handicaps ! Le cheval stéphanois avait des kilos lourds à porter, ceux de la reconversion économique. Le fringant pur-sang lyonnais n’avait jamais connu ces difficultés là ! Peu à peu on se débarrasse de notre handicap, on prend confiance dans notre propre capacité à courir aussi vite que les autres, donc on se rapproche de ce qu’il faut faire, pour être au niveau de Lyon au sein de la RUL. La DTA nous oblige à un minimum de travail en commun, c’est bien. L’Etat a compris la nécessité d’avoir des agglomérations françaises de bon niveau, sans pour autant que ce soit une mégalopole au niveau informel. Le risque est là, de se dire que pour faire simple, on met tout le monde dans Lyon ! Ce serait la pire des choses. On ne répondrait pas au besoin de la population, et ce serait contre-productif en termes d’identité et d’aménagement du territoire. Le risque, c’est que Lyon, un peu trop sûre de son succès, néglige le travail à faire de partenariat. C’est comme si moi, maire de Saint-Etienne, je disais que Firminy me casse les pieds, et que je vais l’annexer et la traiter comme un quartier ! Il faut donc être vigilants. Nous, stéphanois, devons doper notre territoire et donc être au bon niveau, et aussi faire admettre à nos amis lyonnais qu’ils doivent avoir plus de considération pour notre identité qu’ils n’en n’ont spontanément… Lyon regarde du côté de Paris, de Londres, et se dit que ces stéphanois leur cassent les pieds !

3.3.comment articuler le discours du PDU (TC et ville-centre) avec les projets (auto)routiers du Sud-Loire ? Risque de concurrence et d’incohérence ou pas ?

Dans le cadre du SCOT Sud Loire, il faut entreprendre un travail lourd de reconquête des centres urbains, et de repositionnement de Saint-Etienne comme la ville-centre du Sud Loire. Notre projet de territoire, c’est aussi éviter l’étalement urbain, parce que c’est une source de gaspillage. Les liaisons avec Lyon, c’est une autre échelle, celle de l’aménagement du territoire. Ce n’est pas que Lyon – Saint-Etienne, c’est Lyon – façade atlantique et Lyon – Toulouse. On est obligés, nous stéphanois, parce que c’est notre intérêt et aussi la géographie, d’être un point de passage entre Lyon et le sud-ouest, Lyon et le centre de la France. Sauf que notre infrastructure n’est pas un niveau des besoins ! Donc ce qu’on demande, ce n’est pas de créer quelque chose qui n’existe pas, c’est simplement mettre à niveau une infrastructure d’aménagement du territoire. L’A 45, c’est une logique d’aménagement du territoire, qui sert des territoires. Ce n’est pas antagoniste d’un projet urbain. Ce sont deux niveaux de territoire qui ne sont pas les mêmes. Il sont complémentaires !